Chasse et handicap : une même cible !

La chasse est réouverte dans toute la France depuis le 26 septembre. Mais est-ce une pratique de plein air compatible avec une situation de handicap ? Réponses de Françoise Peschadour, directrice adjointe de la Fédération nationale des chasseurs.

• Par

Handicap.fr : A-t-on une estimation du nombre de chasseurs en situation de handicap en France ?
Françoise Peschadour
: Non. Sur 1 350 000 pratiquants, nous ne disposons pas de statistiques permettant ce repérage précis.

H
: Que doivent faire les postulants handicapés qui souhaitent passer leur permis de chasse ?
FP
: L'exercice de la chasse en France est soumis à un examen national, conditionné par un contrôle préalable d'aptitude physique et psychique. Un certificat médical délivré par le médecin traitant du candidat doit obligatoirement figurer dans le dossier d'inscription. Il vérifie notamment les points suivants :
- Infirmité ou mutilation ne laissant pas la possibilité d'une action de tir à tout moment précise et sûre
- Affection entraînant des troubles moteurs, sensitifs ou psychiques, perturbant la vigilance, l'équilibre, la coordination des mouvements ou le comportement
- Affection entraînant ou risquant d'entraîner un déficit visuel ou auditif susceptible de compromettre ou de limiter les possibilités d'appréciation de l'objectif du tir et de son environnement.

H
: Le handicap n'est donc pas un facteur systématique d'exclusion ?
FP
: Non, bien sûr. Les candidats dont le handicap n'a pas pour effet de « rendre dangereuse la pratique de la chasse » peuvent s'inscrire à l'examen et reçoivent une formation adaptée, leur certificat médical mentionnant le type d'incapacité. Cette évolution a été réalisée à la demande des institutions responsables du permis de chasser. Le législateur a fait évoluer les textes en conséquence. Ces modifications ont permis d'une part, d'adapter l'épreuve pratique de l'examen, d'autre part de faciliter l'action de chasse.

H
: Et qu'en est-il des chasseurs qui ont un handicap sensoriel ou mental ?
FP
: Les déficiences sensorielles qui ne peuvent être corrigées par le port de lunettes ou d'appareils auditifs ne permettent pas la pratique de la chasse. D'une manière plus générale, le handicap mental, ou toute affection médicale ou infirmité susceptibles de rendre la pratique de la chasse dangereuse, font l'objet de la même interdiction (art. L 423-15-6° CE). La sécurité à la chasse est une préoccupation permanente car elle ne doit jamais être dangereuse pour le chasseur et pour les usagers, quels qu'ils soient.

H
: Quels sont les « privilèges » accordés aux chasseurs ayant un handicap moteur ?
FP
: Concernant la formation et l'épreuve pratique de l'examen, depuis 2003, une adaptation permet aux personnes circulant en fauteuil d'être dispensées de l'un des ateliers (franchissement de clôture et passage de fossé), de disposer de temps complémentaire, de pouvoir se faire accompagner pour l'aide au déplacement sur le parcours et d'avoir à disposition un matériel adapté. De même, pour les personnes présentant un handicap des membres inférieurs ou supérieurs, une arme adaptée est prévue. En action de chasse, la législation a évolué pour leur permettre de se déplacer en véhicule pour se rendre à leur poste de chasse et de tirer depuis leur véhicule après avoir mis le moteur à l'arrêt .

H
: Les « valides » ne voient-ils pas d'un mauvais œil la présence de chasseurs handicapés ?
FP
: La communauté des chasseurs se caractérise par une grande convivialité, les équipes de chasse ne laissent pas au bord de la route ceux qui sont touchés par une difficulté. Les adaptations de l'examen en sont un des reflets. La vocation de notre loisir est de demeurer populaire et accessible à tous. La lutte contre l'exclusion fait partie de nos obligations statutaires mais, surtout, des valeurs que nous portons.

H
: Avez-vous prévu de rendre tous vos sites accessibles comme le prévoit la loi en 2015 ?
FP
: Les lieux de chasse, dans la mesure du possible, sont adaptés à la prise en compte du handicap, moteur en particulier, et certaines huttes de chasse au gibier d'eau ont fait l'objet d'aménagements spécifiques. Selon le mode de chasse et le handicap, les réponses varient : aménagement de la palombière ou de la hutte, circulation jusqu'au poste fixe de tir, choix des emplacements... L'action de chasse ne se résumant pas qu'au tir, il y a de multiples façons de rester au sein d'une équipe, même si l'usage de l'arme ou la traque n'est plus possible. Quant aux sièges des Fédérations des Chasseurs, ils ont procédé, au fur et à mesure de leurs évolutions, aux aménagements nécessaires pour faciliter la circulation des personnes à mobilité réduite.

H
: Travaillez-vous en partenariat avec des associations de personnes handicapés sur cet engagement ?
FP
: Nos fédérations travaillent, pour une quinzaine d'entre elles, avec des Instituts médico-éducatifs et construisent des programmes pour permettre une meilleure connaissance de notre patrimoine naturel et de sa biodiversité. Nous envisageons de soumettre à nos tutelles la possibilité d'ouvrir plus largement la chasse aux personnes handicapées, notamment en matière de chasse accompagnée. Jusqu'à présent limitée à 1 année, cette dernière pourrait évoluer vers une formule de permis accompagné dans lequel un binôme, formé avec un accompagnement « chasseur », garantirait des conditions de pratique sécurisées. Nous travaillerons sur ce sujet en partenariat avec des associations de personnes handicapées qui participeront à la définition des règles.

Partager sur :
  • LinkedIn
  • Twitter
  • Facebook
Commentaires9 Réagissez à cet article

Thèmes :

Handicap.fr vous suggère aussi...
9 commentaires

Rappel :

  • Merci de bien vouloir éviter les messages diffamatoires, insultants, tendancieux...
  • Pour les questions personnelles générales, prenez contact avec nos assistants
  • Avant d'être affiché, votre message devra être validé via un mail que vous recevrez.