Sur les 600 millions de personnes « obèses » dans le monde (chiffre OMS 2014), au moins 2,8 millions en décèdent chaque année, soit 6 850 par jour. L'obésité est devenue un fléau auquel certains gouvernements ont décidé de s'attaquer. En France, à l'occasion de la journée régionale organisée par les quatre Centres spécialisés obésité d'Ile de France, Agnès Buzyn, ministre de la Santé, a présenté la feuille de route « Prise en charge de l'obésité 2019-2022 ».
Un handicap à part entière
En France, près de la moitié des adultes sont en surpoids et 8 millions d'entre eux souffrent d'obésité, dont 500 000 sous une forme sévère. En décembre 2014, la Cour de justice de l'Union européenne tranche : elle peut être considérée comme un « handicap » si elle rend difficile la vie professionnelle de celui qui en souffre, et donc être invoquée dans des affaires de discrimination (article en lien ci-dessous). « Seule l'obésité morbide, la plus extrême, qui présente un IMC supérieur à 40, pourrait créer des limitations équivalentes à un handicap », précise-t-elle à l'époque. Les conséquences physiques mais également psychologiques et sociétales sont considérables, la personne devant faire face à une stigmatisation croissante, autant de critères qui entrent dans la définition du handicap. En 2017, la Fédération mondiale de l'obésité (World obesity) confirme son soutien à la définition de l'obésité, cette fois-ci comme « maladie chronique » récidivante. Elle est, par ailleurs, un facteur de risque principal de nombreuses maladies chroniques (maladies cardio-vasculaires, diabète de type 2, cancers…).
Quelles mesures ?
2,8 milliards d'euros en soins de ville et 3,7 milliards d'euros à l'hôpital sont dédiés à l'obésité chaque année, « son impact, majeur pour la collectivité, étant marqué par de fortes inégalités sociales et territoriales », souligne le ministère de la Santé. La priorité de ce plan sur trois ans est donnée à la prévention dès le plus jeune âge. Le quatrième programme national nutrition santé lancé le 20 septembre 2019 s'est donné pour objectif de réduire de 15% la prévalence de l'obésité chez l'adulte et de 20% chez l'enfant d'ici 2023. Mais il vise aussi à mieux coordonner l'ensemble des professionnels de santé autour du patient dès le repérage et jusqu'aux traitements des complications, via un système de soins décloisonné et coordonné entre la ville et l'hôpital. Enfin, il entend mieux encadrer et sécuriser la réalisation des chirurgies bariatriques (anneau gastrique, sleeve, bypass…), dont l'augmentation est jugée « frappante » par la ministre. Elles ont triplé en 10 ans, passant de 20 000 à plus 60 000, ce qui fait de la France l'un des pays européens où cette pratique est la plus répandue. Or, des complications surviennent pour près d'un patient sur quatre pour certains types d'opérations : complications digestives, risques liés à la perte de la masse musculaire mais aussi comorbidités telles que des carences nutritionnelles ou des difficultés psychologiques. Dans ce contexte, dès 2020, la « pratique de la chirurgie bariatrique sera soumise à une autorisation des centres pouvant la pratiquer sur la base de seuils d'activité et d'engagement à respecter, des critères d'une prise en charge de qualité, notamment en termes de suivi des patients », a annoncé la ministre.
37 centres spécialisés de l'obésité
Dès 2020 également, chaque patient devra bénéficier d'une évaluation de son dossier dans le cadre d'une réunion de concertation pluridisciplinaire afin que lui soit proposer le traitement le plus pertinent compte tenu de son dossier médical. Agnès Buzyn en confie le pilotage aux 37 centres spécialisés de l'obésité (CSO). Afin de mettre en œuvre concrètement cette feuille de route, un comité de suivi de l'obésité a été créé ; il doit rédiger un nouveau cahier des charges des CSO pour le premier trimestre 2020. L'enveloppe actuelle de 3 millions d'euros qui leur est dédiée pourrait être réévaluée.