Salaire brut, net, imposable, payé… Sur une fiche de paye, il y a de quoi s'y perdre ! Avec parfois de gros écarts sur les montants. Dans ce contexte complexe, une question est souvent posée par les allocataires de l'Aah (allocation adulte handicapé) au moment de faire leur déclaration de ressources auprès de la Caf (caisse d'allocations familiales) : faut-il déclarer le revenu net imposable ou le revenu net à payer dans la case « salaires » ?
Un doute récurrent
« Ce n'est pas clair », assure Kris Moutoussamy, avocat associé au sein du cabinet DBKM avocats et secrétaire général de l'Association nationale des avocats et des praticiens en droit des prestations sociales (Anapps), qui a fait des litiges avec les Caf son cheval de bataille. Selon lui, cette problématique est « récurrente ». « La réponse logique serait de retenir le revenu net imposable » mais il dit constater que c'est « trop souvent au bon vouloir de chaque caisse ».
Nous avons donc posé la question à Esther Tricoit, directrice du département production, à la direction du réseau de la Cnaf (Caisse nationale des allocations familiales), qui confirme que c'est bien le « revenu net imposable qui doit être déclaré ». Selon elle, la confusion vient du fait que, pour les bénéficiaires de l'AAH ayant une activité professionnelle qui sollicitent également la prime d'activité, c'est, cette fois-ci le salaire net à payer qui doit être indiqué. Donc pour résumer : salaire imposable pour l'AAH et salaire net perçu pour la prime d'activité ! Ils doivent donc, à ce titre, remplir deux déclarations de ressources distinctes.
Une situation trop complexe
Pour mettre un terme à cette situation complexe, Esther Tricoit assure que la Cnaf souhaite « simplifier les bases ressources » et est en train de travailler pour « aller, avec le consentement des allocataires», récupérer directement à la source les revenus sur le DRM (dispositif de ressources mutualisé), un agrégat de ce qui a été mis en place au niveau de la DSN (déclaration sociale nominative). « Notre souhait est de sortir du modèle déclaratif qui génère de nombreuses erreurs, alors que les gens sont souvent de bonne foi, poursuit-elle. Même si on a coutume de dire 'Nul n'est censé ignorer la loi', il est parfois difficile de comprendre des dispositifs très complexes ».
Des procédures évitables
Kris Moutoussamy confirme que la Cnaf n'a pas « pris la mesure de cette difficulté qui génère des indus et des procédures qui pourraient être évités ». Son cabinet, auditionné par la mission d'inspection des juridictions administratives au Conseil d'Etat, a pu faire part du manque d'information à ce sujet. Pourtant, sa demande de rendez-vous avec les directeurs des caisses de sa région est restée lettre morte. Son cabinet se voit donc « contraint d'en passer par des procédures contentieuses ». Selon cet avocat, les « contestations se terminent souvent par des dommages et intérêts versés par les Caf qui n'ont pas suffisamment informé leurs allocataires. Mais c'est très variable d'un juge à l'autre ».
Quelles différences ?
Tous ces montants sont indiqués en bas de la fiche de paye. Mais quelles différences entre chacun ?
• Le salaire net à payer. Il représente le salaire après déduction de toutes les cotisations sociales obligatoires, de tous les prélèvements sociaux, dont la CSG (contribution sociale généralisée) et la CRDS (contribution au remboursement de la dette sociale) et de la quote-part due par le salarié sur ses titres restaurant ou sa complémentaire santé d'entreprise.
Salaire net à payer = Salaire brut - cotisations salariales
• Le salaire net imposable. On parle aussi de salaire net fiscal. Base de l'impôt sur le revenu, il peut différer du salaire net à payer parce que toutes les cotisations sociales, à la charge du salarié, ne sont pas déductibles pour le calcul de l'impôt.
Salaire net imposable = salaire net à payer avant IR (impôt sur le revenu) prélevé à la source + CSG/CRDS non déductible de l'impôt sur le revenu + part patronale de la mutuelle santé + part salariale de la mutuelle santé facultative (option) + IJSS (indemnités journalières de Sécurité sociale) + retenues (tickets restaurant, avantages en nature, etc.) - indemnités (pass transport, notes de frais, etc.) - heures supplémentaires défiscalisées (La rémunération au titre des heures supplémentaires ou complémentaires éligibles est exonérée d'impôt sur le revenu dans la limite de 5 358 euros bruts par an et par salarié).
Le salaire à prendre en compte pour l'assiette à l'impôt sur le revenu est donc plus élevé que le salaire net réellement perçu.
• Le salaire net payé. Depuis janvier 2019, suite à l'entrée en vigueur du prélèvement à la source (PAS) de l'impôt, le bulletin de paye d'un salarié s'est enrichi d'autres lignes. Le salaire net payé est le montant effectivement perçu, après que le prélèvement à la source a été effectué par l'employeur pour le compte de l'Etat.
Salaire net payé = Salaire net à payer - (salaire net imposable x taux PAS) + remboursement transport éventuellement.