Pour faire face à la progression du variant Delta, quels seront les soignants obligatoirement vaccinés à la rentrée ? Le Conseil constitutionnel (décision n° 2021-824 DC) a rendu son avis le 5 août 2021, validant les mesures du gouvernement. La loi relative à la gestion de crise sanitaire (n° 2021-1040 du 5 août 2021, en lien ci-dessous) a été publiée et définit, dans son article 12, la liste officielle exhaustive des « soignants et autres professions en contact avec des publics fragiles » (en lien ci-dessous). Selon le gouvernement, il s'agit de renforcer la protection contre la Covid-19 de ces derniers, particulièrement les personnes âgées ou handicapées, en assurant la couverture vaccinale de leur environnement. Cette obligation concerne les établissements de santé quel que soit leur statut (public, privé, ou privé d'intérêt collectif) et intègre les hôpitaux des armées. Elle s'applique à l'ensemble des personnes exerçant au sein de ces établissements, incluant les soignants mais aussi les agents administratifs même s'ils ne sont pas en contact avec les patients ou le public.
Handicap, quels soignants concernés ?
Plus particulièrement dans le champ du handicap, cette obligation vaccinale concerne un grand nombre de personnels, à commencer par ceux exerçant dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux. Exception est faite pour les travailleurs handicapés d'Esat accompagnés dans le cadre d'un contrat de soutien et d'aide par le travail. Néanmoins, ils peuvent être soumis au pass sanitaire selon le lieu d'exercice de leur activité professionnelle, en application des dispositions de droit commun (ex : restauration, grande surface…). Devront également se faire vacciner les personnes travaillant dans les résidences-services destinées à l'accueil des personnes âgées ou handicapées, les habitats inclusifs, ainsi que les professionnels employés par un particulier employeur, effectuant des interventions au domicile des personnes titulaires des allocations suivantes : l'Allocation personnalisée d'autonomie (APA) ou la Prestation de compensation du handicap (PCH). Les bénévoles d'associations du secteur social intervenant auprès des personnes âgées et vulnérables, y compris à domicile, sont également soumis à cette obligation, tout comme les personnes exerçant dans le domaine des transports sanitaires et ceux pris en charge sur prescription médicale. Enfin, elle s'applique aux prestataires de services et distributeurs de matériels. Plus largement, aux psychologues, ostéopathes et psychothérapeutes, ainsi qu'aux personnes travaillant au sein de leurs locaux. Ces mesures, précisées par un décret du 7 août 2021, vont être détaillées par instruction et protocole à destination des établissements et des services médico-sociaux, précise le secrétariat d'Etat au Handicap le 10 août (article sur les obligations en cas de handicap en lien ci-dessous).
Quel calendrier ?
Ces professionnels ont jusqu'au 15 septembre pour se conformer à la loi. A titre dérogatoire, ils pourront continuer d'exercer jusqu'au 15 octobre 2021, à condition d'avoir reçu au moins une dose de vaccin tout en présentant un test virologique négatif renouvelé toutes les 72 heures. A l'issue, ils auront l'obligation de présenter un schéma vaccinal complet ou une contre-indication médicale à la vaccination. Cette loi est, pour le moment, applicable « jusqu'au 15 novembre 2021 inclus ».
En cas de refus ?
Que se passe-t-il si un soignant refuse de se faire vacciner ? Le salarié peut utiliser, avec l'accord de son employeur, des jours de repos conventionnels ou de congés payés. A défaut, son contrat de travail est suspendu, avec interruption de sa rémunération pour une durée indéterminée. Cette suspension ne peut être assimilée à une période de travail effectif et ne permet donc pas de cumuler des congés payés ni de l'ancienneté. Néanmoins, durant cette suspension, le salarié conserve sa protection sociale complémentaire. Le Parlement avait, fin juillet 2021, décidé que le licenciement au bout de deux mois pour refus de la vaccination obligatoire, comme suggéré par le gouvernement, ne serait pas autorisé. Le congé sans solde, sans limite dans le temps, devrait être suffisamment incitatif aux yeux du Sénat. En cas de contrat à durée déterminée, il prend fin au terme prévu si ce dernier intervient au cours de la période de suspension. Le CDD peut également être rompu sans dommages et intérêts en cas de non-respect du pass sanitaire. Lorsque l'employeur ou l'agence régionale de santé constate qu'un professionnel de santé relevant d'un ordre ne peut plus exercer son activité depuis plus de trente jours, il doit en informer le conseil de l'ordre dont il relève, ce dernier pouvant, éventuellement, décider une sanction pour « manquement déontologique ».
Enfin, selon l'article 17, les salariés, les stagiaires et les agents publics bénéficient d'une autorisation d'absence pour se rendre aux rendez-vous médicaux liés à la vaccination contre la Covid-19 ou s'ils doivent y accompagner un mineur ou un majeur protégé dont ils ont la charge. Ces absences n'entraînent aucune diminution de la rémunération.
Contestation syndicale
La vaccination contre la Covid-19 entre dans le cadre des vaccins obligatoires demandés aux soignants (diphtérie, tétanos et poliomyélite, hépatite B...). Si les professionnels de santé sont à ce jour majoritairement vaccinés (entre 70 et 91% selon les différentes estimations), certains continuent de manifester leur défiance. Dans ce contexte, des syndicats se mobilisent, notamment la CGT qui appelle à une grève nationale illimitée depuis le 9 août 2021, couvrant l'ensemble des personnels, dans le public comme le privé. La rentrée pourrait à ce titre s'annoncer difficile, voire agitée, avec la menace de sous-effectifs. Déjà le médico-social dans le champ du handicap a dû faire face à une fuite de ses personnels depuis 2020, motivés par des salaires plus alléchants dans d'autres secteurs, suite à la revalorisation promise par le Ségur de la santé (article en lien ci-dessous)... Après des mois de revendications, ils ont néanmoins obtenu gain de cause puisque ce coup de pouce (183 euros par mois) sera bientôt élargi aux professionnels du handicap. Mais cette nouvelle contrainte vaccinale pourrait raviver la pénurie.