L'article de la loi ELAN qui passe à 10% le nombre de logements neufs accessibles aux personnes à mobilité réduite n'est pas "un retour en arrière" car tous devront désormais être "évolutifs", une notion qui sera "précisée par décret", a déclaré le 4 juin 2018 Sophie Cluzel. Interrogée sur le tollé suscité par cet article de la loi logement, qui passe de 100% à 10% la proportion de logements accessibles dans les constructions neuves, la secrétaire d'État aux Personnes handicapées a précisé sur RTL que "les 90% restants seront évolutifs", une notion qui va être "précisée dans un décret pour rassurer les personnes handicapées".
Qu'est-ce qu'un "logement évolutif" ?
"Nous sommes autour de la table avec les associations pour enlever le flou. Qu'est ce que ça veut dire un appartement évolutif ? Tout simplement que des travaux pourront être faits très facilement, à moindre coût, pour le moduler, et pas à la charge des personnes pour tout ce qui ressort des logements sociaux", a-t-elle poursuivi. Selon Mme Cluzel, les parties communes ou les toilettes resteront "totalement accessibles" et les habitants "pourront recevoir des personnes en fauteuil roulant", "on ne revient pas en arrière". "Les appartements pourront être modulés selon les situations des familles",a-t-elle ajouté. Cette mesure permet d'avoir des coûts de construction "moindres" ce qui permettra de "construire plus de logements, plus vite, moins cher et avec une qualité d'usage". "Les associations sont tout à fait au courant, ça fait consensus cette notion d'évolutif", a affirmé la secrétaire d'État. Autre son de cloche de la part d'APF France handicap qui questionne : "Le concept même de logement évolutif est source de discrimination indirecte car quel serait l'intérêt d'un bailleur privé ou social d'accueillir une personne en situation de handicap ou âgée sachant qu'il devra effectuer des travaux pour rendre le logement accessible ?".
Un article voté malgré les critiques
Malgré des critiques de la droite et de la gauche, l'Assemblée nationale a pourtant donné son aval le 1er juin au soir (lien ci-dessous), suscitant plusieurs réactions indignées de personnes handicapées. APF France handicap dénonce un "signal extrêmement négatif" envoyé par le gouvernement qui avait promis de faire du handicap sa priorité du quinquénnat. Fin mars, déjà, une dizaine d'associations s'étaient inquiétées de cette disposition qui va "à l'encontre des besoins, quantitatifs et qualitatifs des personnes en situation de handicap et des personnes âgées". Cela équivaut à "l'introduction de quotas de logement, discriminatoires, en contradiction avec le droit des personnes à choisir librement leur lieu de vie", expliquaient-elles dans un communiqué, s'inquiétant d'une "grave régression sociale".
Un espoir auprès des sénateurs ?
L'Anpihm, qui a fait de cette question son cheval de bataille, a aussitôt réagi : "Si l'accessibilité n'est pas prévue au point de départ, elle ne pourra s'obtenir, qui plus est sans réactivité garantie ni financement assurés, qu'au prix de travaux plus complexes et plus coûteux !" De son côté, APF france handicap déplore que, "malgré de nombreuses rencontres et réunions avec le ministère au sujet du projet de loi ELAN", elle n'ait pas "été entendue". Matthieu Annereau, lui-même député suppléant et président de l'APHPP, association qui oeuvre pour influencer les politiques publiques en matière de handicap, parle de "coup dur". Condamnant la décision des députés, les associations se tournent désormais vers les sénateurs qui vont devoir, à leur tour, étudier ce texte. Leur intimant de "ne pas considérer l'accessibilité comme une revendication catégorielle", elles leur demandent de rejeter la notion de quota introduite par cet article 18.