Etudiant, refoulé d'une école à cause de son handicap

Tom, 22 ans, veut intégrer une école de journalisme mais son handicap et la présence d'un fauteuil roulant lui en ferment les portes. En quelques heures, le buzz a permis de trouver une solution mais pas de résoudre le problème de fond.

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« Votre candidature a retenu toute notre attention. Néanmoins, les locaux de l'école comportent de nombreux escaliers, y compris l'accès de la rue, cela risque d'être très compliqué et difficile pour vous. » Compliqué en effet pour Tom, étudiant en journalisme de 22 ans puisqu'il se déplace avec des béquilles ou en fauteuil roulant. Cette réponse, il l'a reçue par mail de l'Ecole supérieure de journalisme (ESJ) de Paris, le 12 mars 2018. Son père, Thierry Rousset, s'est aussitôt empressé de la partager sur les réseaux sociaux, interpellant notre confrère spécialiste du handicap Vivre FM. Il accompagne son alerte du texte suivant : « Mon fils a un projet professionnel depuis toujours : devenir journaliste sportif. Et il est doué pour ça. Il est incollable sur la NBA, les JO, il connait aussi très bien la boxe, il est bilingue... Bref, je ne dis pas ça parce que c'est mon fils, mais il est brillant. » Tom a en effet obtenu une licence d'anglais dans la prestigieuse université de Berkeley, en Californie.

Le handicap mentionné

Après un entretien téléphonique qui, selon son père, « s'est bien déroulé », et dans lequel le handicap de son fils a été explicitement mentionné, le jeune homme se voit donc notifier l'impossibilité pour cette école de le « recevoir lors la prochaine rentrée ». Pourtant Tom affirme qu'avec de l'aide il peut tout à fait monter les escaliers. En quelques heures, l'affaire fait le buzz et d'autres medias s'en emparent : Le Figaro, l'Obs ou LCI. Le cas de Tom n'est malheureusement pas une exception ; en octobre 2016, déjà, l'affaire Amélie, une lycéenne handicapée, avait agité les réseaux sociaux (article en lien ci-dessous). Estimant qu'il n'avait pas la capacité de recevoir des élèves en fauteuil dans ses murs, son lycée lui proposait un transfert dans un établissement plus adapté où elle serait contrainte de suivre… un autre cursus ! La grève menée par ses camarades avait permis de trouver une solution. Ce qui est plus étonnant dans le cas de Tom, c'est la réponse écrite et décomplexée de cette école, noir sur blanc.

Des locaux inaccessibles

Recaler un élève à cause de son handicap est un acte de discrimination passible de sanctions. Le compte Twitter du Défenseur des droits a d'ailleurs encouragé Thierry Rousset à le saisirContactée par d'autres medias et face à l'ampleur de la mobilisation, l'ESJ indique qu'elle va, finalement, « tout faire pour recevoir » Tom. « Nous regrettons amèrement cette situation, nous passons à côté de profils brillants, répond sa direction à LCI. On va l'appeler, voir ce qui est possible et tout faire pour le recevoir. Si son handicap est compatible avec les locaux, on sera ravis de l'accueillir. » Il y aurait, selon elle, des difficultés à rendre le bâtiment accessible. « Nous avons réalisé des études pour rendre nos locaux accessibles aux personnes à mobilité réduite. Mais nous avons dû mettre fin au projet car les architectes n'ont pas trouvé de solutions. Nous en avons contacté d'autres ; s'ils peuvent mettre le bâtiment aux normes, nous resterons dans nos locaux, sinon, nous déménagerons. »

Une solution trouvée

Le 16 mars dans l'après-midi, Thierry Rousset publie un tweet laconique : « On a trouvé une solution. Merci à tous. Plus la peine de relayer l'info. » Sans plus de précision. Cette solution on la doit à Sophie Cluzel, secrétaire d'Etat au handicap qui, depuis le site des Jeux paralympiques en Corée, s'est mobilisée. Selon Yanis Bacha, membre de son cabinet, qui connait bien le problème puisqu'il est lui-même issu d'une école de journalisme et en situation de handicap, une autre école a été trouvée dans laquelle Tom pourrait être admis sous réserve qu'il réussisse son concours d'entrée.

Un problème de fond

Un dépannage qui ne résout pourtant pas le problème de fond. « Comment, 13 ans après la loi de 2005, peut-on encore faire des réponses pareilles ?, s'indigne Nicolas Mérille, conseiller accessibilité de l'APF (Association des paralysés de France). On peut toujours trouver des solutions intermédiaires, comme aménager le rez-de-chaussée. Le contenu du mail est très maladroit sur la forme, voire sidérant, et c'est vraiment méconnaître leur responsabilité en matière d'accessibilité ». Et de citer un arrêt récent de la Cour européenne des droits de l'Homme qui, dans une situation similaire, vient de condamner l'Etat bulgare sur la base de la Convention internationale des droits des personnes handicapées. 

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"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Emmanuelle Dal'Secco, journaliste Handicap.fr"
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