Je réagis à la sonnerie d'un interphone, aux pleurs d'un enfant, indique lorsqu'une voiture s'approche et fais même office de réveil le matin… Qui suis-je ? Un chien du silence ! Marie, atteinte d'une surdité unilatérale, réclame, pour ses 35 ans, ce cadeau un peu particulier. Elle compte sur son futur compagnon de vie pour lui apporter sécurité et tranquillité d'esprit.
Un combat contre la tumeur
« Je me présente, Marie, bientôt 35 ans, maman d'une crevette de quatre ans et j'ai toutes mes dents ». Seulement voilà… Marie n'a pas toutes ses oreilles, elle est sourde du côté gauche. « Vous allez me dire, il t'en reste une, c'est mieux que rien ! Mais si on en a deux à la base, ce n'est pas pour rien... ». Elle a grandi « presque toute sa vie » avec un neurinome acoustique de stade 4, une tumeur cérébrale qui touche le nerf de l'audition, de l'équilibre et le nerf facial. En 2017, elle se fait opérer. Les chirurgiens entament un long bras de fer de 14 heures avec cette grosseur de 3,6 cm. Mais, après une trentaine d'années d'existence, elle a eu « le temps de faire des dégâts ».
Un brouhaha épuisant
Un an après l'intervention, Marie souffre de paralysie faciale temporaire. « Je suis gelée du côté gauche, c'est sympa pour Halloween mais le reste de l'année c'est moins facile à gérer », préfère-t-elle sourire. Elle a également un sens de l'équilibre précaire, « une mémoire de poisson rouge », éprouve une grande fatigue et peine à évaluer, par exemple, la profondeur des escaliers. « Une chirurgie du cerveau, surtout quand elle dure si longtemps, ce n'est pas du gâteau. On m'a dit que j'en ressentirai les effets pendant au moins deux ans. Je suis incapable de me concentrer plus de 20 minutes et j'ai perdu de nombreux souvenirs d'enfance », explique-t-elle. D'autre part, j'entends tout en 'mono', tous les bruits sont sur le même plan. » Pour Marie, les réunions de famille sont un véritable parcours du combattant. La musique de fond, les enfants qui jouent dans la pièce attenante, une discussion animée… Pour un peu que le lave-vaisselle soit en marche, Marie est totalement déstabilisée. Impossible de distinguer les sources de chaque son ni de suivre la moindre conversation. « C'est le brouhaha dans ma tête, et c'est épuisant ». Une surdité qui handicape la jeune femme dans la vie quotidienne. Des actions simples comme sortir seule et conduire la terrifient. Un chien du silence pourrait lui signaler qu'un automobiliste klaxonne ou encore qu'une sirène retentit.
Des chiens gratuits
Après les chiens-guides pour les personnes déficientes visuelles et ceux d'assistance en cas de handicap mental, physique ou psychique, les chiens écouteurs permettent à leur maître sourds et malentendants de retrouver une certaine autonomie. Grâce à des subventions, l'association « Les chiens du silence » propose ces compagnons hors-du-commun gratuitement mais sous certaines conditions… « Si je passe par l'association, mon dossier doit être accepté par leur commission et, en cas de réponse positive, j'obtiendrai un chien formé après deux ans d'attente. Par ailleurs, mon dossier sera accepté seulement si j'ai la carte d'invalidité à 80% mais le délai d'obtention est, là encore, de plusieurs mois ». Marie ne peut attendre plus longtemps ; elle a donc entamé une campagne de financement participatif (lien ci-dessous) pour pouvoir acquérir, de son côté, un berger australien compatible avec la formation des chiens du silence. A terme, il sera capable de répondre à trente ordres en langue des signes française (LSF), diriger Marie vers la source de plusieurs bruits, établir un contact physique avec elle en cas de son inhabituel, lui indiquer quand sa fille l'appelle, la prévenir lorsqu'une personne frappe à la porte ou l'interpelle dans la rue…