C'est l'étude dont tous les medias parlent depuis quelques jours. Linus Biotechnology, une start-up américaine, assure avoir mis au point un test permettant d'aider à diagnostiquer l'autisme chez les bébés, dont les résultats sont publiés dans le Journal of clinical medecine du 1er décembre 2022 (en anglais). Comment ? A partir d'un simple cheveu.
Objectif dépistage précoce
Le trouble du spectre autistique (TSA) est diagnostiqué chez environ 2 % des enfants, selon les auteurs américains de l'étude. Pourtant, « le recours à l'émergence de schémas comportementaux cliniquement observables ne fait que retarder l'âge du diagnostic », de « quatre ans en moyenne ». « Les voies neuronales essentielles au langage et aux fonctions sociales se développent durant la petite enfance », précisent-ils, et cette observation tardive ne permet pas de mettre en place un accompagnement adapté et personnalisé au moment où il serait le plus efficace. Il est donc important d'agir de manière précoce, et pourquoi pas dès la naissance. « L'impact sur le patient et sa famille peut être substantiel », a déclaré le co-fondateur et PDG de LinusBio, Manish Arora.
486 enfants dans 3 pays
Une étude a donc été menée en trois temps sur 486 enfants dans des populations géographiquement distinctes : sur des nourrissons de moins d'un mois au Japon puis en analysant un échantillon national de jumeaux suédois et, enfin, dans un centre spécialisé TSA aux Etats-Unis. Les chercheurs se sont appuyés sur la recherche de certaines substances, notamment les métaux lourds (plomb, aluminium, mercure) - plusieurs études scientifiques ont démontré que l'exposition pendant la grossesse constituait un facteur de risque de développement de l'autisme-, comme outil de diagnostic. « Notre approche contraste avec les efforts antérieurs qui reposaient uniquement sur des lectures génétiques pour identifier les biomarqueurs de TSA, expliquent les auteurs. Au lieu de cela, nous nous sommes concentrés sur l'interface des signatures métaboliques d'origine génétique avec les expositions environnementales externes (...) qui conduisent aux TSA. »
Une précision de 81,4 %
L'algorithme prédictif a détecté le risque de TSA avec une précision de 81,4 %, confirmé par le diagnostic de 175 enfants quatre ans plus tard. « Ces résultats soulignent que la dynamique du métabolisme élémentaire est systématiquement dérégulée dans l'autisme, et ces signatures peuvent être détectées et exploitées dans des échantillons de cheveux pour prédire l'émergence de TSA dès l'âge d'un mois », concluent les chercheurs.
Prudence de mise
Pour autant, ils admettent que la prudence reste de mise et que ce test ne doit pas constituer le seul outil de dépistage mais apporter un indice supplémentaire pour réduire l'errance diagnostique. « Aucun professionnel de santé ne devrait affirmer qu'un enfant est autiste uniquement sur cette base, a déclaré Manish Arora dans une interview à NBC News. Cela fournit une information cruciale mais pas l'unique information. » D'autres essais incluant davantage de participants doivent maintenant être réalisés pour confirmer ces conclusions. Cette technique pourrait également être utilisée dans d'autres cas comme le TDAH (trouble déficitaire de l'attention/hyperactivité), certains cancers pédiatriques ou la maladie de Charcot (SLA). Plus d'un an après son lancement fin 2021, Linus Biotechnology a levé 16 millions de dollars pour poursuivre ses recherches et « fournir des résultats tangibles ».
Diagnostiquer un trouble du neurodéveloppement dès le berceau, c'est aussi ce que promet l'imagerie fonctionnelle ultrasonore, développée par une start-up française et une cohorte de scientifiques. Un premier essai clinique est attendu d'ici début 2023 (article en lien ci-dessous).