Le suspense est resté entier jusqu'au bout. Le nom a été dévoilé à la faveur d'une charade par Emilien, un tout jeune sportif déficient visuel et mascotte de l'équipe de France, qui a parcouru des doigts son pense-bête en braille. C'est donc à Vincent Gauthier-Manuel que revient le privilège de brandir le drapeau tricolore lors de la cérémonie d'ouverture des Jeux paralympiques de Sochi 2014. On l'a surnommé « Abraracourcix » parce qu'il né sans avant-bras gauche. Le hasard (y-en-a-t-il vraiment un ?) veut que le porte-drapeau de l'équipe de France « valide », Jason Lamy-Chapuis, soit un ami d'enfance de Vincent puisqu'ils ont suivi le même cursus sport-étude. Les deux copains feront donc battre les couleurs de la France aux vents russes à un mois d'intervalle.
Un solide palmarès
Ce Jurassien, né en 1986, licencié au ski club de Grandveaux, est rompu à tous les sports de glisse. Ce qui, selon Jean Minier, directeur technique national, « ne donne à sa nomination que plus de sens pour une équipe composée à la fois de skieurs alpins et nordiques ». Vincent a glané de belles médailles. Double champion du monde en titre en slalom et géant (2013), triple médaillé d'or aux championnats du monde de 2011 et deux fois médaillé d'argent (super G et super combiné) et une fois de bronze (Géant) aux Jeux paralympiques de Vancouver en 2010. La devise de celui qui se qualifie lui-même comme un hyperactif : « Pas plus qu'à fond » !
Une sacrée responsabilité
Pour Jean Minier, « il fallait, pour assumer ce rôle, un « très gros » skieur ! » Pas en volume mais en compétence, évidemment ! « Nous avions également pensé à Marie Bochet (ski alpin catégorie debout) qui a raflé cinq médailles d'or aux championnats du monde de 2013, poursuit-il. Avec ces deux athlètes, nous sommes vraiment sur le haut du panier. Mais Marie n'a que 19 ans, et cette responsabilité est peut-être un peu lourde à porter. Etre le porte-drapeau d'une délégation vous colle une sacrée pression qu'il faut être assez solide pour gérer, notamment au départ des courses. » Vincent a 27 ans et la tête bien sur les épaules. « Et puis ce sont peut-être ses derniers jeux, conclut Jean ». Le privilège du vétéran, comme une apothéose que l'on espère dorée. Ne manque en effet à ce champion que le titre olympique.
La sélection dévoilée le 10 février
Le palmarès de Vincent fait heureusement de lui un prétendant solide pour un titre à Sochi. Sans qu'il ne s'engage pour autant à faire de pronostic : « Je préfère ne pas trop me prononcer là-dessus. Ce que je souhaite avant tout c'est réussir à faire du bon ski en me faisant plaisir. Je veux être en paix avec moi-même. » Avec Vincent, un étendard zen promet de flotter sur la délégation de France. Ce qui n'empêche pas la détermination puisque tous les sélectionnés, triés sur le volet, seront des « médaillables » potentiels. La liste finale ne sera dévoilée que le 10 février 2014.