« Perdez la vue au plus vite ! » « C'est le message que pourraient transmettre les personnes qui perdent la vue après 60 ans à ceux qui voient encore », constate Sylvain Nivard, président de Valentin Haüy. En effet, « en France, si vos problèmes de vue sont diagnostiqués après 60 ans, vous ne bénéficiez pas de toutes les aides. C'est absurde. Changeons la loi », martèle l'association via une nouvelle campagne de sensibilisation percutante (vidéo ci-contre, en version audiodécrite). Objectif ? Dénoncer la barrière d'âge fixée à 60 ans pour demander la Prestation de compensation du handicap (PCH), alors que la plupart des maladies oculaires surviennent a posteriori.
Une campagne aussi absurde que la loi ?
Le film L'anniversaire de trop, réalisé par l'agence Josiane, dévoile des images surréalistes où un homme sur le point de souffler ses 60 bougies et ses invités choisissent volontairement de se blesser les yeux pour pouvoir prétendre à la PCH avant l'âge limite. « Ces scènes, volontairement choquantes, sont un cri de colère, pour ne pas dire de désespoir, pour dénoncer de manière radicale, un système devenu obsolète et inadapté », plaide Sylvain Nivard. La vidéo de cinq minutes est diffusée sur les réseaux sociaux et invite à être partagée par le plus grand nombre, pour faire changer la loi. « Parce que finalement c'est ce qu'il y a de plus urgent à faire ! »
Des « personnes âgées dépendantes » et non « handicapées »
Un enjeu d'autant plus impérieux que, selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), un triplement du nombre de déficients visuels serait à prévoir d'ici 2050. En France, près de 2 millions de personnes sont actuellement concernées. 75 % des cas surviennent après 60 ans. Le dispositif actuel empêche nombre d'entre elles d'accéder à des aides (humaines, techniques, animalière, aux surcoûts de transport) « qui leur sont pourtant indispensables pour vivre de manière autonome ». Pourquoi ? Parce qu'à partir de 60 ans, elles sont considérées comme des « personnes âgées dépendantes » et non comme des personnes en situation de handicap. Elles ont donc uniquement droit à l'Allocation personnalisée d'autonomie (APA), « inadaptée dans le cadre d'une perte d'autonomie liée à la vision », poursuit l'Association Valentin Haüy (AVH).
« Un très violent parcours du combattant »
« Pour elles, la vie après 60 ans se transforme en un très violent parcours du combattant, déplore Sylvain Nivard. Imaginez devoir se battre contre une législation qui ne correspond plus à la réalité des parcours de vie et des pathologies. Il est impensable qu'une personne qui perd la vue à 65 ans, par exemple, se retrouve sans solution et soit privée de toute vie sociale faute d'accompagnement. »
Promesse d'abolition non tenue
« La promesse faite en 2005 d'abolir cette barrière d'âge n'a jamais été tenue. 20 ans plus tard, il est temps d'agir pour corriger cette injustice ! », exhorte l'association. De son côté, son président incite les pouvoirs publics à « ouvrir une réflexion sur le vieillissement de la population et les spécificités des handicaps liés à la vieillesse ».
En complément de la campagne, l'AVH lance une pétition sur change.org pour le « droit à une vie digne malgré la perte de vue ». « Puisque les lois et les réglementations ne sont pas appliquées comme promis, nous devons redoubler d'efforts pour être entendus à défaut d'être vus. »
© Capture d'écran de la campagne