Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée aux personnes handicapées a ordonné, le 27 novembre 2013, le placement immédiat sous administration par l'État d'un établissement privé pour enfants lourdement handicapés du Gers à cause des « dysfonctionnements » dont il serait le théâtre, ont annoncé ses services. La ministre a jugé « qu'il était temps de prendre des mesures d'exception ». Le ministère ne parle pas de maltraitances, comme l'ont fait la semaine passée plusieurs associations d'aide aux personnes handicapées et le syndicat CGT de la santé du Gers quand ils dénonçaient ce qui se passait, selon eux, à l'Institut médico-éducatif (IME) « Maison d'enfants de Moussaron », à Condom (Gers).
Une affaire ancienne
Mais, malgré une intervention de l'Agence régionale de santé (ARS) et un rapport en juillet 2013, « force est de constater que les dysfonctionnements perdurent et que la situation est encore très insatisfaisante », dit le ministère. L'IME de Condom accueille 80 enfants et jeunes adultes et emploie 80 salariés. Il avait fait l'objet de rapports d'inspection en 1997, 2001 et 2002 qui révélaient de sérieux dysfonctionnements touchant au traitement des enfants, à la contention des résidents, aux locaux ou aux protocoles infirmiers, dit une source proche du dossier. A la suite d'un certain nombre de signaux d'alerte et d'une inspection les 9 et 10 juillet 2013, l'ARS avait donné à l'IME jusqu'au 16 septembre pour remédier aux dysfonctionnements, puis jusqu'à mi-décembre pour se mettre plus largement
en conformité, dit cette source. L'IME a pris des mesures d'urgence. Mais la ministre a jugé la situation assez grave pour prendre sans attendre des mesures coercitives, dit la même
source.
Des préconisations de « bonne gestion »
Madame Carlotti demande donc, « sans délai, à la directrice générale de l'Agence régionale de santé de mettre l'IME Moussaron sous administration provisoire ». Elle va « confier à l'inspection générale des affaires sociales (Igas) la mission de faire des préconisations de bonne gestion qui constitueront une feuille de route » pour la nouvelle direction qui sera installée. « La vulnérabilité des enfants accueillis exige de ceux qui les accompagnent un comportement exemplaire, explique la ministre. En dernier ressort, c'est à l'Etat d'y veiller. Aujourd'hui, c'est ce que je fais avec détermination et fermeté ». La permanence de l'accompagnement des enfants sera évidemment assurée sur toute cette période.
La direction dénonce une « cabale »
La décision de placer cet IME sous administration provisoire répond à la demande formulée la semaine passée par la CGT, l'Association des paralysés de France, Autisme Gers et un collectif de salariés et anciens salariés. Ces organisations avaient dénoncé lors d'une conférence de presse des « pratiques d'un autre âge » aux dépens d'enfants lourdement handicapés mentaux. La direction avait riposté en parlant de « cabale ». Elle avait souligné que deux anciennes éducatrices avaient été condamnées pour diffamation en 2002 pour des accusations similaires. Elle avait assuré s'être attachée à apporter les corrections réclamées par l'ARS, en collaboration avec cette dernière. « Si j'avais flairé à Moussaron la moindre notion de maltraitance, il y a bien longtemps que je serais parti », avait dit à l'AFP Philippe Lacroix, chef de service de l'établissement. La direction n'a pu être jointe mercredi soir.
Cette affaire fait écho à la suspicion de maltraitances dans un foyer pour adultes handicapés dans les Landes qui a donné lieu, fin novembre 2013, à l'ouverture de deux enquêtes par l'ARS et la justice.