Hausse de 32 % des signalements en gendarmerie et de 42 % des interventions de police... Le premier confinement a agi comme un catalyseur des violences conjugales. A l'heure du reconfinement, « la prise en charge des femmes concernées doit pouvoir être assurée », exige le ministère de la Santé dans un communiqué, alors que les signalements sur la plateforme gouvernementale « Arrêtons les violences » sont en hausse de 15 %. Selon lui, outre un accompagnement médical, les hôpitaux doivent faciliter le dépôt de plainte pour mettre fin à cette spirale infernale. Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale prévoit, à ce titre, 5 millions d'euros pour 2021 et 2022 afin de financer des services dédiés. A l'occasion de la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes, le 25 novembre 2020, Femmes pour le dire, femmes pour agir (FDFA) franchit, de son côté, une nouvelle étape. Après avoir lancé en 2015 le premier numéro d'écoute spécialement dédié aux femmes handicapées, l'association inaugure un tout nouveau site « entièrement dédié à ce combat » (en lien ci-dessous), selon elle, afin d'accompagner celles qui, selon la plupart des statistiques, ont davantage de risque d'être exposées. En effet, 80 % des femmes en situation de handicap seraient victimes de violences, dont 60 % au sein du domicile.
Un nouveau site FDFA
La vocation de ce site ? Etre un soutien pour ces femmes et leurs proches, une vitrine des actions de l'association ainsi qu'un centre de ressources sur le sujet, également destiné aux aidants et aux professionnels qui les côtoient régulièrement. Objectif ? Leur permettre de repérer les violences et accompagner celles qui les subissent. FDFA souhaite partager cette expertise « pour que les violences faites aux femmes handicapées ne restent pas un angle mort des violences sexistes et sexuelles ». Au programme : études, rapports, ouvrages de référence, textes juridiques, films et reportages. RDV le 25 novembre, à 10 heures, pour l'inauguration du site. En attendant, si le local de FDFA est fermé, mesures sanitaires obligent, sa ligne d'écoute reste joignable au 01 40 47 06 06, aux horaires habituels : le lundi de 10h à 13h et de 14h30 à 17h30 et le jeudi de 10h à 13h. Plus de 2 000 appels ont été reçus par des « écoutantes formées », en 2019.
Plateforme d'enregistrement des violences
Même ambition, autre interface... Trois ans après son lancement, la Grande cause « Stop aux violences faites aux femmes » de Make.org passe à l'action avec la plateforme digitale « Mémo de vie » (en lien ci-dessous). Objectif : rompre l'isolement et aider, chaque année, 20 000 femmes en proie aux violences à « prendre conscience de la gravité des faits », en mettant notamment en exergue l'évolution de leur humeur et en décrivant les situations de danger dans lesquelles elles se trouvent. Le site, co-construit avec des experts et des personnes victimes de violences conjugales, propose également un espace de stockage sécurisé qui permet de rassembler éléments de preuves et indices. « Le moment venu, les utilisatrices pourront ainsi produire un dossier cohérent et structuré chronologiquement : main courante, certificats médicaux, etc. », détaille France victimes qui en est à l'initiative.
Bientôt des fonctionnalités adaptées ?
S'il s'agit, dans un premier temps, d'une expérimentation au sein des 130 associations d'aide aux victimes de la fédération, le déploiement de la plateforme au grand public est prévu pour début 2021. A noter que « comme il s'agit d'une web-application, nul besoin de la télécharger et le logo n'apparaît donc pas sur l'écran d'accueil, précise l'association. D'autre part, en cliquant sur le bouton 'Vite, je quitte', l'utilisateur est renvoyé sur la page Météo France. Il est ensuite impossible de revenir sur le site en cliquant sur la flèche 'Précédent'. » S'il n'existe, pour l'heure, pas de dispositif spécifique pour les femmes en situation de handicap, l'association mise sur une collecte de fonds en 2021 pour mettre en place de nouvelles fonctionnalités, et notamment l'adaptation de l'appli (caractères agrandis ou dictée vocale). En parallèle, France victimes propose un accompagnement tout au long du parcours judiciaire, de l'infraction jusqu'à l'indemnisation de la victime et l'exécution de la peine. Rappelons qu'en France, une femme meurt tous les deux jours, en moyenne, sous les coups de son (ex-)conjoint et qu'une victime de féminicide sur trois avait déposé plainte... classée sans suite. De même, selon France victimes, sur 1 000 viols, seules 100 personnes portent plaintes, et 73 sont classés sans suite par manque de preuves. Au final, seule une plainte sur 100 aboutit à une condamnation.
Un partenariat avec APF France handicap
Par ailleurs, France victimes a signé un partenariat avec APF France handicap en décembre 2017, pour travailler ensemble à « une meilleure prise en charge des victimes en situation de handicap », « cinq fois plus touchées par les violences intrafamiliales que le reste de la population ». La fédération s'est également engagée à intervenir, sous peu, lors d'une formation organisée par APF France handicap sur le thème « violences sexuelles et handicap ». Elle vise à former les professionnels des secteurs sanitaire, social et médico-social accompagnant des enfants et des adultes handicapés. Le but est, notamment, de développer leurs connaissances juridiques (définition du harcèlement, d'un viol...), de les sensibiliser aux violences conjugales et à leur impact sur la santé mais aussi de connaître les ressources à disposition sur le territoire.
Grenelle violences : 23 mesures réalisées
Un an après la conclusion du Grenelle contre les violences conjugales, sur les 46 mesures annoncées, 23 ont été réalisées, 20 sont « en cours » et trois ne sont pas encore construites, selon le gouvernement qui doit présenter un nouveau bilan le 25 novembre 2020. Parmi les mesures à venir, l'extension des horaires du numéro d'écoute national, anonyme et gratuit, 3919, et sa mise en accessibilité aux personnes en situation de handicap est la plus attendue. Rappelons que pour toute personne en danger immédiat, il convient d'appeler le 17 ou le 18 mais d'autres solutions, plus discrètes, ont été mises en place, tel que l'envoi de sms au 114, un numéro à l'origine destiné aux personnes sourdes et malentendantes (article en lien ci-dessous), qui se chargera d'alerter les secours. Par ailleurs, il existe une plateforme d'écoute Stop-violences-femmes.gouv.fr et celle de signalements arretonslesviolences.gouv.fr, opérationnelle 24 heures sur 24.