Autisme : les ions bromures, une recherche prometteuse?

Les ions bromures sont sous le feu des projecteurs depuis quelques jours. Utilisés pour traiter l'épilepsie, ils permettraient, selon une récente étude, de limiter des symptômes de l'autisme et de réduire l'anxiété. Piste thérapeutique prometteuse !

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700 000 Français concernés par les troubles du spectre de l'autisme (TSA). Presque autant d'idées reçues et de théories sur leur origine. Des centaines de recherches… Une toute nouvelle, menée par des chercheurs de l'Inserm, du CNRS, d'Inrae* et de l'université de Tours, pourrait-elle changer la donne ? Elle dévoile les résultats prometteurs d'une molécule régulièrement utilisée dans le traitement de l'épilepsie : les ions bromures. Des études précliniques sur des souris ont révélé une restauration des aptitudes sociales ainsi qu'une réduction de l'anxiété et des comportements stéréotypés. Cette piste thérapeutique jugée « encourageante » est publiée en avril 2022 dans la revue scientifique internationale Neuropsychopharmacology (extrait en anglais via le lien ci-dessous)... Il s'agit évidemment de « soulager » certains symptômes et non de « soigner » l'autisme.

Epilepsie, comorbidité fréquente

« Avec l'arrivée sur le marché de nouveaux médicaments pour les patients épileptiques, son usage a diminué mais il s'agit encore d'un outil thérapeutique intéressant, notamment en cas d'épilepsie résistante aux traitements classiques », indique l'Inserm lors d'un point presse le 16 juin 2022. L'épilepsie est une comorbidité fréquemment retrouvée chez les personnes avec autisme, il est donc probable que certains facteurs de risque et processus physiopathologiques soient communs. C'est l'hypothèse qui a conduit les scientifiques à étudier plus particulièrement l'efficacité des ions bromures dans le contexte des TSA.

Des connexions neuronales dysfonctionnelles

Dans le cerveau, le maintien d'un équilibre entre les phénomènes d'excitation et d'inhibition dans les circuits neuronaux est essentiel à son bon fonctionnement tout au long de la vie. Par conséquent, les déséquilibres peuvent causer de nombreux troubles, en particulier l'épilepsie. « De même, certaines formes de TSA ont été associées à un dysfonctionnement des connexions neuronales inhibitrices », précise l'Inserm. Dans le cas de l'épilepsie, les ions bromures contribuent à corriger ce déséquilibre en favorisant l'inhibition, ce qui permet d'éviter les crises. Les scientifiques estimaient donc qu'un effet similaire pouvait être attendu pour les TSA, avec un impact clinique visible sur les comportements sociaux et stéréotypés... A raison !

Réussite sur 3 mutations génétiques différentes

Après avoir testé ce traitement sur trois souris qui présentaient, qui plus est, différentes mutations génétiques responsables du phénotype autistique, l'équipe a constaté des effets bénéfiques sur l'aspect social. Ces conclusions, observées sur trois modèles différents, insiste l'Inserm, « permettent d'être un peu plus confiant quant à la capacité du traitement à être généralisable à plusieurs sous-groupes d'individus autistes lors de futurs essais cliniques », soulignent Jérôme Becker, chercheur Inserm, et Julie Le Merrer, chercheuse CNRS, co-auteurs de l'étude. Des tests sur l'Homme, c'est justement la prochaine étape. « Un gros challenge », selon Julie Le Merrer, qui évoque l'idée de proposer un traitement oral avec des gouttes, plus facile à prendre, pour les enfants notamment.

Trois autres pistes abandonnées

Mais, « jusqu'ici, la recherche sur l'autisme n'a pas connu beaucoup de succès, donc ces premiers résultats ne sont pas une garantie de réussite », nuance-t-elle. Les dernières années, les progrès des neurosciences et l'identification de facteurs de risque génétiques ou environnementaux ont permis de mieux appréhender les TSA, mais leurs causes demeurent encore assez mal comprises. Dans ce contexte, la recherche thérapeutique avance difficilement. Rappelons que trois essais cliniques ont récemment été abandonnés, « en raison de résultats jugés peu concluants, alors que les molécules étudiées avaient au départ généré beaucoup d'espoirs », consent l'Inserm. La première étude portait sur une molécule appelée balovaptan destinée à agir sur les capacités de socialisation et de communication d'adultes atteints de TSA. Dans le deuxième essai, des enfants et des adolescents avaient reçu de l'ocytocine par voie intranasale mais ce traitement n'avait pas eu d'impact significatif sur les interactions sociales et le fonctionnement cognitif dans le groupe traité. Enfin, le troisième portant sur une molécule appelée bumétanide (un antagoniste du transporteur d'ions chlorures NKCC1) n'avait pas permis de mettre en évidence d'amélioration du comportement social mais seulement une réduction des stéréotypies. Avec les ions bromures, de nouveaux espoirs sont-ils permis ?

* Institut national de la santé et de la recherche médicale, Centre national de la recherche scientifique et Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement

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"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Cassandre Rogeret, journaliste Handicap.fr"
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