Par Bertille Ossey-Woisard
Les discussions se sont tenues dans un "état d'esprit constructif et responsable dans le contexte actuel", a assuré Hubert Mongon, le négociateur du Medef, lors d'un point presse, le 3 novembre 2020, à l'issue d'une négociation sur le télétravail réunissant patronat et syndicats, qui a duré trois heures. "Pour le bien commun", au vu de la généralisation du télétravail, les représentants du Medef, de la confédération des PME (CPME), de l'U2P (entreprises de proximité), de la CFDT, la CGT, Force ouvrière, la CFE-CGC et la CFTC ont convenu de resserrer le calendrier, fixant la réunion conclusive au 23 novembre, alors qu'auparavant ils avaient prévu à cette date la deuxième réunion.
Le handicap : à négocier
D'ici là, trois réunions sont programmées les 10, 13 et 17 novembre, afin de "se donner les moyens de conclure" cette négociation, a détaillé M. Mongon. Un plan d'accord sera soumis par le Medef aux négociateurs d'ici la fin de la semaine. Ce document fera apparaître les principaux chapitres (sept au total) et les points à négocier, dont le bénévolat, la cohésion sociale, le volontariat, la réversibilité, l'éligibilité d'un poste au télétravail, la charge de travail, les frais professionnels, la formation des manageurs, l'isolement des salariés, le handicap ou encore l'intégration des nouveaux collaborateurs. Le télétravail exercé en temps de crise sera abordé dans le septième chapitre.
5 millions de télétravailleurs au 1er confinement
Depuis le 30 octobre 2020 et pour la période de confinement, le temps de télétravail a été "porté à 100 % pour les salariés qui peuvent effectuer l'ensemble de leurs tâches à distance", selon le protocole national sanitaire en entreprise visant à freiner l'épidémie, remis à jour après l'allocution télévisée d'Emmanuel Macron le 28 octobre 2020. "Le télétravail n'est pas une option" pendant le confinement, insiste depuis quelques jours Élisabeth Borne, la ministre du Travail, exhortant les partenaires sociaux à "avancer rapidement sur cet accord" qui "pourra donner des repères à toutes les entreprises". La date de négociation avait été fixée en septembre, les syndicats ayant fini par convaincre le patronat de la nécessité d'un document pour mieux encadrer le télétravail, auquel jusqu'à cinq millions de salariés ont recouru au moment du premier confinement. A la mi-octobre, avant sa nouvelle généralisation, près de 1,8 million de personnes travaillaient à domicile.
Document contraignant... ou pas ?
Si le patronat a fini par accepter une négociation, censée aboutir à un accord national interprofessionnel (ANI), le Medef a d'emblée fixé ses conditions : le document ne sera "ni prescriptif" "ni normatif", c'est-à-dire non contraignant. "L'état d'esprit n'a pas changé", dit Hubert Mongon, précisant qu'une fois le document écrit, "il sera temps de regarder quelle sera la nature juridique de ce texte". Les syndicats sont sur une toute autre position, réclamant un document contraignant. "Là, on n'est pas dans un télétravail normal, on est dans un protocole sanitaire qui nous dit 'il faut 100 % de télétravail'. On constate que malheureusement, là où il n'est pas négocié, là où il n'est pas discuté, là où il n'est pas concerté avec les représentants des salariés, il se met difficilement en place ou mal en place", a observé le 2 novembre sur FranceInfo Laurent Berger, le numéro un de la CFDT. "On ne va pas signer n'importe quoi", a de son côté prévenu Eric Courpotin, négociateur de la CFTC.
De l'importance d'un ANI
Dans un communiqué, FO souligne l'importance d'un ANI car "la situation actuelle de travail à domicile cinq jours sur cinq, dans le cadre de contraintes sanitaires, ne peut être assimilée à un télétravail organisé de façon protectrice des droits des salariés". Le cadre légal sur le télétravail repose en partie sur l'ANI de 2005, qui lui donne notamment une définition, pose le principe du volontariat. Il a été partiellement transposé dans la loi de simplification de 2012. Les ordonnances réformant le Code du travail de 2017 simplifient le recours au télétravail mais "reviennent aussi sur certains acquis" de 2005, comme la prise en charge des frais, selon les syndicats.