La pandémie de Covid-19 a eu un effet "sans précédent" et "profond" sur les droits, alimentant le racisme envers les minorités, tandis que "de nombreux enfants ont souffert", selon un rapport européen publié le 10 juin 2021 (en lien ci-dessous). La situation "a exacerbé des défis et inégalités existants dans tous les domaines, affectant en particulier les groupes vulnérables", relève l'Agence européenne des droits fondamentaux (FRA), basée à Vienne (Autriche), dans ce document annuel, déplorant des conséquences "durables". Nombre des 27 pays membres de l'UE ont décrété des états d'urgence "accordant aux gouvernements des pouvoirs décisionnaires extraordinaires" qui ont limité "l'ensemble des droits humains", note l'étude qui porte aussi sur la Macédoine du Nord et la Serbie.
Les personnes handicapées en 1ère ligne
"Les conséquences ont été graves pour de nombreuses personnes handicapées", déplore le rapport, soulignant un risque plus élevé d'infection au Covid-19, a fortiori pour celles étant accueillies dans des "établissements de soins, également confrontées à des interdictions de visites, à l'isolement et au stress psychologique". Autre problème majeur : la perturbation et la diminution des services essentiels dédiés. "Ils comprennent l'éducation, les écoles et d'autres soutiens à l'apprentissage pour les enfants handicapés, les soins de santé, le soutien communautaire et à domicile et les transports facilités", précise le document. La crise a également accentué la fracture numérique entre les personnes handicapées et le reste de la population.
Des mesures insuffisantes
"Les Etats membres ont pris un certain nombre de mesures pour relever ces défis, conformément à leurs obligations au titre de la Convention relative aux droits des personnes handicapées (CRPD)", constate le rapport. L'article 26 de la Charte prévoit, plus précisément, "le droit des personnes handicapées à bénéficier de mesures destinées à assurer leur autonomie, leur intégration sociale et professionnelle et leur participation à la vie de la communauté". Dans certains pays, elles comprenaient, par exemple, un financement supplémentaire pour les services dédiés aux personnes handicapées, un soutien financier pour le maintien en emploi, un congé spécial pour les personnes handicapées et celles souffrant de problèmes de santé préexistants ou encore pour les parents d'enfants handicapés à la suite de la fermeture d'une école ou d'une garderie. Autres initiatives : une aide à domicile pour les élèves ou des dispositions spécifiques pour les écoles accueillant des élèves handicapés, ainsi que des permanences téléphoniques ciblées pour un soutien et une assistance psychologique. "Malgré ces efforts, la situation de ce public s'est aggravée", constate le rapport enjoignant à mettre en place de nouvelles mesures.
Un risque plus élevé de perdre son travail
Autres catégories en première ligne en période pandémique : les personnes âgées, les enfants, les Roms, réfugiés et migrants mais aussi les femmes, "touchées de manière disproportionnée", qu'il s'agisse de l'emploi, de l'équilibre vie privée-vie professionnelle ou de leur santé du fait de leur forte représentation dans les secteurs dits "essentiels". Du côté des minorités, le rapport mentionne aussi un risque plus élevé de perte de travail. En outre, la pandémie "a provoqué une hausse des incidents racistes et xénophobes", souligne-t-il, évoquant "des insultes verbales, des cas de harcèlement, d'agression physique et des discours de haine".
Des élèves "déconnectés"
Les enfants, a fortiori ceux en situation de handicap qui ne bénéficiaient pas de matériel adapté, ont pâti pour leur part de l'éducation à distance. "Les systèmes n'étaient pas prêts à une transition aussi soudaine" et les enseignants pas formés, constate l'agence. Les élèves issus de milieux économiquement ou socialement défavorisés, sans connexion internet ou matériel informatique, ont payé le plus lourd tribut. En Roumanie par exemple, où les écoles ont été fermées une très grande partie de l'année, 25 % d'entre eux n'ont pas eu accès aux cours en ligne, selon l'ONG Save the Children, citée dans le rapport.
Violences exacerbées
"La maltraitance des enfants a également augmenté pendant le confinement et la quarantaine", ainsi que le nombre des affaires d'abus sexuels en ligne, ajoute le document, s'appuyant sur des éléments de l'agence européenne de police Europol. De manière plus large, les violences domestiques ont augmenté sur la période : en République tchèque et en Allemagne, le nombre d'appels aux permanences téléphoniques a ainsi bondi de 50 % et de 20 % respectivement, entre mars et juin 2020. En France, lors du premier confinement, les signalements en gendarmerie ont augmenté de 32 %, les interventions de police de 42 % (article en lien ci-dessous). Un fléau qui s'abat plus particulièrement sur les femmes en situation de handicap, dont 80 % seraient concernées, dans l'Hexagone (article en lien ci-dessous).
"Les gouvernements doivent mettre en place des structures durables pour lutter contre les inégalités, le racisme et l'exclusion", a commenté dans un communiqué Michael O'Flaherty, directeur de la FRA.