En 2020, 67 % des dirigeants d'entreprises se disent plus enclins à embaucher une personne en situation de handicap, soit une hausse de 9 points en un an, en dépit du contexte économique actuel. Une propension qui croît avec la taille de la société. Selon une majorité d'entre eux, l'image des travailleurs handicapés s'est également améliorée. Ces résultats sont issus de la 3e édition du Baromètre sur la perception de l'emploi des personnes en situation de handicap par les dirigeants d'entreprise, les salariés et le grand public, mené par l'Agefiph (fonds dédié à l'emploi dans le privé) et l'Ifop. Objectif ? Saisir les difficultés et besoins liés à l'embauche de ce public.
Contrainte ou opportunité ?
Les perceptions à l'égard de la vie professionnelle des personnes en situation de handicap s'améliorent également. Les dirigeants ne sont ainsi plus qu'un tiers à juger qu'il est difficile pour un travailleur handicapé de s'épanouir professionnellement (-6 points par rapport à 2018), contre la moitié des salariés (-5 points). Pour autant, l'insertion en emploi des personnes handicapées est encore majoritairement perçue comme une contrainte. Si les trois-quarts des employeurs estiment qu'il s'agit d'une « opportunité », ils la considèrent, dans le même temps, comme une « difficulté objective » ou une « charge supplémentaire ». A ce titre, 62 % jugent que l'embauche d'une personne handicapée est « trop difficile », contre 68 % les deux années précédentes, principalement dans les secteurs de l'industrie et du BTP. Une évolution toutefois « intéressante et encourageante », selon Frédéric Dabi, directeur général adjoint de l'Ifop, au regard du contexte économique actuel, mais en décalage avec la perception du grand public (72 % la jugent aujourd'hui « difficile » contre 67 % en 2019), qui souligne le « durcissement perçu du marché de l'emploi lié à la crise du Covid ».
Briser les préjugés sur le handicap invisible
Principales difficultés rencontrées par un salarié handicapé, selon les trois cibles interrogées ? Gravir les échelons et encadrer une équipe. L'enquête met par ailleurs en exergue une hiérarchie entre les différents types de handicap ; les déficiences auditives et maladies invalidantes sont perçues comme les « moins difficiles » à intégrer tandis que les troubles cognitifs et le handicap psychique et mental ferment la marche. Pour changer la donne, « l'Agefiph a un rôle fondamental de pédagogie et de démystification à jouer », exhorte Frédéric Dabi. « C'est une politique de longue haleine », explique Malika Bouchehioua, présidente de l'Agefiph, qui incite à « promouvoir des contre-exemples, des success stories ». Elle ajoute : « C'est notamment pour cette raison que l'on a développé le réseau des référents handicap (article en lien ci-dessous), avec l'objectif de partager ce type d'expériences et de maximiser l'opportunité de dévoiler son handicap ». Selon elle, il est absolument nécessaire de « sensibiliser le grand public mais aussi les acteurs de l'emploi au quotidien » sur le handicap invisible. En effet, seuls 7 % des personnes interrogées savent que 80 % des handicaps déclarés sont invisibles, une majorité les sous-évaluant à 40 %. Autre clé pour briser les idées reçues : travailler aux côtés d'un collaborateur handicapé. C'est ce que pensent 52 % des salariés ayant au moins un collègue concerné, contre 38 % des dirigeants, qui sont moins au contact de leurs équipes. Pour ces salariés, cette collaboration est principalement l'occasion de mettre en place de nouvelles manières de faire mais nécessite des aménagements concrets.
Les facteurs incitatifs
Plusieurs pistes pour faciliter l'intégration des personnes handicapées : l'accès à des profils correspondant davantage aux besoins des dirigeants, l'appui d'organisme spécialisés tels que l'Agefiph ou encore la simplification des démarches administratives. Par ailleurs, l'aide à exceptionnelle à l'embauche de 4 000 euros, liée à la crise actuelle, pour chaque personne handicapée recrutée en CDI ou CDD de plus de trois mois, prolongée jusqu'au 30 juin 2020 (article en lien ci-dessous), considérée comme « juste » par trois quarts des sondés, semble également incitative pour un tiers d'entre eux.
Des salariés « vulnérables » mais peu protégés
Autres données étudiées : l'impact de la crise sur les travailleurs handicapés. Moins d'un quart des dirigeants ont mis en place des mesures (octroi d ́un bureau individuel, télétravail, aménagement des horaires, aménagement du poste) pour les protéger d'une éventuelle contamination, alors que 67 % du grand public estiment que les personnes handicapées sont plus « vulnérables » que les « valides » au développement d'une forme grave de la maladie. « Malgré un début de changement de regard sur le handicap en entreprise, il en ressort un décalage persistant entre la perception des personnes interrogées et la réalité », concluent les auteurs de l'étude. L'Agefiph promet d'en tirer les enseignements nécessaires.