Fin de vie : c'est le médecin qui décidera mais...

Le Conseil constitutionnel valide la procédure d'arrêt des traitements des patients incapables de s'exprimer mais apporte des garanties aux proches pour pouvoir faire un recours en urgence contre cette décision médicale.

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Le Conseil constitutionnel a validé la procédure d'arrêt des traitements des patients incapables de s'exprimer, prévue par la loi sur la fin de vie. Dans son premier jugement sur la fin de vie, rendu publique le 2 juin 2017, le Conseil précise que la décision du médecin d'arrêter ou de limiter les traitements de maintien en vie doit être « notifiée aux personnes » qu'il a interrogées sur la volonté du patient « dans des conditions leur permettant d'exercer un recours en temps utile ». « Ce recours doit par ailleurs pouvoir être examiné dans les meilleurs délais par la juridiction compétente aux fins d'obtenir la suspension éventuelle de la décision contestée », ajoute-t-il dans sa décision, prise alors que les affaires Vincent Lambert et de la petite Marwa (articles en lien ci-dessous) montrent combien la fin de vie reste un sujet brûlant.

Réactions contraires

Jean Leonetti s'est réjoui que le Conseil ait reconnu que la loi sur la fin de 2016, dont il est co-auteur « avait pleinement respecté les garanties » de la Constitution. « C'est la déception à l'association (...). Le Conseil entérine que le médecin est le seul décideur », dit Philippe Petit, un représentant de l'Union nationale des associations de familles de traumatisés crâniens et de cérébro-lésés (UNAFTC), évoquant un risque de judiciarisation des conflits. L'association « va écrire au Comité consultatif national d'éthique, légitime pour donner un avis, des conseils et des recommandations afin d'aider le médecin à construire une décision acceptable par les familles », ajoute-t-il.

Sans directives anticipées

Les Sages avaient été saisis par l'UNAFTC déplorant que la décision de poursuivre ou non des traitements dépende des seuls médecins lorsque le patient est incapable de s'exprimer en raison de son état (coma, état végétatif ou pauci-relationnel), dès lors qu'il n'a pas laissé de directive anticipée. Selon elle, dans toutes les situations où la volonté du patient ne peut être reconstituée avec certitude, « le doute devrait profiter au droit fondamental à la vie ». L'association, qui réclame que l'avis des proches soit davantage intégré dans la décision d'arrêt des traitements, avait déposé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) sur cette disposition de la loi Claeys-Leonetti sur la fin de vie.

Médecin décisionnaire ?

Elle contestait un décret d'application de la loi sur la fin de vie, qui, afin d'éviter l'acharnement thérapeutique, autorise l'arrêt des traitements à l'issue d'une procédure collégiale laissant le médecin en charge du patient de prendre la décision. Ce décret du 3 août 2016 stipule que le médecin décide après concertation avec l'équipe soignante et après avoir pris l'avis d'au moins un médecin consultant sans rapport hiérarchique avec lui. La personne de confiance consultée ou, à défaut, la famille ou l'un des proches peuvent pour leur part rapporter la volonté du patient. Au final, le médecin reste le seul décisionnaire, sa décision, étant soumise le cas échéant, au contrôle des juges, rappelle le Conseil.

Un recours en urgence

En cas de désaccord avec les médecins, les proches pouvaient déjà saisir le juge des référés, comme l'a illustré le cas de Marwa. Le sort de cette petite fille lourdement handicapée d'un an et demi divisait famille et corps médical. Le Conseil d'État saisi en appel et en urgence avait ordonné en mars 2017 la poursuite des traitements de l'enfant, donnant raison aux parents contre l'avis des médecins, confirmant ainsi le jugement d'un tribunal administratif. Le Conseil constitutionnel souligne que le recours juridique doit être « effectif », c'est-à-dire qu'il puisse s'exercer en urgence et dans de bonnes conditions, grâce en pratique à l'information des proches et à la célérité du juge saisi d'un recours qui doit pouvoir suspendre rapidement la décision médicale.

Le cas Lambert

Or, sur le sort de Vincent Lambert, jeune tétraplégique plongé dans un état végétatif sans espoir d'amélioration après un accident de la route en 2008, la famille se déchire depuis quatre ans. Le Conseil d'État puis la Cour européenne des droits de l'Homme ont validé l'arrêt de ses traitements, qui n'est toujours pas mis en oeuvre. François Lambert, son neveu, a salué la « très bonne décision » du Conseil qui a donc validé l'arrêt des traitements par les médecins des patients hors d'état d'exprimer leur volonté.

© Dan Race/Fotolia

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