Vincent Peillon: "Le handicap, pas une politique à part !"

A quelques jours de la primaire de gauche, Vincent Peillon dévoile les actions qu'il souhaite mener en faveur des personnes handicapées. L'ancien ministre de l'Education nationale souhaite, entre autres, consolider l'école inclusive.

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En vue des élections présidentielles de 2017, handicap.fr souhaite donner la parole à tous les candidats aux primaires des grands partis, puis aux candidats déclarés, sur leur politique handicap. Nous avons donc soumis le même questionnaire, par écrit, aux 7 candidats de la primaire de gauche, qui aura lieu les 22 et 29 janvier 2017 (comme ce fut le cas en novembre 2016 lors de celle de la droite et du centre), et publions les réponses telles qu'elles nous parviennent… Ou pas ! (en lien ci-dessous)

Handicap.fr : Contrairement aux élections précédentes, plusieurs candidats aux prochaines présidentielles semblent vouloir davantage s'exprimer sur la question du handicap. Certains politiques auraient-ils pris conscience que 10% de la population, c'est un électorat qu'on ne peut pas se permettre de négliger ?
Vincent Peillon : Les handicaps et leurs conséquences s'imposent à nous et aux politiques publiques que nous avons à définir. Il est donc de ma responsabilité de développer ma vision et les objectifs en la matière, tout en invitant à s'intéresser à l'ensemble du projet que je propose.

H.fr : Dans cette primaire, qu'est-ce qui vous distingue des autres candidats de gauche sur la question du handicap ?
VP : J'ai eu l'honneur d'être ministre de l'Éducation nationale pendant deux ans et de porter le vaste projet de Refondation de l'école de la République. L'école inclusive en était un des principaux objectifs, et j'ai porté, avec Marie-Arlette Carlotti, la réforme de l'accompagnement des élèves handicapés ; nous avons permis aux auxiliaires de vie scolaire d'accéder progressivement à un contrat à durée indéterminée et avons créé un diplôme d'État d'Accompagnant éducatif et social. J'ai donc contribué à rouvrir ce chantier prioritaire abandonné par les gouvernements de droite. Ma contribution, avec George Pau-Langevin, qui était ministre déléguée à la Réussite éducative, au premier Comité interministériel du handicap de septembre 2013 m'a conforté dans l'idée que « le handicap » ne devait pas se résumer à une politique à part mais bel et bien intégrer notre projet de société de manière transversale. C'est ainsi que j'ai pu afficher mes priorités en la matière dès la présentation de mon programme.

H.fr : Quelle serait votre mesure phare en matière de handicap si vous accédiez au pouvoir ?
VP : La politique « du handicap » ne pouvant se résumer à une seule mesure, c'est d'abord une vision que je propose et un projet global que je souhaite mettre en œuvre. Tant que nous ne parviendrons pas à faire de l'accessibilité, quelles que soient ses formes, la règle de toutes nos politiques publiques, nous ne progresserons pas. Aussi, dans le cadre du développement du gouvernement ouvert et des consultations citoyennes sur les avant-projets de loi, je rendrai systématique la concertation sur le volet handicap, lequel ne doit pas se limiter à l'impact du projet de loi sur les seules personnes handicapées mais s'étendre à l'opportunité de cette loi pour y intégrer des mesures nécessaires d'accessibilité. Je souhaite également généraliser l'installation d'une instance dans chaque région et chaque département dédiée à l'expression directe des personnes handicapées et leur participation à l'élaboration des schémas départementaux ainsi qu'aux décisions les concernant.

H.fr : Faut-il réellement jeter la pierre au gouvernement de Manuel Valls, comme l'a fait si souvent l'opposition durant 5 ans, en matière d'accessibilité des lieux publics quand il hérite d'une situation qui a pris du retard sous d'autres majorités que la sienne ?
VP : Face à l'inertie de la droite qui s'était contentée de fixer dans la loi de 2005 un délai de 10 ans pour la mise en accessibilité des ERP et des transports, sans accompagner ni contrôler la montée en charge des travaux, nous avons dû, dès 2013, avec le gouvernement de Jean-Marc Ayrault, faire partager le constat que la France ne serait pas au rendez-vous de 2015. Plutôt que de renoncer aux objectifs d'accessibilité de la loi, nous avons choisi d'aménager cette échéance en permettant aux acteurs publics et privés, en signant un Agenda d'accessibilité programmée (Ad'AP), de s'engager à réaliser leurs travaux. Au 1er décembre 2016, près de 200 000 agendas avaient été signés ; le résultat est encore loin du compte. Il est donc de notre responsabilité collective de mener à bien cette réforme et de nous assurer que tous les acteurs visés restent mobilisés. Au-delà des seuls lieux publics, c'est le développement d'ensemble des formes d'accessibilité que je souhaite accompagner pour que nous puissions atteindre le cap de la conception universelle, qui impliquera d'intégrer les différents handicaps dès la conception des produits et des services.

H.fr : Parce que l'école est le nerf de la guerre en termes d'inclusion, « une » mesure phare pour la scolarité des enfants handicapés ?
VP : Je poursuivrai naturellement la réforme de l'accompagnement que j'ai engagée lorsque j'étais ministre de l'Éducation nationale en m'assurant que chaque élève bénéficie du nombre d'heures nécessaire. La réussite scolaire des élèves handicapés et leur épanouissement ne dépend pas du seul cadre de l'école. C'est pourquoi je permettrai le prolongement de cet accompagnement dans le cadre des activités périscolaires. Et parce qu'en la matière, la coopération des Institutions avec les parents, trop souvent laissés seuls face à la découverte du handicap de leur enfant, est fondamentale, je développerai des formations et un accompagnement à leur intention. Je ferai également de l'accessibilité de l'enseignement supérieur un des chantiers prioritaires du quinquennat pour que la France devienne une référence en la matière.

H.fr : Parce que le chômage des personnes handicapées est deux fois supérieur à la moyenne nationale, quelle serait votre mesure prioritaire ?
VP : Là encore, la question de l'emploi ne peut être dissociée des autres sujets : l'accessibilité, notamment des lieux de travail, l'accès à la formation, ainsi que les ressources des personnes handicapées. Outre la priorité que j'accorde à l'accessibilité de l'enseignement supérieur, nous aurons à anticiper sur l'épuisement des fonds dédiés à l'insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph et Fiphfp) pour maintenir les aides nécessaires aux employeurs publics et privés en concertation avec les parties prenantes (associations, employeurs, organisations syndicales).

H.fr : Contrairement aux candidats américains qui n'ont pas brillé par l'accessibilité de leur campagne, comptez-vous faire un effort dans ce sens, par exemple vélotypie lors des conférences, sites internet aux normes, accessibilité des meetings, pour que les personnes handicapées puissent elles aussi prendre part au débat démocratique ?
VP : Il est évident qu'il y a des millions de citoyens à prendre en compte pour qu'ils puissent participer pleinement au débat démocratique, faire leur choix et aller voter. Il est donc de la responsabilité de chaque candidat de mener une campagne la plus accessible possible à tous les électeurs, quels que soient leurs éventuels handicaps. Ce sont d'abord l'ensemble de mes propositions et prises de position qui devront être formulées pour être comprises de tous les publics, quels que soient les niveaux de compréhension ou d'aisance face à l'écrit. La conférence de presse de présentation de mon projet était ainsi interprétée en direct en langue des signes française. Il ne s'agit donc pas pour moi de « faire un effort dans ce sens » mais bien de placer l'accessibilité au cœur de l'organisation de ma campagne, au bénéfice de tout le monde.

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"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Emmanuelle Dal'Secco, journaliste Handicap.fr"
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