Après la ponction de 58 millions d'euros sur les réserves du Fiphfp et de l'Agefiph (2 fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées) en 2014 pour financer 10 000 emplois aidés, en partie seulement destinés aux personnes handicapées (article en lien ci-dessous), voici celle sur les caisses de la CNSA (Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie). Le 2 décembre 2015, dans le cadre des débats sur le Projet de loi de finances rectificative pour 2015, les députés ont voté, sur proposition de Christian Eckert, secrétaire d'État au Budget, un « fonds de soutien exceptionnel destiné aux dix départements connaissant une situation financière particulièrement dégradée » (amendement n°727). 50 millions d'euros ! Le hic, c'est qu'ils sont destinés à financer le… RSA (Revenu de solidarité active) !
Déjà 170 millions en 2011
Une récidive de 2011 où le prélèvement, à l'époque de 170 millions, revêtait également un « caractère exceptionnel » afin de faire face aux dépenses croissantes d'APA (Allocation personnalisée d'autonomie) et de PCH (Prestation de compensation du handicap) des départements ! Mais, à l'époque, les membres du Conseil de la CNSA l'avaient accepté dès lors qu'il ciblait des aides directes aux personnes âgées et en situation de handicap. Or, cette fois-ci, l'objectif est tout autre. Christian Eckert a reconnu que le choix de cette « ponction de la CNSA » n'était « pas totalement satisfaisant » mais avait « toujours été fait par le passé » et semblait « soutenable », la CNSA « étant actuellement dotée de 180 millions d'euros ». Certes, son budget est de 22 milliards d'euros par an ; 50 millions ne seraient donc qu'une goutte d'eau ?
Un collectif d'assos proteste
Les membres du GR31, un collectif d'associations représentant les personnes âgées, handicapées et les professionnels qui sont à leur service, ne partagent pas cet « optimisme »... « Entre annulation de crédits et prélèvements sur réserves, quel avenir pour le financement des établissements et services accompagnant des personnes âgées et des personnes en situation de handicap ? Aux 50 millions d'euros de ce fonds d'urgence, s'ajoute une annulation de 85 millions de crédits destinés aux établissements et services dont les Agences régionales de santé n'auraient pas eu besoin… Au total, 135 millions de crédits dédiés aux structures et à leurs professionnels seront utilisés à d'autres fins ! ».
Un « braquage » selon certains
Rappelons que la CNSA a été créée à l'origine, en 2005, pour développer une politique publique en faveur de l'aide à l'autonomie et leur inclusion sociale. Alors même que le projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement vient d'être voté, les parlementaires ont répété d'une même voix qu'il y avait des besoins très forts dans ce domaine et que la CNSA devait être en mesure d'assurer l'ensemble de ses missions, en particulier en matière d'investissements dans les établissements médico-sociaux. A ce titre, Christel Prado, présidente de l'Unapei, membre du collectif GR 31, n'hésite pas à parler de « braquage ». « Mais, cette fois-ci, pas de masque. J'avais voté contre en 2011. Nous avions été assez peu à le faire. Ça autorise visiblement la récidive ! ».
© Emmanuelle Dal'Secco