Nouvelle PCH, une avancée mais encore des points de discorde

Les 4 articles de la proposition de loi sur la Prestation de compensation du handicap, votés par l'Assemblée, ont été globalement plutôt bien accueillis mais quelques points, notamment concernant les fonds de compensation, font l'objet de critiques.

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Une future loi pourrait-elle faciliter le quotidien des 296 000 Français titulaires de la prestation de compensation du handicap (PCH) ? Cette dernière permet la prise en charge de certaines dépenses liées au handicap (aides humaines en majorité mais également techniques comme l'aménagement du logement ou du véhicule, les frais de transport) et représente un coût global de 1,9 milliard d'euros en 2018.

Le 15 janvier 2020, l'Assemblée nationale a voté la proposition de loi, portée par le sénateur Philippe Mouiller (Deux-Sèvres), visant à améliorer cette prestation, déjà approuvée à l'unanimité le 5 novembre 2019 par les sénateurs (article en lien ci-dessous). Un sujet jugé « majeur » par APF France handicap, qui se réjouit de ce vote, « une première depuis l'instauration de la PCH ». Quatre dispositions y figurent, répondant aux revendications des associations de longue date. En détail...

Articles 1, 3 et 4

• L'article 1er entend supprimer la limite d'âge, aujourd'hui fixée à 75 ans, au-delà de laquelle il n'est plus possible de demander la PCH -actuellement, les demandeurs doivent être âgés de moins de 60 ans mais, si le handicap a été reconnu avant cet âge, la limite est repoussée à 75 ans-. Cette mesure devrait permettre d'améliorer les droits d'environ 8 000 personnes handicapées vieillissantes. Pourtant, cette suppression n'est pas « suffisante » puisque la barrière d'âge de 60 ans, elle, existe toujours, déplore l'APF qui mène ce combat depuis des années. Evoquée par plusieurs députés, ces derniers ont jugé cette revendication « légitime ».   

• L'article 3 prévoit l'attribution à vie de la PCH dès lors que le handicap n'est pas susceptible d'évoluer favorablement. Le texte précise : « sans préjudice des révisions du plan personnalisé de compensation qu'appellent les besoins de la personne ». « Allons plus loin. Il est important que les personnes soient accompagnées dans la mise en œuvre de leurs plans d'aides plutôt que stigmatisées et traumatisées par des contrôles intrusifs et suspicieux », tempère Malika Boubekeur, conseillère nationale compensation/autonomie APF France handicap. 

• L'article 4 vise, quant à lui, la création d'un comité stratégique qui aura pour vocation de proposer des solutions nouvelles pour les modes de transport des personnes handicapées. Un travail spécifique concernant l'adaptation du droit à compensation du handicap pour les enfants sera mené par ce même comité.

Par ailleurs, le conseil départemental n'aura pas le droit de contrôler l'utilisation de la PCH sur une période de référence inférieure à six mois, permettant aux bénéficiaires de consommer leur aide humaine comme ils l'entendent, d'un mois sur l'autre. Par exemple, une personne disposant de 100 heures mensuelles pourra  n'utiliser que 80 heures en janvier et reporter son solde de 20 heures sur un autre mois, dans un délai de six mois maximum.

Article 2, discorde sur les fonds départementaux

Quant à l'article 2, il vise à concilier l'obligation de réduction du reste à charge des personnes en situation de handicap avec les ressources « disponibles » des fonds départementaux de compensation (FDC), afin d'harmoniser au mieux leurs modalités d'intervention. Mais jusqu'à quel point ? Rappelons que les FDC ont été créés en vue de financer les frais liés à la compensation des diverses situations de handicap afin que les bénéficiaires ne supportent pas un reste à charge supérieur à 10 % de leurs ressources nettes d'impôts. Mais, pour l'Association nationale pour l'intégration des personnes avec un handicap moteur(Anpihm), le compte n'y est pas car la menace vient du terme « disponibles ». Selon elle, cet article « vise à limiter demain cette possibilité à la seule capacité des financements de ces fonds départementaux ». Dans une lettre adressée le 13 janvier 2020 aux députés, elle les encourage « à rejeter cette proposition de loi déshonorante » au motif qu'elle « remet purement et simplement en cause le droit à compensation instauré par la loi du 11 février 2005 ».

Et de rappeler que le Conseil d'État, sur recours de l'Anpihm, a condamné l'État à deux reprises pour non publication par les gouvernements successifs depuis 15 ans du décret d'application concernant le financement et le fonctionnement des FDC, chaque conseil départemental étant alors libre « d'agir comme bon lui semble », en « négligeant les situations personnelles des ayants droits ». L'association appelle les députés « à légiférer pour assurer enfin un financement pérenne des frais essentiels ». Avis suivi par les députés de la France insoumise qui se sont abstenus lors du vote. De son côté, Malika Boubekeur a twitté en nom propre : « Le risque est que certains contributeurs limitent leurs abondements ! ».

Peut mieux faire…

Suite à ce vote, la plupart des réactions saluent une « avancée » mais « même s'il apporte sa pierre à l'édifice, ce texte ne réglera pas à lui seul toutes les difficultés auxquelles sont confrontées les personnes en situation de handicap », estime notamment Nathalie Elimas, députée du Val-d'Oise (MoDem), qui a porté ce texte devant les députés. APF France handicap réclame ainsi une « revalorisation des tarifs et des montants de la PCH, l'élargissement du périmètre de la prestation afin que toutes les aides (à la parentalité, à la communication, activités ménagères) y soient intégrées, ainsi que la suppression des restes à charge » et, in fine, des « dotations budgétaires pérennes, suffisantes et adaptées ». Une réforme plus globale de cette prestation semble donc nécessaire en termes de mesures de simplification et de garantie budgétaire. 

« Ce à quoi le parlementaire s'emploiera », promet Philippe Mouiller. Rappelons que l'amélioration des conditions d'octroi de la PCH fait partie des 5 grands chantiers de la Conférence nationale du handicap (CNH) qui sera clôturée le 11 février 2020, tout juste 15 ans après l'adoption de la loi handicap de 2005, par Emmanuel Macron à l'Élysée (article en lien ci-dessous). Les associations attendent donc de cette rencontre des « engagements forts ». Prochain rendez-vous également attendu, le projet de loi Grand âge et autonomie, APF France Handicap escomptant « des mesures concrètes pour permettre à toute personne d'obtenir des aides à l'autonomie intégralement financées et à la hauteur de ses besoins ».

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