« Célébrer le sport, inspirer, inclure, faire évoluer la société »… Et « interpeller, fédérer, accélérer »… Le ton est donné. « Paris 2024 une chance historique, affirme Alain Rochon, président d'APF France handicap, une seule en un siècle, ne la laissons pas passer ». Et de croire en cette « pression positive » qui a transfiguré des villes comme Barcelone, Londres, Sochi ou Pékin…
Des Jeux à couper le souffle
Fort de cet élan, le comité d'organisation (Cojo) veut se donner les moyens de réussir ces Jeux paralympiques organisés pour la 1ère fois en France du 28 août au 9 septembre 2024, avec « une exigence d'exemplarité », qui promet des « jeux à couper le souffle ». Pour ce faire, il a décidé un acte symbolique fort : un même emblème pour les Jeux olympiques et paralympiques, une première dans l'Histoire (article en lien ci-dessous). Le 3 décembre, un événement a réuni tous les acteurs concernés à Paris en présence de nombreuses personnalités dont Tony Estanguet (patron du Cojo), Marie-Amélie Le Fur (présidente du CPSF) et deux ministres, Sophie Cluzel (handicap) et Roxana Maracineanu (sport). L'occasion d'un bilan très précis sur des engagements « handicap » tout azimut…
Sur des sites iconiques
Les épreuves seront organisées sur les plus beaux sites du Grand Paris, dont huit sports (sur 22) dans les quartiers historiques de la Capitale, un « écrin iconique » permettant, selon Tony Estanguet, une « mise en lumière unique » des athlètes. La para équitation au château de Versailles, l'escrime fauteuil au Grand palais, le tennis de table sur le Champ de Mars ou le football à 5 sous la Tour Eiffel. Cette organisation entend réduire le temps de transport de 90 % des athlètes (moins de 30 minutes entre le village olympique et leur site de compétition) pour une meilleure performance mais aussi, parce que Paris 2024 promet une implication environnementale forte, pour une réduction des coûts et de l'impact carbone. Anne Hidalgo, maire de Paris, dit vouloir œuvrer pour une « ville exemplaire en termes d'accessibilité dans les lieux publics, les commerces et les transports », concernant également 100% des logements du village olympique qui seront ensuite dédiés à la location. Cet événement est un « laboratoire pour la ville demain », selon Tony Estanguet, et une « chance pour l'accessibilité universelle », selon Alain Rochon qui se réjouit que cette feuille de route ait été « co-construite » avec les associations de personnes handicapées.
Une aubaine pour l'accessibilité ?
Pour les spectateurs, Paris 2024 étudie dès à présent toutes les solutions permettant de faciliter un égal accès à l'information en ligne, l'achat de billet, aux modes de transport… Le comité d'organisation entend ainsi « valoriser toutes les innovations qui font la différence dans le domaine de l'accessibilité, afin d'offrir à tous une expérience des Jeux simple, fluide et confortable ». IDF Mobilité promet de nombreuses avancées : 93 % des bus et 13 000 arrêts accessibles, ainsi que 100 % des stations du Grand Paris express, et 95 % des gares franciliennes. Une étude est par ailleurs réclamée pour la mise en accessibilité de la ligne 6, en partie aérienne. Tous les sites seront desservis par des transports en commun : bus, métros, RER, tramways, véhicules légers (vans, minibus). Au moins l'un de ces modes de transport sera accessible aux personnes en situation de handicap. « Le dernier kilomètre » fera l'objet d'un soin tout particulier : cheminement accessible, signalétique efficiente et universelle, moyens de locomotion spécifiques, etc. L'aménagement des sites sportifs permettra une « participation de qualité à tous » : placement des personnes en fauteuil roulant offrant une belle visibilité, audiodescription, etc. Paris 2024 veut être le premier à être certifié norme ISO pour garantir l'accessibilité universelle de tous types d'activités événementielles.
Des emplois durables
Le 3 décembre 2019, à l'occasion du Comité interministériel du handicap, Edouard Philippe, parmi 22 mesures à décliner en 2020 (article en lien ci-dessous), réaffirmait le lancement d'un plan massif de formation au bénévolat, intégrant la formation aux premiers secours, dans la perspective d'un engagement de 3 000 bénévoles en situation de handicap pour les événements sportifs internationaux, et les Jeux olympiques et paralympiques de 2024. Par ailleurs, 100% des volontaires seront formés à l'accueil des personnes en situation de handicap. Le recrutement de personnels handicapés, s'inscrivant dans la durée pour créer des emplois durables, sera également encouragé, via une charte sociale adoptée par le Cojo, tandis qu'un module « Inclusion et diversité » sera proposé à tous les nouveaux collaborateurs. Paris 2024 met également en œuvre une politique responsable des achats, qui fait appel aux secteurs protégé (Esat) et adapté (EA).
Une relève de haut niveau
C'est aussi tout un travail en amont qui est mené pour favoriser l'accès à la pratique sportive des personnes en situation de handicap, enjeu porté par l'ARS (Agence régionale de santé) Ile-de-France qui le juge « majeur et prioritaire ». Tony Estanguet rappelle que le handicap est à nouveau la première cause de discrimination en France en 2019 et qu'elle n'épargne pas le sport. Le constat est en effet amer ; 38 % des licenciés disent avoir rencontré des difficultés pour pratiquer en club, certains par manque de pratique adaptée, d'autres à cause de la « crainte du regard sur le handicap » ou encore du manque d'information sur les offres disponibles. A ce titre, une nouvelle version du Handiguide, qui recense les structures en France (article en lien ci-dessous), est en ligne depuis le 3 décembre, les MDPH s'engageant à faire le relais de ces offres de proximité. Par ailleurs, lancée en mars 2019, la Relève est un programme national de détection des futurs athlètes paralympiques qui propose à des personnes en situation de handicap motivées par la compétition sportive de tester leurs capacités (article en lien ci-dessous). Six tests de détection ont eu lieu sur tout le territoire entre mars et juin 2019, auxquels ont participé 150 personnes dont 49 femmes. Parmi eux, 15 « talents » ont déjà rejoint les équipes de différentes fédérations. La ministre des Sports assure que le parasport va bénéficier d'un programme de recherche au sein de l'Insep (Institut national du sport, de l'expertise et de la performance) sur la haute performance tandis que l'Agence nationale du sport promet de développer une stratégie spécifique dans ce domaine.
Un bel héritage
Après Londres 2012, 81% des Britanniques estimaient que l'événement avait amélioré la perception des personnes en situation de handicap au sein de la société, tandis que, affirme Duane Kale, vice-président du Comité international paralympique (CIP), un million d'entre elles auraient trouvé un emploi par la suite. Tokyo 2020 agirait lui aussi comme un « catalyseur auprès des décideurs, des compagnies de transport, des hôteliers » et aurait « bousculé les lois » au Japon. Paris 2024 entend à son tour se donner les moyens de marquer les consciences, laisser son empreinte, son « héritage », un terme fort dont il a fait son credo. Tony Estanguet assistait pour la première fois à des Jeux paralympiques à Rio en 2016 et dit en « être sorti transformé », notamment grâce à des « histoires auxquelles on s'accroche et on s'attache » ; il affirme, à ce titre, être « complétement mobilisé ». « Nous allons devoir être très bon très rapidement, conclut-il. Moins de 5 ans ». « Avec 4 milliards de téléspectateurs, c'est la France qui va être regardée, », ajoute Alain Rochon. Un challenge commun pour faire évoluer les mentalités « plus vite, plus haut, plus fort » ?