Par Frédéric Bourigault
L'IPC plus strict que le Comité international olympique ! En suspendant la Russie pour l'exclure de facto des prochains jeux Paralympiques de Rio, le Comité international paralympique a franchi le pas que le CIO s'était refusé de faire pour Rio 2016.
Des médailles dénuées de toute morale
"Je pense que le gouvernement russe a catastrophiquement laissé tomber ses sportifs paralympiques. Leurs médailles dénuées de toute morale me dégoûtent". Rarement dirigeant sportif aura été aussi clair dans ses propos. Philip Craven, président de l'IPC, ne peut pourtant pas être accusé de manquer de diplomatie. Mais ses paroles et ses explications ont témoigné le 7 août 2016 du gouffre qui sépare la décision de l'IPC de celle prise par le CIO en début de mois, autorisant les sportifs russes à concourir aux JO de Rio sous conditions. "L'IPC et le CIO sont deux structures tout à fait différentes, et leurs fonctionnements sont différents", a tenté de justifier M. Craven. L'IPC sert également de fédération internationale pour de nombreux sports, ce qui n'est pas le cas du CIO qui gère uniquement des comités olympiques nationaux.
Le jour le plus sombre
"Le jour de la publication du rapport McLaren est pour moi le jour le plus sombre de l'histoire du sport. Durant les jours qui ont suivi, et de nombreuses nuits sans sommeil, nous avons essayé d'établir l'exactitude des faits afin que notre décision soit basée (sur les faits) et non placée sous l'influence de diverses organisations", a-t-il expliqué à Rio. Pas de Russie, donc, aux prochains jeux Paralympiques de Rio qui se tiendront du 7 au 18 septembre. "Notre décision a été basée sur le fait de savoir si la Russie pouvait respecter ses obligations vis à vis du code mondial antidopage. Et elle ne remplit pas les critères", a expliqué M. Craven.
Une bataille judiciaire
Une bataille judiciaire s'annonce néanmoins, puisque la Russie dispose de 21 jours pour faire appel de cette décision devant le Tribunal Arbitral du Sport de Lausanne (décentralisé à Rio pendant les JO). Elle sera toutefois bien plus claire que celle, multiple et protéiforme, qui se joue actuellement devant le TAS à la suite des contraintes imposées par le CIO aux sportifs valides. La colère russe s'annonce redoutable: "A mon sens, cela dépasse l'entendement. C'est une décision sans précédent. Je ne comprends pas sur quoi elle se base", a immédiatement réagi le ministre russe des Sports, Vitali Moutko. Et le président du comité paralympique russe, Vladimir Loukine a d'ores et déjà annoncé son intention de déposer une plainte auprès du TAS. "On va réagir de manière judiciaire, nous allons poursuivre le Comité international paralympique devant le TAS", a-t-il déclaré à l'agence de presse Interfax. Le déroulé des faits présenté par l'IPC est pourtant clair.
Un dopage organisé
Dans le rapport McLaren, dévoilé le 18 juillet 2016 et qui traitait du dopage organisé en Russie à l'occasion des Jeux olympiques de Sochi en 2014, figuraient également 35 échantillons de sportifs paralympiques ayant été trafiqués pour devenir négatifs. "Les équipes du professeur McLaren nous ont transmis les identités des 35 sportifs concernés. Il est apparu depuis que dix autres échantillons étaient concernés. En tout, et pour le moment seulement, il y a donc 45 échantillons échangés qui concernent 44 athlètes paralympiques" russes, a précisé le président de l'IPC. Devant "une telle tricherie, l'IPC a décidé de procéder à la réanalyse de l'ensemble des échantillons des sportifs paralympiques russes collectés dans le cadre des Jeux paralympiques de Sochi", a-t-il également ajouté. Pour le président de l'IPC, ces décisions devaient immanquablement être prises : "c'est très lourd à porter, mais nous le devions, pour le bien du mouvement paralympique. (...) J'ai la plus grande sympathie pour les sportifs russes qui vont rater les Jeux paralympiques de Rio (...) Tragiquement, il ne s'agit pas de sportifs qui se jouent d'un système, mais d'un système d'Etat qui triche avec les sportifs".