Stratégie autisme/TND reconduite mais des réponses en 2023

La stratégie nationale autisme/TND 2023-27 est annoncée mais ne sera dévoilée en détail qu'au printemps 2023. Une urgence face à des taux de prévalence en forte hausse : 12 à 15 %, contre 5 % en 2017. Les moyens seront-ils à la hauteur ?

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Lancée en 2018, la stratégie nationale autisme et TND (troubles du neurodéveloppement) touche à sa fin le 31 décembre 2022. Sera-t-elle reconduite ? Oui, a répondu la Première ministre Elisabeth Borne le 6 octobre dernier lors du Comité interministériel du handicap (CIH, article en lien ci-dessous). Le gouvernement, qui se dit « pleinement conscient des besoins des personnes autistes, TDAH, DYS, TDI et de leur famille » va poursuivre ses engagements dans une nouvelle stratégie nationale 2023-27 et même les « intensifier ». La totalité de son contenu devrait être dévoilée en avril 2023, selon le dossier de presse du CIH.

Une prévalence multipliée par 3

Il s'agit en effet d'un sujet de santé publique de plus en plus « majeur ». Toutes les études scientifiques récentes convergent : le taux de prévalence des troubles du neurodéveloppement se situe autour de 12 à 15 % des naissances alors qu'il était estimé à seulement 5 % en 2017 (dont respectivement 1,8 % et 1 % pour l'autisme). « C'est donc trois fois plus », reconnaît la Délégation interministérielle à l'autisme et aux troubles du neuro-développement (DIA), qui engage à faire « plus d'efforts ». Pour autant le budget n'est pas encore défini et, ce n'est pas mathématique, il ne sera pas multiplié par trois.

Si des progrès ont été réalisés depuis cinq ans, la DIA reconnaît qu'il faut « accélérer », notamment envers le public d'adolescents et d'adultes autistes, avec la promesse « d'actions renforcées ou nouvelles ». Il en va de même pour les personnes avec un autre trouble du neurodéveloppement que cette nouvelle stratégie devra mieux prendre en compte car « la pertinence de l'approche a été démontrée » à la fois en matière de recherche et d'accompagnements, « sans pour autant nier les spécificités de chacun de troubles », selon la Délégation.

Quelle méthode ?

Quelles seront les prochaines étapes ? Une concertation doit avoir lieu afin de définir cette nouvelle stratégie nationale, qui sera pilotée par la DIA. Des travaux préparatoires visant à recueillir les premières réflexions et propositions ont été menés ces derniers mois, qui ont réuni toutes les parties prenantes : associations de familles et d'usagers, représentants de l'Etat et des ministères, professionnels et scientifiques, personnalités qualifiées et ARS (Agences régionales de santé). Les résultats de l'enquête (Ipsos) menée depuis trois ans ont également permis de collecter les réponses des familles (11 000 sur la dernière édition) interrogées sur les priorités d'actions à poursuivre.

Une continuité en 2023

En attendant, pour couvrir l'année 2023 et assurer la transition entre les deux stratégies, le Projet de loi de finance de la Sécurité sociale (PLFSS) a débloqué une somme de 80 millions d'euros (67 millions pour la prolongation de la stratégie auxquels il faut ajouter des mesures tout handicap qui vont bénéficier aux personnes TSA-TND  (répit, logement inclusif…)). La priorité est donnée à l'ouverture des plateformes de coordination et d'orientation destinées aux enfants entre 7 et 12 ans et au renforcement de celles pour les 0-6 ans, la création d'unités résidentielles pour les adultes autistes en situation très complexe, la création de dispositifs pour la scolarisation au sein de l'école ordinaire, la poursuite du déploiement des services de relais aux aidants ou encore l'installation de la Maison de l'autisme qui doit être inaugurée au printemps 2023, à Aubervilliers (93) et également en virtuel (article en lien ci-dessous).  

Appel à mieux faire

Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée aux Personnes handicapées, admet que « les urgences du présent sont encore trop nombreuses » et que la « mobilisation » doit être « poursuivie ». Constat partagé par l'association Paari (Personnes autistes pour une autodétermination responsable et innovante). Si elle juge que des « mesures pertinentes ont été déployées », elle alerte sur les conditions de vie particulièrement difficiles de nombreuses familles : fuite des pères, des mamans obligées de travailler, qui sombrent dans la précarité...

Elle déplore par ailleurs un effectif de la DIA « insuffisant » au vu de la tâche à accomplir, appelant à un renforcement de ses équipes, mais aussi des budgets dédiés avec un « contrôle plus rigoureux de l'attribution des financements ». Paari réclame en effet que les établissements soient certifiés par des organismes de type Cap handeo (qui propose une certification spécifique ESMS TSA), pour s'assurer qu'ils respectent bien les recommandations de la HAS (Haute autorité de santé). Cette certification étant payante, elle demande à l'Etat d'attribuer des moyens financiers aux établissements souhaitant initier cette démarche.

Des recommandations pas suivies

Autre point de crispation : la formation initiale des psychologues avec des contenus qui ne sont souvent pas « actualisés » au regard des données de la science internationale. « Après quatre ans d'actions intensives, la diffusion des bonnes pratiques doit se poursuivre pour garantir les droits des personnes », plaide, elle aussi, la DIA. En attendant, cette situation engendre, selon Paari, une « grosse pénurie de professionnels compétents, notamment dans le secteur public », poussant les parents à « débourser de l'argent quand ils arrivent à trouver un pro en libéral ».

L'association constate par ailleurs que « la France, plutôt que de s'appuyer sur des rapports de l'ONU pour penser de nouveaux lieux de vie pour les personnes autistes ayant les plus grands besoins d'accompagnement, tend à négliger de plus en plus l'ouverture de place en établissements médico-sociaux sans pour autant offrir d'autres solutions adaptées », citant en exemple les « logements inclusifs » en plein essor mais qui font face à divers obstacles. Elle en appelle au « courage politique » pour mettre en place un accompagnement très substantiel, avec des aménagements sécurisés, des aides humaines 24h/24 et de la rééducation et des soins ambulatoires et/ou à domicile selon les possibilités et souhaits de chacun.

Un investissement à long-terme

Geneviève Darrieussecq rappelle le « choix d'investir massivement dans le repérage précoce pour créer les conditions durables afin que chaque enfant ait toutes les chances de se développer positivement ». In fine, c'est un « paari » sensé sur l'avenir pour « augmenter les aptitudes d'autonomie à moyen et long terme », répond l'association de personnes autistes auto-représentées. « A défaut, beaucoup de ces enfants deviendront des adultes avec le même niveau de dépendance que les personnes admises en EPHAD », conclut Paari. La DIA promet que la « qualité de vie sera encore meilleure demain grâce aux résultats d'une recherche sur les TND en plein essor et aujourd'hui structurée ».

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