Opale 4 ans, handicapée, réclame son droit à l'école

Les parents d'Opale, atteinte d'amyotrophie spinale, se sont engagés depuis 2011 dans un long combat pour permettre à leur fille de 4 ans d'être scolarisée comme les autres enfants mais accumulent déboires et désillusions

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Par Grégory DANEL


"Nous ce qu'on veut, c'est qu'elle ait sa place."


Alexandra Lefrère est fatiguée. Rien de plus normal pour cette mère au foyer de 33 ans qui s'occupe de ses quatre enfants en bas âge, dont l'avant-dernière Opale, souffre d'une maladie neuromusculaire rare qui se caractérise par l'atrophie des muscles.

Mais ce qui dévore l'énergie de Mme Lefrère et de son mari, c'est l'impression de se battre contre des moulins à vent pour que sa fille puisse aller à l'école en milieu dit "normal" à Lisses, la commune où est installé leur petit pavillon de banlieue.

"Tout ce qu'on nous demande, on le fait", ajoute cette ex-factrice dont les propos illustrent le décalage entre les déclarations gouvernementales sur la scolarisation des élèves handicapés - "un droit fondamental" depuis 2005, selon le ministère de l'Education nationale qui chiffre à 227.000 le nombre des enfants handicapés scolarisés dans les 1er et 2nd degrés - et la réalité du terrain où parfois, la peur du handicap le dispute aux lenteurs bureaucratiques.

Scolarisée une première fois à la rentrée 2011, Opale qui ne peut se déplacer qu'en chaise roulante, engoncée dans un corset, a dû quitter l'école au bout d'un mois.
Au coeur du problème, la toux de la fillette dont les bronches s'encombrent facilement et qui doit être aidée pour tousser. Une simple pression au niveau de la cage thoracique suffit pour la soulager mais ce geste facilement réalisable par l'auxiliaire de vie scolaire (AVS) formée et recrutée par la famille est considéré comme un acte médical par l'école maternelle.

"Là, on est vraiment dans le médical et on est pas formé pour. Je suis enseignante, je ne suis pas infirmière", plaide la directrice.

Le dossier s'égare et il faut tout recommencer

"Je crains qu'on nous laisse un peu tomber, le jour où il se passe quelque chose", ajoute-t-elle, faisant état de son désarroi face au handicap de l'enfant.
Ce constat est infirmé par le père de la fillette, Jean-Christophe Lefrère, qui s'appuie sur les recommandations du Pr. Brigitte Estournet, responsable du pôle pédiatrique de l'hôpital Raymond-Poincaré, à Garches (Hauts-de-Seine):
"Ce sont des enfants fragiles souvent encombrés. Souvent l'hiver, ils ne sont pas scolarisés mais quand ils vont bien, il n'y a pas de problème".
"Ce sont des enfants très intelligents, qui s'intéressent, qui parlent bien. Ils adoptent des stratégies intellectuelles pour contourner leur handicap moteur", poursuit la médecin. "Mais", dit-elle, "il y a des craintes, des images qu'on se fait du handicap. Et en Ile-de-France, il y a des institutions spécialisées et l'Education nationale a tendance à se défausser" vers elles. "On se heurte à de la peur", relève Claire Couturier, coordinatrice de l'Association Française contre les Myopathies (AFM) qui accompagne la famille dans ses démarches.
"On nous a aussi reproché qu'Opale n'allait pas vers les autres, qu'elle ne peut pas être évaluée, etc.", se désole la maman.

Depuis un an, de réunions en commissions avec les personnels de l'Education nationale et les professionnels départementaux du handicap, les avis s'enchaînent sans cohérence, défavorables parfois, positifs souvent puis le dossier s'égare et il faut tout recommencer.

Une commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) devait à nouveau se réunir pour statuer sur le renouvellement de l'AVS attribuée à Opale et sa famille. Si l'avis devait être positif, plus rien ne devrait empêcher le retour de la fillette à l'école. Du moins, en théorie.
Chez elle, dans son fauteuil, Opale qui s'exprime très correctement, manie avec dextérité le joystick qui l'aide à colorier sur un écran d'ordinateur.

"Je ne peux pas lui dire qu'elle ne peut pas aller à l'école parce qu'elle n'a pas le droit. Elle est juste prisonnière de son corps", affirme la maman.

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