C'est le « Mike Horn du handicap » ! Amazonie, Polynésie, Tanzanie... L'aventurier Arnaud Chassery parcourt le globe en quête de découvertes et de sensations extrêmes. Dans chacune de ses expéditions, il embarque une personne en situation de handicap. L'objectif est double : s'inspirer des coutumes d'ailleurs et sensibiliser. Cette année, son choix s'est porté sur Thomas Vendrame, atteint du syndrome de Charge, une maladie congénitale rare qui entraîne des malformations physiques, des déficiences sensorielles et des troubles de l'équilibre. Grâce au programme Handi'cap sur l'Amazonie, ce jeune homme de 27 ans a pu vivre une expérience unique, du 10 au 23 septembre 2022, en pleine forêt équatoriale afin d'y découvrir la faune et la flore particulièrement variée en Guyane. Immersion au cœur de la jungle la plus vaste du monde.
De l'art de s'adapter
« Thomas avait soif d'aventures. Avant moi, il avait également tenté sa chance auprès de Mike Horn. Peut-être la prochaine fois ? », relate Arnaud Chassery. C'est le désir de Thomas de transmettre, de vouloir montrer que le « handicap n'empêche pas de faire de grandes choses » qui a séduit l'explorateur aguerri qui se dit « bluffé » par sa capacité d'adaptation. Durant treize jours, ils ont vécu dans un camp à trois, avec un reporter vidéaste spécialisé dans l'aventure, tandis que chacun de leurs déplacements étaient sécurisés par un guide professionnel. « Dans la forêt amazonienne, il y a des codes. On ne met pas sa main n'importe où, on ne tire pas sur une liane parce qu'il y a des serpents ou autres bêtes qui peuvent en descendre », souligne-t-il.
Une aventure salvatrice
Thomas a vécu auprès des mygales, nagé avec des caïmans, s'est approché d'un anaconda... Un « rêve » pour ce fan invétéré d'animaux, qui, contrairement aux humains, ne jugent pas. Malvoyant, malentendant et « tout frêle », le jeune homme a été l'objet de nombreuses moqueries et ces expériences traumatisantes l'ont affecté. « Il avait des choses à se prouver, à lui et aux autres », analyse Arnaud. « Vivre en connexion avec la nature lui a permis de se découvrir, se réjouit-il. Cette expérience l'a transcendé et a eu un véritable impact sur sa confiance en lui et la manière dont il appréhende son handicap. » Au début du séjour, Thomas se montre timide, réservé, « dépendant ». « Il me tenait souvent le bras pour être sûr de ne pas trébucher, poursuit Arnaud. A la fin, il refusait que je l'aide, quitte à se déplacer à quatre pattes. » Avant de rentrer en France, « nous avons dansé toute la nuit, il s'est complètement libéré. Thomas est extrêmement sensible et ne triche pas avec ses émotions, on le voit tout de suite quand il est heureux. Là, il rayonnait ! », se remémore Arnaud. De « superbes moments qui resteront gravés » et feront l'objet d'un documentaire couplé avec son aventure tanzanienne.
Au cœur d'une tribu tanzanienne
Car, en effet, Thomas a eu la chance de vivre non pas une mais deux « odyssées » ! En septembre 2021, il avait été accueilli par une tribu africaine. « Peu habitués à voir des Occidentaux, ses membres étaient contents de notre visite. Ils ont senti Thomas vraiment intéressés et l'ont pris sous leur aile, lui apprenant 'l'art de la chasse' ou encore le tir à l'arc », relate Arnaud. Une activité peu commune pour un malvoyant mais qu'il a pu effectuer « comme un chef » grâce à ses lunettes grossissantes. Le jeune intrépide a également approché les lions, les éléphants et les girafes lors d'un safari sur-mesure. « Un pur kiff ! »
Envie d'une virée himalayenne ?
C'est avec cette expédition que le programme Handi'cap a démarré. Arnaud Chassery a ensuite mis sur le cap sur la Polynésie avec les jeunes nageurs en situation de handicap de l'académie Philippe Croizon puis sur l'Amazonie avec Yann Jondot, paraplégique, ancien maire de la commune bretonne de Langoëlan (articles complets en lien ci-dessous). « L'idée est de développer le concept pour en proposer un peu partout dans le monde (Asie, Afrique...) », explique Arnaud qui prépare actuellement Handi'cap sur l'Himalaya. S'il a déjà trouvé des partenaires, il cherche la perle rare qui l'accompagnera au sommet. Intéressé ? Il suffit de postuler sur le site de l'association Alopias. Seuls impératifs : être en situation de handicap et surmotivé. « Je suis en train de créer un fonds de dotation, intitulé 'Vivons l'accessibilité', qui permettra de financer les prochaines expéditions », poursuit Arnaud.
L'académie Philippe Croizon en Amazonie
En attendant, cet « hyper actif » prépare déjà ses prochains défis... en terrain connu. En 2024, il retournera en Tanzanie pour faire l'ascension du Kilimandjaro en joëlette avec une personne avec autisme et une autre malvoyante. Avant cela, en août 2023, il reviendra en en forêt amazonienne, cette fois, avec les jeunes de l'académie Philippe Croizon. « On partirait des îles du Salut, qui abritaient jadis les bagnards. Le but est de raconter une histoire et de dire que le corps est une prison pour certaines personnes en situation de handicap. Nous rejoindrons ensuite le continent, près de Kourou, où se trouve le centre spatial français, histoire de faire un petit clin d'œil à Philippe Croizon qui envisage d'aller dans l'espace », détaille Arnaud. Un périple plein de symboliques... Le deuxième d'une longue série puisqu'il envisage d'emmener ces jeunes une fois par an ou tous les deux ans, « selon les budgets », dans un lieu différent.
© Quentin Furic