Handicap mental : la France dans le collimateur de l'ONU

L'ONU n'en finit pas de rappeler la France à l'ordre sur "les traitements psychiatriques non-consensuels" dont sont l'objet certaines personnes avec un handicap mental, notamment autistes, s'appuyant sur le cas de Timothée, 16 ans.

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L'ONU n'en finit pas de rappeler la France à l'ordre (à la raison ?)… Une première fois le 17 septembre 2015  où des experts des droits de l'Homme dénonçaient le placement d'un jeune autiste de 16 ans, Timothée D., dans un hôpital psychiatrique pour adultes, où il a été soumis à des traitements médicamenteux sans son accord ni celui de sa mère. Il vivait jusqu'alors en milieu ordinaire, était scolarisé. Mais une décision de justice datant de mai 2015 (confirmée en septembre 2015) l'avait confié à la garde de son père, favorable à sa prise en charge en établissement spécialisé ; or, au bout de 4 jours, il consentait à le placer en hôpital. Un collectif d'associations de parents d'enfants handicapés avait alors déployé ses banderoles devant le Palais des Nations à Genève pour s'insurger contre les dérives du système français (article en lien ci-dessous).

Grave atteinte à la liberté

Alertée, l'ONU s'était empressée, par la bouche de sa rapporteuse spéciale sur le droit des personnes handicapées, Catalina Devandas-Aguilar, de dénoncer cette institutionnalisation qu'elle considère comme une « grave atteinte au droit à la liberté et sécurité de la personne et au respect de son intégrité physique et mentale » et qui « viole également les droits de cet adolescent à l'autonomie et à l'inclusion dans la société, à vivre au sein de sa famille et à exprimer librement son opinion sur toute question l'intéressant ». Des experts de l'Onu ont alors informé l'Etat français de leurs préoccupations sans que cela ne soit suivi d'effet (article complet sur le site de l'Onu en lien ci-dessous).

8 octobre, nouvel appel

Le 8 octobre 2015, ses deux rapporteurs spéciaux, Catalina Devandas-Aguilar et Dainius Puras (droit à la santé), réitèrent leurs avertissements, envers la France mais également tous les Etats qui pratiquent des « traitements psychiatriques non-consensuels », arguant que « la dignité doit prévaloir ». Prenant la parole lors de la Journée mondiale de la santé mentale (10 octobre), les experts indépendants ont exhorté les gouvernements à mettre fin à la détention arbitraire, l'institutionnalisation et le traitement forcés. « Enfermé dans les institutions, attaché et mis en contention, souvent à l'isolement, drogué et en sur-médication… » Ce ne sont, selon eux, que « quelques illustrations de la façon dont les personnes handicapées, ou celles perçues comme telles, sont traitées sans leur consentement, avec de sévères conséquences pour leur intégrité physique et mentale ». Et d'affirmer que « globalement, les personnes ayant des troubles développementaux et psychosociaux sont confrontées à la discrimination, la stigmatisation et la marginalisation et sont soumis à la violence psychologique et physique dans les établissements de santé mentale et dans la communauté. » Allant même jusqu'à assimiler la « pratique de traitement de force » à de la « torture ». Ces rapporteurs exhortent les Etats concernés à « mettre fin à cette situation d'urgence et à respecter l'autonomie de chaque personne, y compris leur droit de choisir ou de refuser un traitement et des soins. »

Une visite sur le terrain ?

Ils s'appuient sur la Convention relative aux droits des personnes handicapées et invitent toutes les parties prenantes à poursuivre le dialogue, en incluant les utilisateurs de ces services et leurs proches et pas seulement les professionnels. Pour en finir avec des pratiques d'un autre temps, 28 associations françaises lançaient un appel le 9 octobre 2015 demandant à l'ONU de venir constater sur le terrain (article en lien ci-dessous). Catalina Devandas-Aguilar reste en attente de la réponse du Gouvernement français, déjà rappelé à l'ordre à plusieurs reprises, y compris par sa propre justice puisqu'en juillet 2015 sept familles obtenaient des dédommagements de l'Etat totalisant 240 000 euros pour « carences » de prise en charge de leurs enfants autistes. Une première qui pourrait encourager d'autres actions devant les tribunaux.

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"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Emmanuelle Dal'Secco, journaliste Handicap.fr"
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