« C'est l'histoire d'un homme qui, après avoir perdu ses quatre membres à la suite d'un accident, pense que sa vie est fichue, et plonge dans un état de dépression total. Mais, grâce à sa résilience et sa nouvelle compagne, il va décider de se lancer des défis fous, et ainsi avoir une vie dont il aurait à peine osé rêver avant son handicap, lui qui était ouvrier métallo. » Cette histoire, pitchée par Marie-Castille Mention-Schaar, c'est celle de Philippe Croizon. Un destin fascinant qui sera projeté sur grand écran « fin 2025 ou courant 2026 »...
En plein « repérage » pour le tournage de Pour le pire et le meilleur qui débute le 17 février 2025, la réalisatrice à succès (Divertimento, Le ciel attendra, Les héritiers) revient sur les prémices de ce long-métrage qui promet de faire rire, pleurer et cogiter.
Handicap.fr : Les histoires vraies, c'est « vraiment » votre dada...
Marie-Castille Mention-Schaar : C'est sans doute mon passé de journaliste qui fait que je suis toujours intéressée par les histoires vraies, et ça m'a souvent inspirée pour mes films. Personnellement, en tant que spectatrice, je suis toujours impactée et impressionnée quand je sais que le film que je regarde est inspirée de faits réels. Je pense que le public ne regarde pas et ne ressent pas de la même manière lorsque c'est le cas, surtout face à un parcours de vie inspirant, plein de résilience et de force.
H.fr : Pourquoi avez-vous décidé de mettre en images celle de Philippe Croizon ?
MCMS : En 2022, je tombe sur un documentaire retraçant son parcours. Je ne le connaissais pas du tout et j'étais très étonnée que personne n'ait écrit un film inspiré de son histoire, qui est tout bonnement incroyable. Il est de ces destins hors normes qui mérite d'être mis en lumière... Donc je contacte Philippe Croizon et j'ai la joyeuse surprise d'apprendre qu'il a vu plusieurs de mes films. On se rencontre assez rapidement et j'apprends aussi à connaître sa compagne, Suzana Sabino. Lorsqu'ils m'ont raconté leur histoire, j'ai tout de suite été fascinée et je leur ai fait part de mon désir d'en faire un long-métrage.
H.fr : En effet, le film mettra également en lumière sa compagne, Suzana Sabino, comme un hommage à ces 11 millions d'aidants qui accompagnent, souvent dans l'ombre, un proche en situation de handicap ou en perte d'autonomie...
MCMS : Complètement. C'est très important pour moi que les deux rôles soient à égalité. Philippe est le premier à le dire : si Suzana n'avait pas été là, il n'aurait sûrement pas pu traverser la Manche à la nage et réaliser tous ses défis. Elle l'a vraiment aidé, accompagné, avec un dévouement extrême, dans l'ombre.
H.fr : Vous avez choisi Pierre Rabine, un jeune nageur en situation de handicap, qui n'a pas d'expérience en tant que comédien, pour incarner Philippe Croizon. Pourquoi ce choix ?
MCMS : Lors du casting, j'espérais très fortement trouver un nageur handicapé pour jouer ce rôle, par souci d'authenticité. C'est important pour permettre au public de se projeter, d'être en immersion totale. Après quelques recherches, je suis tombée sur le profil de Pierre et, dès la première rencontre, j'ai été très touchée par son regard, son histoire. Tout comme Philippe Croizon, il a été amputé des quatre membres après avoir été électrisé, puis a trouvé refuge dans la natation. Ils ont beaucoup de points communs, notamment le goût du challenge. C'est d'ailleurs ce qui l'a poussé à accepter ma proposition. Il a eu seulement deux séances de coaching avant les essais, et je l'ai trouvé incroyable. Depuis, il continue ces coachings et échange énormément avec Lilly-Fleur Pointeaux, l'actrice qui incarne Suzana (en photo ci-dessus, ndlr).
H.fr : « Pour le pire et le meilleur », c'est le titre provisoire de ce film. À quoi fait-il écho ? Pourquoi avoir placé « le pire » avant « le meilleur » ?
MCMS : Il fait écho à l'histoire de Philippe, de Pierre aussi. Il a d'abord connu le pire (être amputé si jeune, se faire quitter par sa femme, subir une dépression...) avant de vivre le meilleur, grâce à ce saut en parachute offert par ses fils qui a provoqué en lui un véritable déclic et l'envie de se surpasser, et son histoire avec Suzana. Quelques années plus tard, il déclarait vouloir traverser la Manche alors qu'il ne savait pas nager. Incroyable !
H.fr : Quel est l'objectif de ce film ?
MCMS : Apporter un regard différent sur le handicap et les personnes concernées, ainsi que celles qui les aident et les aiment. Je garde en mémoire l'histoire de mon grand-père, qui était paraplégique à cause de la poliomyélite. C'est avec lui que j'ai appris à marcher, en me tenant à son fauteuil roulant. Malgré ce handicap qui l'a touché adolescent, et son « incapacité », selon l'église, à réaliser son rêve de devenir prêtre, il a eu une vie très riche et a toujours été animé par une volonté de transmettre. Professeur de maths et de français, il a notamment créé le premier organisme, en France, qui visait à favoriser l'accès au sport et à la culture des jeunes handicapés. Son histoire a sans aucun doute un impact sur mon approche et ma vision du handicap.
H.fr : Philippe m'a dit qu'il était angoissé et qu'il le serait probablement jusqu'à la fin du tournage. Un petit mot pour le rassurer ?
MCMS : Je lui ai pourtant faire lire le scénario et lui ai promis que je prendrai soin de leur histoire. Il faut simplement qu'il me fasse confiance, il sait toute l'admiration que j'ai pour lui et pour Suzana. Même si ce film comportera des scènes de fiction, je mets toujours un point d'honneur à ce qu'elles soient respectueuses et en accord avec les principes, les valeurs des personnes dont je m'inspire.
H.fr : Avec Un p'tit truc en plus, Artus signe le plus gros carton cinématographique de 2024, avec près de 11 millions d'entrées. Avec « Monsieur Tout est possible » (alias Philippe Croizon), on peut oser espérer le même succès ?
MCMS : Je n'aurai pas cette prétention, sachant que ce résultat est particulièrement exceptionnel. J'aimerais bien atteindre le million de spectateurs, cela voudrait dire que nous avons sensibilisé un million de Français au handicap et au rôle des aidants. Mais, si je n'ai qu'un seul spectateur qui me dit que mon film lui a donné de la force, de l'énergie, je serai déjà comblée.
H.fr : Après la traversée de la Manche et des cinq continents à la nage, le Rallye Dakar, des centaines de conférences, l'écriture de plusieurs livres, son souhait d'aller dans l'espace... Quel prochain défi lancer à Philippe Croizon ?
MCMS : Avec son parcours et son expérience, je pense qu'il devrait être ministre du Handicap pour améliorer le quotidien des personnes handicapées !
Affaire à suivre... En attendant, « Croizon » les doigts.
© Philippe Croizon
Un film sur Philippe Croizon pour rire, pleurer, cogiter
"Pour le pire et le meilleur", c'est le titre (provisoire) du film qui retracera l'histoire du challengeur quadri-amputé Philippe Croizon, courant 2026. Sa réalisatrice, Marie-Castille Mention-Schaar, dévoile les prémices de ce biopic haletant.
![Portrait des deux acteurs, avec Suzana et Philippe Croizon et Marie-Castille MS.](https://www.handicap.fr/static/contenu/img3/philippe-croizon-un-film-pour-faire-rire-pleurer-cogiter-37761.webp)
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