L'été 2025 a été particulièrement meurtrier en matière de noyades, en France. Les enfants avec des troubles du spectre autistique (TSA) ont tristement été surreprésentés dans ce bilan. Un phénomène pourtant documenté depuis de nombreuses années : une étude américaine de 2017 évoquait déjà un risque 160 fois plus élevé que pour la population générale. C'est en partant de ce constat qu'Aurélie Sigrand, co-fondatrice de l'association Ikigaï, a décidé de proposer des cours de natation adapté à ce public. « Les enfants avec TSA sont particulièrement attirés par l'eau sans forcément en connaître les dangers », explique cette maman d'une jeune fille concernée.
Un été qui a failli tourner au drame
Joss, 14 ans, en a fait l'amère expérience. Alors qu'il se baignait dans un lac cet été, l'adolescent a perdu pied et s'est retrouvé la tête immergée, incapable de regagner la berge. Secouru in extremis par un sauveteur, il a été conduit à l'hôpital pour écarter le risque de « noyade sèche », une asphyxie due à un spasme de la gorge sans présence d'eau dans les poumons. Heureusement, plus de peur que de mal.
Des cours quasi individualisés
Cette situation pourra désormais être évitée grâce aux cours de l'association Ikigaï. Chaque semaine, le jeune garçon se rend dans un bassin de rééducation, chauffé à plus de 30°C et de taille « familiale », au sein d'un établissement médico-social du 19e arrondissement de Paris. « C'est royal, on est comme à la maison », se félicite Aurélie Sigrand. Christelle, maître-nageuse formée aux spécificités de l'autisme (en photo ci-dessous), s'adapte aux besoins des enfants, réunis par groupe de deux ou trois, maximum. L'absence de bruit parasite, l'accueil personnalisé et l'encadrement sécurisé permettent la prise de confiance indispensable à l'apprentissage. « On maintient les séances jusqu'à ce que l'enfant puisse 'se sauver' s'il tombe dans la piscine. Pour ceux qui adorent l'eau, c'est un médium possible pour améliorer la communication car l'enfant est déjà dans une situation de plaisir, l'eau le motive », complète Héloïse Bertrand, psychologue de l'association.
Former les pros
Cette dernière forme les maîtres-nageurs à « comprendre les réactions de l'enfant avec des TSA », « à clarifier leur communication en évitant par exemple les métaphores, les blagues, les doubles sens », « à séquencer les activités en micro tâches », « à utiliser des supports visuels », « à renforcer les victoires » ou encore « à répondre aux comportements insatisfaisants »… Des debriefs après les cours peuvent alors être mis en place.
Des progrès rapides
À la différence des cours classiques souvent surstimulants (odeurs, lumière, froid, douche, bonnet qui serre…), ces leçons permettent des avancées spectaculaires : diminution des peurs, autonomie croissante, épanouissement physique et social. « Il n'y a pas d'enfant qui ne puisse pas apprendre à nager. On ne va pas tous en faire des champions olympiques mais certains sont quand même assez prometteurs », se réjouit la co-fondatrice de l'association.
© Clotilde Costil



