« La santé, c'est la prévention », affirme François Genêt, chef de service à l'Hôpital Raymond Poincaré (Garches), spécialisé dans la médecine physique et de réadaptation. A fortiori pour les sportifs en situation de handicap, afin de limiter tout risque de sur-handicap. « La santé des athlètes paralympiques » était au cœur de la conférence « Médecine des sports olympiques », organisée par l'Académie de médecine le 19 juin 2024. « C'est très appréciable de pouvoir parler de ce sujet en milieu de cession sur le sport, et non en bout de file comme habituellement », souligne le Dr Genêt en préambule.
Tokyo 2020, un modèle médical ?
A deux mois des Jeux paralympiques de Paris 2024, il incite à prendre exemple sur Tokyo 2020. Responsable de la mission médicale des Jeux paralympiques trois ans auparavant, il avait misé sur une « approche préventive ». « Nous avons fait un suivi personnalisé de l'ensemble des para athlètes avant les Jeux afin de régler toutes les problématiques médicales en amont », explique le médecin, en citant par exemple la prescription d'antibiotiques pour « éviter une infection urinaire fébrile du paraplégique la veille d'une compétition ». Résultats : « Aucune complication médicale, aucun para athlète n'a pas pu se présenter pour raison de santé et une réduction de 30 % des consultations sur le plan international », se réjouit-il.
Eviter l'apparition des maladies
Le médecin présente ensuite les schémas de prévention classique : primaire (éviter l'apparition des maladies), secondaire (limiter leur développement), tertiaire (empêcher les complications ou récidives des maladies). « Pour les para athlètes, on a toujours misé sur la prévention secondaire (se reconstruire par le sport, gagner en autonomie, assurer le suivi spécialisé) et tertiaire (éviter les récidives des éventuelles maladies ayant causé le handicap), constate François Genêt. Ils doivent donc bénéficier de l'ensemble des systèmes de prévention de la population générale ! » « Si vous leur demandez la dernière fois qu'ils ont vu un ophtalmo, un dentiste, fait un frottis, un dépistage du cancer de la prostate, c'est extrêmement décevant, proche de zéro ! », s'insurge-t-il, pointant un manque d'accessibilité aux campagnes de dépistage et aux cabinets médicaux.
Une approche médicale double
Parce que les para athlètes ont des « physiologies bouleversées », l'approche médicale est naturellement double, explique-t-il. Pour optimiser leurs performances, il convient en effet de faire un suivi des spécificités liées à leur handicap (maladies causales, traitements en cours, adaptation) et liées au sport (prévention et traitement de la blessure, questionner les modalités spécifiques d'adaptation physiologiques liées à l'exercice physique de haut niveau...).
Communication et adaptation !
Ces spécificités imposent des adaptations de la préparation physique, qui se veut individualisée. L'enjeu ? Protéger la performance et éviter la contreperformance ! Pour cela, une approche « périphérique, coordonnée et multidisciplinaire est de mise », selon François Genêt. Parce que le para sport s'accompagne souvent « d'appareillage » (prothèse, fauteuil de sport, lames de course), il faut aussi tenir compte des adaptations de matériel, qui doivent être discutées entre l'athlète, l'entraîneur et le médecin. La communication, c'est la deuxième clé ! « L'équipe santé est là pour autoriser la pratique et assurer le suivi, et laisse le monde du sport travailler », assure-t-il.
Un nouveau regard sur la surveillance médicale
Pour optimiser toujours plus leurs performances, la Sofmer (Société française de médecine physique et de réadaptation), qui sera dirigée par François Genêt à compter de 2025, a été sollicitée pour proposer « un nouveau regard » sur la surveillance médicale réglementaire (SMR) des para sportifs. Son rapport, remis à l'Agence nationale du sport en août 2022, vise à établir une SMR adaptée à tous les types de handicaps et de disciplines, et à permettre aux médecins d'identifier les ruptures dans le parcours médical. « Pour favoriser un bon maillage territorial, nous avons également lancé un réseau national de médecine physique et de réadaptation pour ces sportifs », ajoute le Dr Genêt. L'enjeu ? Moins de temps passé sur la route, plus de temps pour s'entraîner !
Le 1er institut de para sport connecté
Prochaine étape ? L'ouverture du premier institut santé de para sport connecté sur le site de Bécheville-Les Mureaux (Yvelines) (label héritage des JOP 2024) (Projet: un institut unique pour optimiser le para-sport). Objectif ? « Favoriser la mise à la pratique du sport de toutes les personnes handicapées, quel que soit leur type de handicap et leur âge. » Livraison prévue en 2026.
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