D'où vient l'autisme ? Depuis les premières descriptions de ce trouble en 1943 par le pédopsychiatre Leo Kanner, « de nombreuses théories sur son origine se sont succédé, la plupart incomplètes, certaines fausses, voire dangereuses », répond l'Institut Pasteur. Il y consacre le dossier de sa lettre d'information trimestrielle de février 2023, estimant que la piste génétique s'est imposée comme « la cause la plus déterminante ». Ce document exhaustif de douze pages contient la définition des troubles du spectre de l'autisme (TSA) et du neurodéveloppement (TND), ses premières apparitions dans la littérature, des informations sur une base de données « unique au monde », un essai clinique prometteur, les bénéfices de l'imagerie ou encore les avancées de la recherche, le tout agrémenté d'interviews ou encore de conseils de lecture.
Un diagnostic affiné et des troubles limités
Fondée sur une prise de conscience de la diversité et de la complexité de l'autisme, la piste génétique a contribué à « améliorer bien des aspects de la vie des personnes autistes et de leurs familles », assure l'Institut Pasteur. Des exemples ? « Elle a permis d'affiner le diagnostic du TSA et des troubles qui lui sont associés et de limiter certains troubles du sommeil », explique Thomas Bourgeron, professeur à l'Université Paris Cité et responsable de l'unité « Génétique humaine et fonctions cognitives » de l'Institut Pasteur. « Depuis la découverte des premiers gènes associés à l'autisme en 2003, la mobilisation de nos chercheurs n'a jamais faibli », se félicite cette fondation privée dédiée à la recherche médicale. Chaque année, « de nouveaux gènes sont identifiés, et les mécanismes biologiques qu'ils impactent sont décryptés » avec l'intention d'améliorer la vie des 700 000 Français concernés. « Aujourd'hui, les médecins sont en mesure de mieux les comprendre, de mieux les accompagner. (...) C'est la génétique qui, en apportant un éclairage sur la question de l'origine de l'autisme, a libéré notre représentation de ces troubles », poursuit-il.
Des études de plus en plus vastes
Outre les progrès technologiques, ces avancées ont été possibles grâce à la collaboration de chercheurs, de médecins et de patients de toutes disciplines et de tous horizons. Une participation qui croît au fil des ans. « La première analyse que j'ai publiée au début des années 2 000 portait sur 158 personnes autistes et 200 témoins. Vingt ans plus tard, notre dernière publication porte sur 13 000 personnes autistes et 188 000 personnes issues de la population générale ! », s'enthousiasme Thomas Bourgeron. Quel avenir pour la recherche en génétique sur l'autisme ? « Je suis certain que cette tendance va s'accentuer mais il est indispensable de rappeler que s'intéresser uniquement au génome n'a aucun intérêt. Il faut accepter la complexité et la diversité de l'autisme, et la société tout entière doit réfléchir à la place qu'elle réserve à ces personnes aux profils atypiques », conclut-il.
Une vaste cohorte pour comprendre l'origine des TND
Pour tenter d'identifier les causes des troubles du neurodéveloppement, et particulièrement l'autisme, le gouvernement a lancé en mars 2023 la cohorte Marianne (Lire : Marianne : une cohorte géante pour saisir l'origine des TND). Ce projet de recherche, qui s'accompagne d'une enveloppe de 6 millions d'euros, a pour ambition de suivre 1 700 femmes enceintes et leur famille, de la grossesse en passant par l'accouchement jusqu'aux six ans de l'enfant. Ce suivi « singulier, anonyme et confidentiel » comprendra des rendez-vous réguliers avec des professionnels du médico-social, des questionnaires à remplir, un suivi du développement du bébé ou de l'enfant par un psychologue, des prélèvements biologiques… Pour, enfin, lever le mystère ?