L'illettrisme,"facteur aggravant" en pleine crise du Covid19

Etre illettré est "un facteur aggravant" en pleine crise du Covid-19, souligne Christian Janin, président de l'Agence nationale de lutte contre l'illettrisme (ANLCI) à l'occasion des 7e Journées nationales d'action contre ce fléau.

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Par Margaux Saive

Question : Quelles formes prend l'illettrisme au quotidien ?
Christian Janin : L'illettrisme est soit le résultat d'un déficit de l'apprentissage de la lecture et de l'écriture, soit pour d'autres et notamment les plus de 40 ans en activité professionnelle, un effritement des compétences de base du fait qu'ils ont perdu l'habitude d'écrire ou de lire. Le quotidien d'un illettré est de ne pas savoir lire des consignes, se repérer dans le métro, utiliser un guichet automatique ou bien choisir un plat au menu d'un restaurant. Tant que vous ne savez pas lire, dès que vous êtes dans un milieu que vous ne connaissez pas, vous êtes perdu. C'est pourquoi les personnes en situation d'illettrisme mettent en place des stratégies de détournement pour ne pas faire connaître leur handicap caché. Massivement, c'est ressenti comme une honte.

Une difficulté principale à laquelle nous sommes confrontés est donc, après avoir identifié un demandeur d'emploi ou un apprenti concerné par l'illettrisme, de lui faire accepter qu'il a un problème de cette nature. Nous accompagnons des personnes de plus de 18 ans. Il s'agit principalement de demandeurs d'emploi pour lesquels on construit un parcours adapté avec Pôle Emploi ou d'apprentis que nous accompagnons avec les CFA.

Q : Quelles sont les actions menées pour la 7e édition des Journées nationales d'action contre l'illettrisme, qui se poursuit jusqu'au 12 septembre 2020 ?
CJ : Nous coordonnons 400 actions menées sur tout le territoire par différents acteurs (Pôle emploi, Banque de France, opérateurs de compétences, mairies, associations). Cela prend notamment la forme de séminaires en ligne, d'expositions, de débats et d'actions de sensibilisation dans toutes les agences de Pôle emploi.

Q : A qui s'adressent ces journées ?
CJ : Aussi bien aux intéressés, qui pourront trouver des témoignages, qu'aux professionnels qui s'instruisent des bonnes pratiques. Par exemple, nous présentons un outil numérique qui permet aux chefs d'entreprise ou aux responsables des ressources humaines, à partir d'un questionnaire en ligne d'une durée de 15 minutes, d'estimer le taux de risque d'illettrisme dans leur entreprise. L'algorithme du questionnaire a été élaboré par Pascal Moulette, professeur à l'université Lyon 2.

Q : Quel impact a eu l'épidémie de Covid-19 sur les personnes en situation d'illettrisme ?
CJ : Aujourd'hui, la moitié des personnes illettrées ont un emploi. Évidemment, pendant le confinement, ces personnes n'ont pas pu exercer en télétravail. Il faut penser que leur première difficulté au quotidien était celle de remplir une attestation de sortie du domicile. La plupart du temps, il leur fallait trouver quelqu'un pour la remplir en amont et n'avoir plus qu'à inscrire la date. Etre en situation d'illettrisme, c'est aussi un facteur aggravant avec la crise actuelle: les personnes illettrées qui ont été licenciées auront plus de mal à être recrutées par la suite.

Q : Comment mesurer l'évolution de l'illettrisme ?
CJ : C'est difficile. La dernière enquête officielle, menée par l'Insee, date de 2011 et chiffre à 2,5 millions le nombre d'illettrés âgés de 18 à 65 ans, soit 7% de la population. Nous avons obtenu que la prochaine enquête soit effectuée en 2021 pour un résultat en 2022. Actuellement, nous ne disposons que du résultat des tests effectués pendant la Journée défense et citoyenneté. Les derniers chiffres font état de 30 000 jeunes en situation d'illettrisme sur 700 000.

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