Une pétition de l'Association des paralysés de France (APF), dénonçant une volonté du gouvernement de faire « main basse » sur les ressources des personnes handicapées, avait recueilli plus de 16 000 signatures le 28 octobre 2015, deux jours après son lancement. Les signataires protestent contre les nouveaux modes de calcul de l'Allocation adulte handicapé (AAH) et des aides personnalisées au logement (APL), proposées dans le projet de loi de finances (PLF) 2016. Ces mesures, si elles sont votées, « vont venir aggraver considérablement les conditions de vie déjà précaires de plusieurs centaines de milliers de citoyens en situation de handicap », dénonce la pétition « Stop à l'indécence » lancée sur change.org (en lien ci-dessous).
Les intérêts de l'épargne pris en compte
Le projet de budget prévoit de prendre en compte à partir de 2016 dans le calcul de l'AAH les intérêts non imposables des comptes d'épargne tels que le livret A, dans le cadre d'un processus d'harmonisation entre minima sociaux. Ceci réduirait le montant de l'AAH (actuellement 807 euros par mois au maximum) pour les bénéficiaires ayant de l'argent de côté, mais surtout leur ferait perdre des droits connexes qui ne sont ouverts qu'à ceux qui touchent l'AAH à taux plein (complément de ressources de 179 euros par mois, ou majoration pour la vie autonome de 105 euros mensuels), dénonce la pétition.
Une perte de 1 257 à 2 151 euros par an
L'APF a calculé que « pour quelques dizaines d'euros » tirés des intérêts de leurs livrets d'épargne (205 euros par an maximum sur un livret A), ces personnes perdraient « 1 257 à 2 151 euros par an » de ressources. 210 000 personnes perçoivent actuellement l'un ou l'autre de ces compléments de ressources, sur un total d'un million de bénéficiaires de l'AAH, selon l'association. Ce projet a également été dénoncé par le comité d'entente des associations représentatives de personnes handicapées (Fnath, Unapei, Apajh ...), qui estime que « pour des économies de bout de chandelle, l'Etat est prêt à grever les ressources déjà faibles des plus vulnérables ».
La réponse de la ministre
Interrogée en commission élargie à l'Assemblée nationale, la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, Ségolène Neuville, a assuré que « l'objectif n'est pas de pénaliser une personne qui aurait quelques centaines d'euros sur son livret A ». Elle a annoncé sa volonté se « lisser les effets de seuil » car « un allocataire de l'AAH ne devra pas, pour quelques euros de revenus du patrimoine, perdre un complément de l'AAH ». « Cette réponse est trop floue, elle n'est pas de nature à nous rassurer », a réagi Véronique Bustreel, conseillère nationale chargée du dossier à l'APF, interrogée par l'AFP. « Nous demandons toujours le retrait de ce projet ». Mme Neuville a par ailleurs précisé que « les contrats d'épargne handicap ne sont pas concernés ».
2e mesure : une APL dégressive
La seconde mesure contestée par la pétition est la réforme des APL, qui prévoit de prendre en compte le patrimoine de la personne dans le calcul de l'aide, et de déterminer un loyer plafond à partir duquel l'APL sera dégressive. Cette mesure « frappe indistinctement l'ensemble des bénéficiaires », regrette l'APF, alors que les personnes handicapées doivent souvent se rabattre sur un logement plus coûteux, leur choix étant limité par les contraintes d'accessibilité.