Par Isabelle Tourné
Alors que les vacances d'été vont bientôt commencer, cette période est souvent synonyme de grand stress pour les parents d'un enfant handicapé, qui ne savent pas encore s'il pourra bien faire sa rentrée à l'école et dans quelles conditions.
Un dossier bien préparé
"L'école inclusive", Caroline Boudet voulait y croire pour sa fille, Louise, 3 ans et demi, porteuse de trisomie 21, qui doit faire sa première rentrée en septembre. Depuis qu'il est arrivé au gouvernement, le ministre de l'Éducation Jean-Michel Blanquer n'a en effet cessé de répéter que la scolarisation des élèves handicapés était une priorité. Depuis plus de sept mois, tentant de faire les choses au mieux, les parents de Louise ont rassemblé tous les papiers nécessaires pour obtenir une AVS (auxiliaire de vie scolaire), qui l'accompagnerait à l'école. "Dès novembre, nous avons rempli un dossier de 20 pages, recueilli des certificats médicaux, détaillé ses journées", écrivait Caroline Boudet début juillet 2018 dans un post Facebook, partagé depuis près de 7 000 fois. Elle raconte avoir même dû expliquer par écrit quel était le "projet de vie" de sa fille...
Une rentrée « difficile »
Après des mois de paperasses, de rendez-vous, de coups de téléphone aux diverses administrations, la rentrée se profile : l'école est prête à accueillir Louise et elle aura une AVS "mutualisée", c'est-à-dire partagée avec un ou plusieurs enfants. "On sait seulement qu'elle sera là 10 heures maximum par semaine, ce qui n'est pas du tout suffisant, mais les bonnes volontés semblaient là sur le terrain", relate Caroline Boudet à l'AFP, encore confiante jusqu'à un coup de fil fin juin, qui l'a "abattue". "Une référente de l'Éducation nationale m'a dit que tous les professionnels -kiné, psychomotricienne, orthophoniste - qui suivent Louise ne pourraient pas venir dans l'école, contrairement à ce qui était prévu, et m'a demandé si je ne voulais pas finalement la laisser en crèche un an de plus". "Amère, épuisée et révoltée", elle ne sait plus de quoi la rentrée de sa fille sera faite : lors de ce même coup de fil, on l'a prévenue que ce serait "difficile".
Tout s'arrête en été
"Le message qui est porté n'est pas 'bienvenue à l'école de la République'", regrette Caroline Boudet, pour qui le début d'une scolarisation ordinaire est pourtant "très symbolique". Elle n'est pas la seule dans ce cas. "Chaque année, à cette période, c'est la même chose", souligne Marion Aubry, vice-présidente de l'association TouPI, qui se bat pour l'accueil des personnes handicapées. En effet, si les dossiers n'ont pas été traités dans les temps - et les délais sont très variables d'un département à l'autre - il faut s'armer de patience car "tout s'arrête en été", la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH) ne tient plus de commissions à partir de la mi-juillet et les rectorats ferment. "C'est une période de grand stress pour les familles", confirme Emmanuel Jacob, administrateur à l'Unapei (personnes handicapées mentales et leur famille), chargé de la scolarisation. "Ce qui est particulièrement angoissant, c'est de ne pas savoir si une modalité de scolarisation adaptée va être proposée à son enfant".
Une angoisse hyper violente
Deborah Zelmanovitch parle, elle, d'une "angoisse hyper violente". Elle a obtenu une place en maternelle pour son fils Joshua, 4 ans, porteur de trisomie 21, dans une école à Paris où l'équipe semble prête à l'accueillir. Mais, en ce début juillet, elle ne sait toujours pas s'il aura une auxiliaire de vie scolaire. "Le dossier a été envoyé début mars", explique-t-elle. Depuis, elle "harcèle" les différentes instances pour connaître l'état de traitement du dossier de son fils. À la veille des vacances d'été, "je ne sais pas s'il pourra aller à l'école, combien d'heures par semaine, si je vais pouvoir recommencer à travailler...", soupire-t-elle. "On fait tout pour que ça se passe bien mais on nous met tout le temps des bâtons dans les roues..."