La République numérique ferait-elle enfin sa place aux personnes handicapées ? Au cours de ses séances publiques des 26, 27, 28, 29 avril et 2 mai 2016, le Sénat a examiné en première lecture le projet de loi pour une République numérique, adopté par l'Assemblée nationale le 26 janvier 2016. Le gouvernement et les sénateurs se sont engagés à assurer l'accès de tous, y compris des personnes handicapées et des plus démunies, au numérique et à ses nouveaux usages.
Une plateforme de transcription pour les malentendants
Ainsi, l'article 43 du projet de loi (vidéo en lien ci-dessous) répondra aux besoins des personnes handicapées de la communication, dans le cadre des communications passées entre particuliers ou vers les plateformes d'accueil téléphonique des services publics et des services clients des entreprises. Il s'agit d'une plateforme en ligne depuis laquelle des professionnels de la communication accessible (interprètes en langue des signes, transcripteurs, etc.) mettent en relation deux interlocuteurs qui n'ont pas le même mode de communication et assurent, en temps réel, l'accessibilité de leur échange téléphonique. Ces services seront accessibles en Langue des signes française, en langage parlé complété et en transcription texte. C'est bien l'ensemble des appels qui seront pris en charge par le relais, qu'ils soient passés ou reçus. Tous les publics directement concernés ont été intégrés au dispositif : sourds, malentendants, aphasiques, sourdaveugles. Il sera sans surcoût pour les utilisateurs et devra fonctionner 24h/24 d'ici 10 ans. Les qualifications et diplômes des professionnels ainsi que les conditions de qualité seront précisées par un décret et contrôlées par l'ARCEP (Autorité de régulation des communications électroniques et des postes). Les opérateurs de téléphonie devront mutualiser le dispositif et les coûts dans le cadre d'un groupement interprofessionnel. Enfin, le gouvernement devra présenter un plan de développement des métiers concernés par le relais téléphonique d'ici 6 mois.
Un débat historique
Jérémie Boroy, délégué général d'Aditus, l'une des associations qui militent en ce sens depuis dix ans, qualifie ce débat « d'historique » - 13 000 personnes avaient signé une pétition mise en ligne début 2016 sur cette question. Il se dit rassuré par le fait que « toutes les réserves exprimées auparavant par les associations (article en lien ci-dessous) ont pu être levées ». Selon lui, elles « se réjouissent de la mobilisation transpartisane exceptionnelle des députés et sénateurs et du gouvernement et souhaitent que la rédaction issue des travaux du Sénat ne soit pas remise en cause lors des prochaines étapes de la navette parlementaire.» La France rejoint les pays les plus avancés en la matière et lève ainsi la principale situation de handicap rencontrée au quotidien par les personnes sourdes ou handicapées de la communication. Cette solution innovante a fait ses preuves là où elle a été déployée pour fonctionner 24 heures sur 24, notamment aux Etats-Unis.
Une carte mobilité unique
Par ailleurs, les sénateurs ont voté la création d'une carte mobilité inclusion qui simplifiera l'accès aux différents services d'aide à la mobilité destinées aux personnes en situation de handicap. Les cartes de priorité, d'invalidité et stationnement seront désormais regroupées au sein d'un même support. Le recours à la technologie numérique permettra de réduire fortement le délai d'obtention de ces aides et de sécuriser l'accès à ces services. Il permettra en outre aux Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), aujourd'hui chargées de la remise des différentes cartes existantes, de recentrer leur action sur l'aide et l'accompagnement de ces publics. Enfin, les sénateurs ont confirmé l'adoption de l'article 44 renforçant les mesures prévues pour rendre accessible l'ensemble des dispositifs de communication des services publics, sites internet mais aussi applications mobiles.