Une virée mère-fille au Cap Nord, au-delà du handicap

Durant l'été 2022, Frédérique et sa fille Camille, atteinte du syndrome Phelan-mcdermid, une maladie génétique rare, sont passées saluer le Père Noël en Finlande, avant d'atteindre le Cap Nord. Récit d'un road trip rafraîchissant d'un mois et demi.

• Par
Illustration article Une virée mère-fille au Cap Nord, au-delà du handicap

Alors que nombre de vacanciers cherchaient la chaleur réconfortante du soleil l'été dernier, ma fille et moi avons opté pour un road-trip en direction du Cap Nord. Son nom ? Cam'au Nord. A bord de notre petit camping-car acheté pour l'occasion, nous avons traversé l'Allemagne, le Danemark, la Suède puis la Finlande pour atteindre la célèbre falaise norvégienne de 307 mètres de haut, point le plus septentrional d'Europe. Pas de quoi donner le vertige à Camille, 25 ans, habituée des aventures hors normes. Le syndrome Phelan-mcdermid a bien essayé de compliquer ses plans, nos plans... En vain !

Une soif de découverte

Cette maladie génétique rare touche environ 3000 personnes dans le monde et 400 en France. Principalement causée par la perte de l'extrémité terminale du choromosome 22 survenant de novo -ce qui signifie qu'aucun des parents ne possède cette mutation dans son patrimoine génétique-, elle est associée à des troubles intellectuels, moteurs, neurologiques, du langage et parfois du spectre autistique. Pour autant, Camille aime partir, voyager, avec toujours une soif de découvrir autre chose que son environnement habituel. Durant un mois et demi, j'ai dû tout gérer seule, y compris les ennuis mécaniques. Un défi personnel source de dépassement de soi, de rencontres et d'une merveilleuse complicité mère-fille.

Première étape au village du Père Noël

Camille est à l'aise dans sa petite « maison roulante », même si cette nouvelle routine implique de solliciter mon aide plus qu'à l'accoutumée. Il lui faut plusieurs jours et des essais répétés pour maîtriser l'ouverture des placards et du frigo, l'utilisation de la douche mais aussi apprivoiser cet espace réduit et le rangement récurrent. Camille aime suivre notre progression sur la carte accrochée à la cloison et occupe son poste de copilote tous les matins avec un plaisir non dissimulé. Comme à la maison, elle raye chaque jour qui passe sur son calendrier afin de se repérer dans le temps et de prendre connaissance des explorations du lendemain. Les petits ports de pêche de la côte suédoise, avec leurs maisons rouges et leurs garages à bateau, sont un vrai régal pour les yeux. Rovaniemi (Finlande), la résidence du Père Noël, marque notre première étape emblématique. Après avoir franchi le cercle polaire arctique, nous nous acheminons vers la Laponie, territoire Sami. C'est peu après que nous observons nos premiers rennes, déambulant tranquillement sur la route. Camille mitraille à tout va cette nature sauvage.

Entre 2 visites, prendre le temps de rassurer

Douze jours après le départ, nous atteignons notre objectif, hautement symbolique. Après une séance photo devant le célèbre globe en fer forgé qui trône sur le Cap Nord depuis 1977 et un gros goûter pour nous réchauffer, nous poursuivons notre périple par l'ouest. Promenades et visites culturelles rythment nos journées le long des spectaculaires côtes norvégiennes. Camille adore les musées, particulièrement ceux consacrés aux Vikings. Entre deux virées, je peux compter sur elle pour assurer l'intendance du véhicule, et notamment les pleins d'eau, mais elle est vite inquiète lorsque je lève le capot pour vérifier le niveau d'huile ou si des bruits suspects s'échappent du moteur. Il faut prendre le temps de rassurer, d'expliquer, de montrer. Deux brefs arrêts au garage seront nécessaires pour régler quelques problèmes mineurs, les mécanos ayant certainement senti la pression d'une réparation rapide et efficace !

Le « fameux modèle norvégien »

Nous repassons la ligne du cercle polaire le 12 août 2022 sous huit petits degrés et continuons à descendre vers Oslo, capitale de la Norvège. Nous y rencontrons Torunn, dont le fils a la même anomalie génétique que Camille, et pourtant un parcours bien différent. Ole Herman n'a jamais mis les pieds dans un établissement spécialisé. Il était scolarisé dans la même école que ses frères et d'autres enfants « valides », et suivait ses cours avec l'aide d'un assistant. Il bénéficiait des mêmes matières et horaires que les autres élèves de sa classe. La Norvège est l'un des seuls pays où les élèves en situation de handicap sont accueillis à l'école ordinaire tout en recevant l'aide dont ils ont besoin. Ce fameux modèle norvégien, basé sur un système de compensation du handicap, a de quoi faire des envieux... Grâce à une formation spécifique, Ole peut aujourd'hui travailler dans un centre équestre. Il vit avec ses parents dans la maison familiale, qui deviendra un jour la sienne. Lorsque ses parents ne pourront plus l'aider, ses frères prendront le relais mais ils ne seront pas seuls, soutenus par un réseau d'aidants.

Après cette rencontre fort enrichissante, nous empruntons un gigantesque ferry qui nous ramène au Danemark. Quelques heures de répit pour Camille qui dort sans interruption durant toute la traversée. De retour à la maison, une seule question : « A quand notre prochaine escapade ? ».

Partager sur :
  • LinkedIn
  • Twitter
  • Facebook
"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr."

Thèmes :