Cinq ans qu'Emmanuel Macron n'avait pas mis les pieds en Nouvelle-Calédonie. Cette collectivité ultramarine du Pacifique Sud est en proie depuis plusieurs années à des guerres intestines au sujet de son indépendance. Objectif du président de la République à l'issue de cette rencontre du 24 au 26 juillet 2023 : « rassembler » et « ouvrir une nouvelle page ». Celle-ci doit s'écrire avec les personnes en situation de handicap, réclament les acteurs locaux. Le Collectif handicaps néo-calédonien a, en effet, profité de la tournée présidentielle pour écrire au chef de l'Etat, réclamant « l'élaboration de textes législatifs en matière d'accessibilité ».
Aucune avancée depuis 2009
« Notre secteur s'est vu affaibli au fil des années », déplore le regroupement représentatif de plus de cinquante associations. En cause, selon lui, « le transfert des compétences de l'Etat au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie en matière de handicap ». Il fait suite à l'Accord de Nouméa signé en mai 1998 qui a défini le statut particulier de l'île. Un partage de la souveraineté qui lui permet d'adopter sa propre législation, appelée « lois du pays ». Résultat, la Nouvelle-Calédonie a l'équivalent local de la « loi de 2005 », votée en 2009, qui porte sur la création d'un régime d'aides en faveur des personnes en situation de handicap et celles en perte d'autonomie, ainsi que sur l'emploi. Or « aucune autre avancée législative notable n'a depuis été mesurée », regrette le Collectif handicaps, soulignant que « bien des efforts restent à fournir ».
3 personnes handicapées sur 4 sans emploi
Les points de tensions soulevés sont nombreux, tant en matière d'accessibilité universelle que d'emploi ou encore d'école inclusive. Ces problèmes, également rencontrés en métropole, sont exacerbés en Nouvelle-Calédonie comme dans d'autres territoires d'Outre-mer (Lire : Handicap : en Guyane, l'Etat tente de combler son retard). Un chiffre éloquent à ce titre : l'obligation d'emploi, fixée à 2,5 % des effectifs des entreprises de 20 salariés ou plus, contre 6 % dans l'Hexagone. De plus, trois personnes en situation de handicap sur quatre n'occupent pas d'emploi, selon l'enquête Forces de travail de l'Institut de la statistique et des études économiques (ISEE) de 2019. Cela n'est guère mieux du côté de l'accès à l'environnement physique, aux transports, à l'information et à la communication ou aux autres équipements et services, peu adaptés. La faute à une absence de législation spécifique. Quant au chantier de l'école inclusive, celui-ci semble encore moins avancé qu'en métropole, avec, notamment, « un manque de classes et d'unité localisées pour l'inclusion scolaire (Ulis), d'auxiliaires scolaires et l'inadéquation des formations des encadrants ». Au sujet de la participation citoyenne, la collectivité d'Outre-mer est aussi à la traîne. Une seule personne en situation de handicap est par exemple conseillère municipale à la mairie de Nouméa.
5 points cruciaux
Dans sa lettre adressée à Emmanuel Macron, le collectif demande de mettre l'accent sur cinq points cruciaux : « la mise en œuvre effective de l'accessibilité universelle », « le plein emploi pour les travailleurs reconnus en situation de handicap », « l'école pour tous », « la participation pleine et entière à la vie politique et à la vie publique » et « la création d'un statut octroyant des droits aux aidants ». Espérant une rencontre lors de la prochaine visite du Président à Nouméa, qui n'est probablement pas pour tout de suite, les associations locales ont d'ores et déjà été reçues par Frédéric Rose, conseiller intérieur sécurité du chef de l'Etat. Rien n'a pour le moment fuité à la suite de leurs échanges. « Il a également été acté que nous serions mis en contact avec Mme Katia Julienne, conseillère santé, handicap, personnes âgées du cabinet du président de la République pour travailler sur les sujets énoncés », fait savoir le Collectif.