Accessibilité numérique : place aux sanctions?

Du mieux pour l'accessibilité du numérique et de la téléphonie, selon 2 ordonnances prises en Conseil des ministres le 6 septembre 2023. On passe aux sanctions. Jusqu'à 50 000 euros d'amende en cas de non-respect de l'accessibilité des sites publics...

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La vitesse supérieure pour l'accessibilité, à la fois celle des sites web des administrations publiques mais aussi de la téléphonie pour les personnes malentendantes ? C'est l'annonce, via deux mesures, faite par le gouvernement le 6 septembre 2023 en Conseil des ministres.

L'accessibilité des sites publics

Demande d'aide jurictionnelle, de certificat Crit'air ou accès aux offres publiques d'emploi... plus de la moitié des démarches en ligne les plus utilisées sont aujourd'hui accessibles, contre 12 % en 2020. Seulement la moitié ? Il y a donc urgence à agir. Le gouvernement présente une première ordonnance visant à contrôler l'accessibilité des sites publics à compter de 2024, en « renforçant les sanctions des manquements aux obligations d'accessibilité des services de communication au public en ligne ». Ce dossier est porté par Stanislas Guerini, ministre de la Transformation et de la Fonction publiques.

3 nouveautés !

Cette ordonnance introduit trois nouveautés :
• En ce qui concerne l'accessibilité des sites, déjà rendue obligatoire depuis la loi de 2005, le non-respect de cette exigence est maintenant passible de sanctions, dont le montant maximal est fixé à 50 000 euros.

• L'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) est désormais compétente pour identifier et constater les manquements, en s'appuyant notamment sur des méthodes de collecte automatisée, mais aussi émettre des injonctions préalables aux sanctions.

• Si un manquement sanctionné persiste plus de six mois après l'imposition de la sanction initiale, une nouvelle sanction peut être imposée (contre un an auparavant).

Des obligations inchangées

Certains impératifs restent inchangés : les obligations complémentaires, qui incluent la publication d'une déclaration d'accessibilité, l'élaboration et la publication d'un schéma pluriannuel (sur trois ans) de mise en accessibilité décliné en plans d'actions annuels, la publication du plan d'action de l'année en cours, l'indication sur la page d'accueil si le site est conforme ou non et la possibilité pour les utilisateurs de signaler facilement les manquements à l'accessibilité. Le non-respect des obligations complémentaires demeure passible de sanctions, avec une limite fixée à 25 000 euros.

Et pour la téléphonie ?

L'autre ordonnance porte sur l'accessibilité des services d'accueil téléphonique pour les utilisateurs sourds, malentendants, sourdaveugles et aphasiques créés par la loi pour une République numérique de 2016. Cette mesure, portée par Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la Transition numérique et des télécommunications, confie à la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) le pouvoir de contrôler le respect de ces obligations par les entreprises de plus de 250 millions de chiffre d'affaires, et instaure une amende administrative pouvant aller jusqu'à 75 000 euros ou 1 % du chiffre d'affaires hors taxe réalisé en France lors du dernier exercice clos. Rappelons que ces entreprises ont l'obligation de mettre à disposition un numéro de service client accessible à ce public via un service de traduction simultanée écrite et visuelle.

Vers une solution universelle ?

Elle pose également le principe d'une solution d'accessibilité téléphonique universelle, avec un service de traduction simultanée écrite et visuelle pour les utilisateurs sourds. Elle leur promet « un parcours d'appel simple, sans surcoût garantissant le respect de la confidentialité des échanges traduits et transcrits ». Dans ce contexte, le gouvernement se dit « attentif à la pénurie d'interprètes en Langue des signes française (LSF) » qu'il se fait un devoir de « résorber ».

« Un numéro de téléphone qu'on ne peut pas joindre ou encore une démarche administrative en ligne impossible à compléter : ce sont autant de freins du quotidien qui restreignent les droits des personnes handicapées », explique Fadila Khattabi, ministre déléguée aux Personnes handicapées. Selon elle, ces « ordonnances s'inscrivent dans la droite ligne fixée par le Président de la République lors de la Conférence nationale du handicap du 26 avril 2023 ». 


Réactions !

Jérémie Boroy, président du Conseil national consultatif des personnes handicapées, militant de longue date sur l'accessibilité des personnes sourdes, dit se « réjouir de l'adoption de cette ordonnance » qui vient confirmer les arbitrages du Premier ministre lors du Comité interministériel du handicap du 3 février 2022 et les préconisations du rapport qu'il avait présenté avec Anthony Colombani après plusieurs mois de consultation des parties prenantes. Selon lui, « c'est une nouvelle étape de l'accessibilité téléphonique qui s'ouvre, et l'autonomie des personnes sourdes, malentendantes, sourdaveugles et aphasiques qui va être renforcée ». Il promet, avec le CNCPH, d'être « attentif à la mise en place concrète et rapide des dispositions nouvelles ».

Pour Jean Bouissou, qui milite en faveur des droits des personnes sourdaveugles et chargé de mission surdicécité auprès du gouvernement, c'est une « bonne nouvelle » qui va permettre « d'éviter les traine-savates… ». Il s'interroge néanmoins sur les modes de contrôle : « Seulement des contrôles numériques automatiques ? Est-ce que les associations peuvent s'associer avec l'Arcom et la Direction générale de la concurrence pour donner leurs avis et diagnostics d'usage ? ». Par ailleurs, pour les plateformes téléphoniques, il aurait souhaité une « incitation à l'innovation technique et sociale… ». « Affaire à suivre de près », selon lui. 


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"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Emmanuelle Dal'Secco, journaliste Handicap.fr"
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