« C'est l'un des principaux tueurs au monde », selon l'Organisation mondiale de la santé. Le diabète, le plus souvent de type 2, touche 537 millions de personnes. Et ce nombre s'accroît d'années en années, en raison du vieillissement de la population mais également de la sédentarité et des mauvaises habitudes alimentaires. Cette pathologie, caractérisée par des taux élevés de glucose dans le sang, apparaît aujourd'hui comme un véritable problème de santé publique. Développer de nouveaux médicaments qui permettent de mieux traiter les causes sous-jacentes de la maladie est donc une priorité de la recherche. Message reçu pour Vincent Marion, chercheuse à l'Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale), qui, avec l'aide d'une équipe internationale*, a élaboré un nouveau produit baptisé « Patas ». Sa particularité ? Contrairement aux médicaments actuellement sur le marché, il ne traite pas les conséquences mais l'origine même du diabète de type 2 et des comorbidités associées. Les résultats de cette étude faisaient la une du journal Diabetes le 13 juillet 2022 (en anglais, en lien ci-dessous).
Traiter la résistance à l'insuline
Quelques précisions en préambule pour bien comprendre... « Le diabète correspond à un excès durable de la concentration de glucose dans le sang. Cette hyperglycémie provient d'une baisse de sensibilité des cellules à l'insuline, en particulier celles du foie, du muscle et du tissu adipeux », précisent les scientifiques. Quant à l'insuline, c'est une hormone produite par le pancréas qui a pour rôle de faciliter la pénétration dans les cellules du glucose, leur principale source d'énergie. « Pour répondre à la demande accrue qui découle de la résistance à cette hormone, le pancréas en produit encore davantage... jusqu'à s'épuiser. La production d'insuline devient alors insuffisante, et le glucose s'accumule irrémédiablement dans le sang », poursuivent-ils.
Cette étude, menée à partir de modèles animaux, indique que cette nouvelle classe de médicaments antidiabétiques baptisée « Adipeutics » (pour « thérapeutiques ciblant spécifiquement l'adipocyte ») permet de « restaurer l'absorption du glucose dans l'adipocyte malade, ce qui a comme conséquence de traiter la résistance à l'insuline ».
Bientôt un essai clinique sur l'Homme ?
Les adipocytes sont des cellules permettant le stockage des graisses dans le corps ; elles constituent une réserve majeure d'énergie de l'organisme. Chez les personnes diabétiques, elles dysfonctionnent et, en l'absence d'insuline, lient deux protéines (ALMS1 et PKC alpha) qui sont, à l'origine, censées agir distinctement. Dans des modèles de souris diabétiques, Patas a permis de casser cette interaction et de rétablir la physiologie normale des adipocytes. Résultat : « Ceux qui n'avaient plus accès au glucose sont à nouveau capables de l'absorber pour ensuite le métaboliser (ndlr, le transformer) afin de sécréter des lipides bénéfiques pour tout l'organisme, tout en absorbant des lipides extrêmement toxiques », expliquent les scientifiques. Ces résultats prometteurs chez l'animal leur permettent d'envisager « l'organisation prochaine » d'un essai clinique afin de tester Patas chez l'humain.
* En collaboration avec l'Université de Birmingham (Royaume-Uni), l'Université de Monash (Australie) et avec Alexander Fleming, ancien directeur de la division Diabètes de l'Agence américaine du médicament (FDA).