« Dépêchez-vous d'être aveugle ! », en tout cas avant 60 ans. Ce slogan provoc de la Fédération des aveugles et amblyopes de France (FAAF) tente de mettre en lumière une « aberration » que dénoncent la plupart des associations de personnes handicapées depuis des années. Treize ans exactement. En 2005, l'article 13 de la loi handicap promettait la fin des barrières d'âge dans les cinq années suivant sa promulgation. Depuis, rien !
Agé ou handicapé ?
A soixante ans, on n'est plus handicapé mais âgé ! On explique : si le handicap survient avant 60 ans, il reste dans le champ du « handicap » avec tous les avantages en termes de compensation qui entrent dans le cadre de la PCH (prestation de compensation du handicap). S'il survient après 60 ans, la personne est automatiquement basculée dans le dispositif destiné aux personnes âgées (Allocation personnalisée pour l'autonomie). Or ce dernier ne prévoit pas la prise en compte de certaines aides. Vincent Michel, président de la FAAF, donne deux exemples dans le champ du handicap visuel : « L'APA ne prend pas en charge les cours de réadaptation à la locomotion, c'est-à-dire apprendre à circuler lorsqu'on devient aveugle. Ni les aides techniques pour accéder aux outils informatiques et numériques ».
13 roses rouges au Premier ministre
« Cette situation est inacceptable, poursuit-il. Il est grand temps de respecter la volonté du législateur. Rien ne sert de faire des promesses, de promulguer des lois, si celles-ci restent lettre morte, inappliquées ». Reprenant les préoccupations de l'ensemble du monde associatif, cette fédération lance sa campagne à une date symbolique : article 13, 13 ans après la loi, le 13 février 2018. Pour marquer le coup, elle a fait livrer 13 roses rouges au Premier ministre et à la ministre de la Santé, Agnès Buzyn. Sans réponse à ce jour. Pour sensibiliser les parlementaires, la FAAC a également fait parvenir à tous les députés et sénateurs un exemplaire de son calendrier 2018 « Yes you canne » qui égratigne avec humour les personnalités publiques (article en lien ci-dessous). Plus de 900 copies !
Et à 75 ans ?
« La bataille ne fait que commencer », insiste le président de la FAAF, espérant également le « soutien de l'opinion publique ». Selon lui, « avec la DMLA (maladie dégénérative qui conduit à la cécité) qui fait des ravages, cette barrière d'âge pour les personnes aveugles devient un vrai sujet de préoccupation. » Faudrait-il la supprimer ou la repousser, par exemple à 75 ans comme suggéré par certaines associations ? « A 75 ans, entre vous et moi, ce n'est pas ridicule. On ne veut pas forcément être jusqu'auboutiste mais exigeons qu'on en parle ! », conclut Vincent Michel.
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