« Parcours du combattant », « méandres administratifs », « labyrinthe »… les expressions sont nombreuses pour décrire ce que vivent les personnes handicapées pour accéder à leurs droits.
50 répondent à l'appel
C'est fort de ce constat que le gouvernement a confié, en novembre 2017 (article en lien ci-dessous), au député LREM des Hauts-de-Seine, Adrien Taquet, et à Jean-François Serres, conseiller du CESE (Conseil économique, social et environnemental) une mission de simplification administrative dans le domaine du handicap. Pour nourrir leur rapport, ils ont eu l'idée suivante : convier les députés à se rendre en masse dans la MDPH (Maison départementale des personnes handicapées) de leur département. Sur 576 élus sollicités, 50 ont répondu à l'appel, issus de toutes les formations politiques à l'exception du Front national et de la France insoumise.
Une « Semaine MDPH »
Lors de cette « Semaine MDPH », du 2 au 9 mars, ils ont donc tout loisir, certains pour la première fois, de découvrir le fonctionnement de ces maisons, du côté des usagers comme des professionnels, et d'en appréhender, souvent, la complexité. La synthèse de leurs contributions sera remise fin mars à l'Assemblée nationale puis annexée au rapport final qui devrait rendre ses conclusions fin avril 2018. Le point sur cette initiative inédite avec Adrien Taquet…
Handicap.fr : Pourquoi cette démarche ?
AT : Parce qu'il y a, manifestement, de grandes disparités de traitement d'un département à l'autre, avec des inégalités sur tout le territoire. Il nous semblait donc intéressant, parce que nous n'avions pas la possibilité de faire un tour de France des MDPH, de mettre les députés à contribution pour avoir des retours concrets.
H.fr : Le but étant aussi de les sensibiliser à un domaine qu'ils ne connaissent pas toujours ?
AT : Je ne vais pas vous cacher que près de la moitié d'entre eux n'avaient jamais mis les pieds dans une MDPH…
H.fr : Cela fait pourtant partie de leurs attributions ?
AT : Oui mais la plupart sont députés pour la première fois et n'avaient donc jamais eu, à titre personnel, l'occasion de le faire, même s'ils sont nombreux à se dire sensibles à la question du handicap. L'objectif était aussi de les interpeller sur ce sujet puisque un volet handicap doit être prévu dans chaque loi qu'ils seront amenés à voter.
H.fr : Mais, 50 députés, cela signifie seulement 50 MDPH visitées ? C'était un peu au hasard ?
AT : Le choix des MDPH s'est en effet fait selon la circonscription des députés qui ont accepté de prendre part à cette journée mais aussi de l'accord des Conseils départementaux pour ouvrir leurs portes.
H.fr : Certains ont refusé ?
AT : Non, globalement il n'y a pas eu de réticences. Il a juste fallu passer deux ou trois coups de fils à des présidents de départements. Mais, de toute façon, les MDPH sont des GIP (Groupements d'intérêt public) dans lesquels siègent les instances de l'État, et les députés ont donc le droit de s'y rendre.
H.fr : Et vous, vous y étiez ?
AT : Oui, bien sûr, le 5 mars dans celle de Paris avec Jean-François Serres et le député Stanislas Guerini.
H.fr : Vous aviez préparé vos collègues à cette « immersion » ?
AT : Oui, à travers un petit guide. L'objectif étant de suivre le parcours d'un usager mais aussi d'un « dossier » pour savoir comment ça se passe dans le back office et comment est gérée la question des délais.
H.fr : Quelles sont leurs premières impressions ?
AT : Nous n'avons pas encore tous les retours, nous leur laissons jusqu'à la fin de la semaine prochaine pour faire remonter leurs contributions. Mais certains se sont rendu compte de la complexité des démarches, à commencer par les nombreux acronymes : AAH, PCH, MDPH, AEEH…
H.fr : Quel est l'objectif final de cette initiative ?
AT : Repérer les modes de fonctionnement et rassembler les observations, et surtout les bonnes pratiques, puis en faire une synthèse afin de nourrir la réflexion de notre mission qui sera rendue publique fin avril 2018. Ce que l'on constate, c'est que la question du handicap est assez transpartisane à l'Assemblée, même si tous ne sont pas d'accord sur certains sujets, même s'ils n'ont pas tous le même niveau de connaissance. Mais mobiliser 50 députés sur une telle opération, c'est déjà un bon signe. Cette sensibilisation politique a donné une résonnance forte à notre mission.
H.fr : Avez-vous prévu une action similaire avec les sénateurs ?
AT : Non, ce n'est pas de mon ressort mais je ne doute pas qu'ils se mobilisent aussi dans ce domaine.