C'est un « Saturday night fever »* étonnant que vient de vivre Soumaila Traoré... Le 30 novembre 2019, il attend patiemment son Noctilien à Paris Saint-Lazare, en direction de Cergy-le-Haut (95). Ravi de le voir approcher, il prépare son fauteuil roulant pour monter à bord mais le chauffeur contrarie ses plans. Après l'avoir ignoré, il répond finalement que la rampe ne fonctionne pas et que, de toute façon, « il n'y a plus de place »... « Alors que les gens continuaient à monter et qu'il restait au moins dix places libres, s'offusque le quadragénaire auprès du Parisien. En plus, le bus était neuf ! » Attendre le prochain ? Pas question ! Alors, comme à son habitude, le Val d'Oisien décide de bloquer le car.
Plainte pour discrimination
Furieux, le conducteur appelle du renfort. Ses collègues « ont essayé de m'intimider », raconte Soumaila. Témoins de la scène, des jeunes prennent sa défense mais rien n'y fait... Le conducteur reste campé sur ses positions. Une demi-heure plus tard, il contacte la police. « Manque de pot », ils se rangent du côté du passager. Le chauffeur s'exécute, et la « palette » se met subitement à fonctionner... « Choqué » par cet incident, Soumaila decide de déposer plainte contre le chauffeur pour « discrimination par personne morale en raison d'un handicap ».
Former le personnel
Quadri-amputé à la suite d'un accident à l'âge de 2 ans, c'est loin d'être sa première mésaventure dans les transports en commun. En juillet 2018, sa course poursuite avec un bus à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis) avait fait grand bruit (article en lien ci-dessous). Plus récemment, en mars 2019, il a immobilisé un car au Blanc-Mesnil. « Ça arrive souvent, déplore-t-il. Il faut sanctionner les compagnies qui laissent faire ça et mieux former le personnel. » En attendant, la SNCF assure qu'une enquête interne est en cours pour faire la lumière sur cette histoire et « prendre les mesures nécessaires afin qu'elle ne se reproduise pas ».
De l'espoir avec le projet de loi orientation ?
Malheureusement, Soumaila est loin d'être un cas isolé. En mars 2018, Julien et Rudy, deux Lyonnais en vadrouille à Marseille, avaient publiquement fait part d'une galère similaire (article en lien ci-dessous), deux chauffeurs refusant de déployer leur rampe pour permettre l'accès du fauteuil électrique de Rudy. Pour quel motif ? Elles font « tomber les bus en panne ». Vous avez dit absurde ? Espérons que le projet de loi d'orientation des mobilités, adopté à l'Assemblée nationale le 19 novembre 2019, changera la donne (article en lien ci-dessous)... Il vise à apporter une réponse aux fractures sociales et au sentiment d'injustice que vivent de nombreux Français qui ne disposent pas de solution de mobilité satisfaisante au quotidien, a fortiori en cas de handicap. Ses objectifs : des transports plus accessibles, moins coûteux et plus propres. Mieux vaut un train de retard que jamais ?
* Fièvre du samedi soir