« Il y a des transports autonomes pour ça. Lui aussi, il abuse, il connaît son handicap... Il faut toujours faire pleurer dans les chaumières ! » Nouvelle affaire de discrimination entre une société de transports et un passager à mobilité réduite. La scène se déroule à Nîmes, le 7 août 2022, vers midi. La SNCF est en grève, le TER en direction d'Alès est supprimé. Comme tous les autres passagers pris au dépourvu, Théo Laurent et son accompagnateur se dirigent alors vers le car de substitution. Au préalable, il avait pris soin de contacter LiO, qui gère la ligne de bus, afin de s'assurer qu'il pourrait embarquer avec son fauteuil roulant. Premier échec. Le véhicule n'est pas adapté, le conducteur s'excuse et assure que le bus de 12h40 sur la ligne régulière sera, lui, équipé d'une rampe. Une vingtaine de minutes plus tard, c'est le soulagement, le car possède un logo « accessible ». Mais la joie est de courte durée... Ledit véhicule pointe finalement le bout de son capot, la porte s'ouvre. Le verdict tombe. Quatres marches se dressent devant lui, et aucune rampe à l'horizon. « Ça ne va pas être possible », achève la conductrive du car 34002. Une passagère filme l'échange. La vidéo (en lien ci-dessous) fait le buzz, indigne et interroge.
3 marches infranchissables
L'homme, démuni, tente de lui expliquer qu'il n'a d'autre choix, son train ayant été supprimé, et fait appel à sa compréhension. En vain. « Vous avez un billet de train, il faut voir avec les services de train, moi c'est un car... Moi, c'est 36 heures à l'avance et c'est mon entreprise qu'il faut appeler... Je veux bien faire des efforts mais installez-vous. Vous voulez que je fasse quoi ? Que je vous porte ? », raille la conductrice d'un ton sec. Un passager propose alors de l'aider à monter dans le car et de mettre son fauteuil dans la soute à bagages. La conductrice persiste et signe : « Il faudra l'aider pour l'aller et retour, c'est pas moi qui va le porter... J'arrive même pas à fermer la porte de la soute. Et puis, quand on veut se transporter dans cet état, on appelle un GIF ou un truc adéquat, on vient pas sur un car où il y a trois ou quatre marches. On y va ! (sic) ».
Obligé de contacter son frère
L'homme finit par capituler. Selon les informations de Midi Libre, il retourne au guichet de la gare et demande un transport de substitution. L'agent finit par accepter de contacter une société de taxi. Nouvelle déception. Aucun véhicule disponible n'est accessible. On lui conseille de prendre le train suivant annoncé après 14h. Ayant déjà deux heures de retard, Théo Laurent contacte son frère, qui vient le chercher en voiture à ses frais. Sur Twitter, de nombreux internautes interpellent les sociétés de transport françaises sur leur « train de retard » en matière d'accessibilité et pointent du doigt la réaction « agressive » et « impolie » de la conductrice.
« Je ne suis pas un monstre »
Elle a également réagi dans les colonnes de Midi Libre. Le passager « a insisté pendant quinze minutes pour monter à bord. Je lui ai dit que mon bus n'était pas équipé, qu'il faut nous prévenir 48 heures en avance. J'étais en fin de service... On travaille quasiment quatorze heures par jour, j'étais fatiguée... Je ne suis pas un monstre. Je n'ai jamais laissé personne sur le trottoir. Mais là, je ne pouvais pas le prendre », explique-t-elle, pointant, par ailleurs, l'attitude de l'auteure de la vidéo. « Elle aurait dû venir l'aider, lui laisser sa place, l'aider à mettre le fauteuil en soute, plutôt que filmer la fin de la scène », estime-t-elle.
Réservation 48h à l'avance VS 2h en Angleterre
Pour rappel, depuis 2020, en Occitanie, la SNCF met à disposition des personnes en situation de handicap le service d'assistance Accès train LiO. Objectif ? « Garantir une assistance bout à bout » entre les 49 gares qui disposent de ce service gratuit. Il est pourtant bien précisé sur le site : « Sachez que tous les trains et autocars régionaux sont accessibles aux fauteuils roulants. » Gratuit, il nécessite néanmoins une réservation au plus tard 48 heures avant le voyage. Et en cas de grève ? « A titre indicatif, en Angleterre le délai est de 2 heures, ce qui est déjà beaucoup mieux », conclut Théo Laurent, amer.