Judo : ils se battent contre un ennemi invisible

En judo, les sportifs non-voyants se battent contre un ennemi invisible. C'est se mettre soi-même dans une situation de peur, inconfortable. Une expérience néanmoins "merveilleuse" ! Point de vue de ceux qui ne voient pas...

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« La discipline prend tout son sens », affirme Christella Garcia, une judoka Américaine qui a décroché la médaille de bronze aux Jeux paralympiques de Rio 2016 le 10 septembre 2016 dans la catégorie des moins de 70 kg. Non-voyante de naissance, la sportive sent que, sur les tatamis, où il faut s'attraper, s'éviter, se déséquilibrer, son handicap n'importe pas. « Quand tu attrapes ton adversaire, tu sens son corps et la façon dont il bouge pour se défendre, explique-t-elle. C'est à celui qui en voudra le plus ». Aux Jeux paralympiques, le judo est réservé aux personnes non et malvoyantes. Pour cela, quelques ajustements sont nécessaires par rapport à la façon dont les valides le pratiquent. Sans le savoir, les participants peuvent sortir de la limite des tatamis et l'arbitre doit les guider afin qu'ils retrouvent le bon chemin. À la différence des combats chez les valides, où le temps défile sur une horloge, c'est une sonnerie qui retentit très fort quand il ne reste plus qu'une minute de combat. Les judokas, l'un en kimono blanc, l'autre en kimono bleu, luttent de façon si habile et féroce qu'ils semblent ne pas avoir perdu la vue.

« Quitter la zone de confort »

L'Américain Dartanyon Crockett, judoka de 25 ans également vainqueur d'une médaille de bronze, a commencé à pratiquer ce sport après le lycée. Apprendre un sport dans lequel on doit être lancé dans les airs ou maintenu au sol par son adversaire n'a pas été simple pour le jeune homme, non-voyant de naissance. « Pratiquer le judo pour les déficients visuels, c'est se mettre soi-même dans une situation de peur, inconfortable, relate-t-il. Il s'agit de sortir de sa zone de confort ». Son entraîneur, Eddie Liddie, maintient que l'enseignement du judo paralympique est difficile car très technique, avec de nombreuses prises, subtilement différentes les unes des autres. « Je suis habitué à montrer les mouvements pour les expliquer aux judokas valides, raconte-t-il. Je dois réussir en faisant en sorte qu'ils mettent leur corps dans certaines positions et qu'ils apprennent à les répéter ». Une fois l'apprentissage terminé, le judo peut s'avérer plus naturel pour les personnes avec une déficience visuelle.

L'intuition développée

La principale différence entre les combats d'athlètes paralympiques et de valides réside dans le fait que les mal ou non-voyants attrapent leur adversaire tout le long, au lieu de se séparer et de recommencer à s'attraper. Cela signifie que deux athlètes non-voyants se retiennent mutuellement. Pour le Vénézuélien Naomi Soazo, vainqueur d'une médaille d'or aux Jeux de Pékin en 2008 et d'une médaille de bronze à Rio, cette connexion est le point de départ. « Quand vous attrapez votre adversaire, vous pouvez sentir ses mouvements, souligne-t-il. Ensuite, votre intuition se développe au point de deviner où il va se déplacer. » Selon lui, le judo booste la confiance en soi bien au-delà des tatamis. En pratiquant ce sport, Christella Garcia affirme avoir gagné des médailles mais également un combat contre elle-même : « Je ne considère plus le fait d'être non-voyante comme un inconvénient. C'est juste l'une de mes caractéristiques: je suis une fille, j'ai les cheveux bruns, j'adore les cupcakes, et je suis non-voyante ».

© Olympic Information Services OIS

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