Autisme, épilepsie, schizophrénie: un gène impliqué démasqué

Des chercheurs ont découvert le rôle d'un régulateur cérébral impliqué dans certains handicaps psychiques (schizophrénie) et troubles du neurodéveloppement (autisme), permettant d'envisager de nouvelles pistes thérapeutiques. Etude électrique !

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La représentation d’un cerveau humain et, à côté, d’un neurone.

Nouvelle avancée majeure dans la compréhension des troubles du neurodéveloppement (TND) et de certaines maladies psychiatriques ? La complexité du fonctionnement du cerveau révèle bien des surprises... Contre toute attente, le récepteur supposément « excitateur » appelé GluD1 jouerait un rôle majeur dans le contrôle de l'inhibition des neurones. Alors que ce gène est souvent associé à l'autisme, aux troubles bipolaires ou encore à la schizophrénie dans les études génétiques, la compréhension précise de son rôle constitue un enjeu de taille et pourrait ouvrir la voie à de nouvelles pistes thérapeutiques. Cette découverte est le fruit du travail de chercheurs, de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) notamment*, publié dans la revue scientifique américaine Science.

Le rôle d'un neurone

Pour bien comprendre ce défi complexe, petit rappel des fondamentaux. Un neurone est une cellule nerveuse capable de recevoir, analyser et produire des informations. Il génère et propage ce « potentiel d'action » le long de son axone (fibre nerveuse), puis transmet ce signal à travers une synapse (point de contact entre deux neurones ou entre un neurone et une cellule) en libérant des neurotransmetteurs. Ces derniers permettent aux neurones de communiquer entre eux. Ceux qui libèrent des neurotransmetteurs sont appelés « neurones présynaptiques » et ceux qui en reçoivent « neurones post-synaptiques ». Les synapses peuvent être de deux natures : excitatrice ou inhibitrice.

Les synapses excitatrices et inhibitrices

Une synapse excitatrice déclenche la création d'un message nerveux, sous forme de courant électrique, si un récepteur à sa surface peut se fixer à un neurotransmetteur excitateur, le plus souvent du glutamate. A contrario, une synapse inhibitrice empêche l'activation prolongée des neurones en libérant un neurotransmetteur inhibiteur, souvent le GABA. Ainsi, la famille de récepteurs à glutamate (iGluR) et celle des récepteurs à GABA (GABAAR) ont a priori des rôles opposés. C'était sans compter sur le GluD1, sous-type de récepteur au glutamate, qui joue les trouble-fêtes... « Alors qu'il est censé avoir un rôle excitateur, il est préférentiellement retrouvé au niveau de synapses inhibitrices », observent les chercheurs. Pour y voir plus clair, l'équipe de Pierre Paoletti, directeur de recherche Inserm, a étudié ses propriétés moléculaires et sa fonction à partir de cerveaux de souris.

Le GluD1 renforce le signal d'inhibition

Les chercheurs ont également eu la surprise de constater que le GluD1 fixait le GABA. « Son rôle dans le cerveau n'est donc a priori pas excitateur de l'activité neuronale mais inhibiteur », martèlent-ils. « Lorsqu'il est activé par la présence de GABA, la synapse inhibitrice voit son efficacité augmenter. Cela se traduit par une réponse inhibitrice plus importante qui perdure pendant des dizaines de minutes », ajoutent-ils. Autre découverte : le GluD1 ne fonctionne pas comme un récepteur « classique ». Contrairement aux autres, il ne permet l'ouverture d'aucun canal dans la membrane cellulaire. « Son activité résulte d'autres mécanismes internes à la cellule qui restent à clarifier », indiquent les scientifiques.

Excitateurs VS inhibiteurs : rétablir les déséquilibres

« Ces résultats ouvrent la voie à une meilleure compréhension des déséquilibres entre messages excitateurs et inhibiteurs dans le cerveau en cas de TND ou de maladies comme l'épilepsie, caractérisée par une hyper excitabilité neuronale », concluent-ils. Prochaine étape : évaluer si GluD1 peut constituer une « cible thérapeutique intéressante » afin de rétablir un meilleur équilibre et réduire les symptômes dans ces troubles et pathologies.

* du CNRS (Centre national de la recherche scientifique) et de l'ENS au sein de l'Institut de biologie de l'Ecole normale supérieure (IBENS, Paris) avec le laboratoire de biologie moléculaire du MRC (Conseil de recherches médicales) de Cambridge (Royaume-Uni)

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"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Cassandre Rogeret, journaliste Handicap.fr"
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