Fromages au lait cru, charcuterie, sushis… C'est bien connu, durant leur grossesse, les femmes enceintes doivent proscrire certains aliments crus ou à moitié cuits. La raison de cette interdiction ? Une maladie aux lourdes conséquences pour le fœtus : la listériose néonatale, du nom de la bactérie responsable, Listeria monocytogenes. On sait qu'elle peut provoquer un avortement, un accouchement prématuré et/ou une grave infection chez le nouveau-né (septicémie, infection pulmonaire…). Une quarantaine de nourrissons est d'ailleurs touchée chaque année en France. Mais quels sont précisément les effets de cette maladie sur le développement neurologique des enfants survivants ?
Comment les enfants touchés se développent ?
Des chercheurs français, de l'Institut Pasteur, de l'Université Paris Cité et de l'AP-HP ont tenté d'y répondre dans le cadre d'une étude publiée le 20 octobre 2023 dans la prestigieuse revue The Lancet child and adolescent health. « L'une des questions que l'on se posait était de savoir comment les enfants atteints de listériose néonatale, et guéris grâce aux antibiotiques, grandissaient et se développaient », explique Marc Lecuit, responsable du Centre national de référence Listeria à l'Institut Pasteur et dont le groupe de travail a débuté ses recherches en 2009 auprès d'une cohorte nommée « Monalisa ». Infectiologues, pédiatres, neuropsychologues et même épidémiologistes ont suivi une cinquantaine d'enfants nés de mères ayant contracté la listériose à différents stades de la grossesse. L'objectif ? « Evaluer de façon complète leur état santé à l'âge de 5 ans », soit « à un âge clef, celui de l'entrée à l'école primaire », expliquent les scientifiques.
La prématurité en cause
Ces derniers cherchaient à dépister notamment la paralysie cérébrale, les troubles de la coordination mais aussi de l'audition, des fonctions de communication et de socialisation. En comparant les résultats de cette cohorte à ceux d'enfants de même âge gestationnel non infectés, ils ont pu mettre en évidence des séquelles pour deux tiers des cas, parmi lesquels des troubles cognitifs, de coordination motrice, déficit visuel ou auditif. Mais ces conséquences seraient en fait « imputables à la prématurité » des nouveau-nés, « plutôt qu'à l'infection », précise Caroline Charlier, chercheuse au sein de l'unité Biologie des infections à l'Institut Pasteur. Au final, cette étude doit « permettre aux cliniciens de fournir aux parents de nouveau-nés avec listériose des conseils médicaux étayés, et de les informer sur l'évolution de l'état de santé de leur enfant », conclut la chercheuse. Ils devront également inciter à la mise en place d'un dépistage « systématique et prolongé des séquelles possibles afin d'offrir une prise en charge précoce appropriée, accompagnée d'un soutien éducatif adapté », conclut-elle.