DERNIÈRE MINUTE DU 11 AVRIL 2023
Un an après le lancement de MonParcoursPsy, vient l'heure du bilan. Ce dispositif censé permettre à tous un accès aux soins de psychologie ne fait pas l'unanimité. Le Syndicat national de psychologues appelle de nouveau au boycott. Le 5 avril 2022, le gouvernement lançait en grandes pompes ce dispositif offrant un remboursement de huit séances chez un psychologue pour les personnes, dès l'âge de trois ans, ayant des troubles psychiques d'intensité légère à modérée. A peine lancé, recevait-il une salve de critiques. Justifiées ? Aux dires du Syndicat national des psychologues (SNP), MonParcoursPsy aurait l'effet d'un pansement sur une jambe de bois. Un an plus tard, face au délabrement de la psychiatrie publique, cette solution apportée par le gouvernement ne semble pas suffisante pour répondre à la demande, en constante augmentation. Inadaptation aux besoins des patients, inégalité d'accès au dispositif, précarisation des psychologues (…), les raisons de la colère sont nombreuses. Résultat, en un an, seuls 2 200 psychologues sur les 70 900 recensés en France (chiffres 2022) se sont portés volontaires pour participer au dispositif. La majorité des psy libéraux (93 %) le boycottent (Lire : MonParcoursPsy : un an après, les psy vent debout).
ARTICLE INITIAL DU 05 AVRIL 2022
Emmanuel Macron l'avait annoncé lors des Assises de la psychiatrie en septembre 2021 (article en lien ci-dessous). Ça y est, le dispositif « MonPsy » (lien ci-dessous) entre en vigueur le 5 avril 2022. Son principe ? Permettre un remboursement de huit séances chez un psychologue pour les personnes, dès l'âge de trois ans, ayant des troubles psychiques d'intensité légère à modérée. Pour pouvoir en bénéficier, le patient doit d'abord passer par la case médecin généraliste, qui l'oriente ensuite vers un psychologue, après évaluation de sa situation psychologique. Le généraliste lui fournit une lettre d'adressage qui permet de faire le lien avec le psychologue. « Attention, ce n'est pas une prescription mais un simple mode de coopération entre professionnels de la santé », prévient Frank Bellivier, délégué ministériel chargé de la psychiatrie. Charge au patient de choisir le psy qui lui convient sur la plateforme « MonPsy » (ouverture le 5 avril), en fonction de critères comme la proximité géographique. Huit séances « par année civile » sont prises en charge par l'Assurance maladie. La première est un entretien d'évaluation qui permet d'orienter les sept suivantes, selon les besoins, du trouble anxieux-dépressif en passant par les troubles des conduites alimentaires sans critères de gravité ou encore les addictions mais sans critères de dépendance. Les patients présentant des troubles psychiques plus sévères avec notamment un risque suicidaire ne relèvent pas de ce dispositif.
Entre 30 et 40 euros la séance
Libre au psychologue de définir la nature et la durée de son accompagnement. Côté bourse, il faut compter 40 euros pour la première séance et 30 pour les suivantes (pour environ 40 minutes). « Ce tarif comprend la participation de l'Assurance maladie à hauteur de 60% et celle des organismes complémentaires à 40%. Aucun dépassement d'honoraires n'est possible dans ce cadre », apprend-on sur le site MonPsy. Le tiers-payant n'étant pas appliqué, il incombe à l'assuré d'avancer les frais avant remboursement sur présentation d'une feuille de soin fournie par le psychologue. « En effet, puisque la profession n'est pas encore connue de l'Assurance maladie, elle n'est pas équipée du matériel requis pour la télétransmission », informe l'Assurance maladie.
Avant d'être généralisée à tout le territoire, cette mesure a bénéficié d'une expérimentation dans quatre départements : les Landes, le Morbihan, le Lot-et-Garonne et les Bouches-du-Rhône. Cette phase de test « a permis d'offrir à 37 000 patients une prise en charge qui n'était pas possible jusqu'alors », indique l'Assurance maladie. C'est désormais sur tout le territoire que se déploie « MonPsy » ; 1 300 psychologues volontaires se sont inscrits en l'espace d'un mois sur la plateforme. Ces professionnels devaient répondre à un cahier des charges précis pour espérer faire partie de cet annuaire en ligne : au moins trois ans d'expérience dans le soin psychique et un diplôme universitaire en psychologie clinique et/ou psychopathologie. Si, pour l'heure, la répartition des psychologues partenaires est encore cantonnée aux aires urbaines, les porteurs du dispositif assurent que le maillage doit s'étoffer dans les prochaines semaines. « A ce jour, on en a plus de 185 en Île- de-France, 80 à Paris intra-muros, 234 en région PACA dont 112 rien que dans les Bouches-du-Rhône qui faisaient partie des territoires expérimentateurs », détaille le cabinet du ministre de la Santé. Au total, le ministère envisage la prise en charge d'environ 200 000 personnes. Pour financer le dispositif, il met cette année sur la table une enveloppe de 50 millions d'euros.
Et après ?
Si cette nouvelle mesure prise par le gouvernement couronne une série de moyens mis en œuvre pour améliorer la santé mentale des Français, comme la généralisation des Premiers secours en santé mentale (PSSM) ou encore le numéro national d'appel de prévention du suicide, le 31 14 (article en lien ci-dessous), « MonPsy » ne fait pas vraiment l'unanimité. Surtout au sein de la profession des psychologues. Insuffisance du nombre de séances, forfait jugé irréaliste, risque de rupture de soins (…) sont parmi les principales critiques. Le 29 mars, plus de 2 000 thérapeutes ont signé une tribune dans Le Monde, appelant au boycott de la plateforme. Ils estiment par ailleurs que le dispositif exclut les troubles psychologiques les plus graves.
Face à ces questionnements, Frank Bellivier répond que le nombre de huit séances fixé correspond à un calibrage réfléchi et éprouvé durant l'expérimentation. « La plupart du temps, les besoins variaient autour de quatre à cinq séances, avec, dans un bon pourcentage de cas, la résolution de la problématique. On s'est donc arrêté sur huit séances, dans une moyenne haute ». « Si une situation de souffrance psychique venait à réapparaître les années suivantes, le dispositif reste accessible chaque année », poursuit-il. Quant aux personnes qui requièrent un suivi plus long et plus lourd, les centres médico-psychologiques peuvent s'avérer plus adaptés. « Ça se complète », assure le ministère de la Santé. L'objectif étant, avec « MonPsy », de proposer une alternative psychologique en ville, pour tous, alors que les délais de prise en charge en CMP sont très longs. Ces structures étaient d'ailleurs elles aussi visées par des mesures de renforcement de moyens, annoncées lors des Assises de septembre 2021. Peut-être le prochain chantier, dans un nouveau quinquennat ?