Voter lorsqu'on est hospitalisé ou résident d'un établissement spécialisé, c'est possible ! Ce droit, certaines personnes en situation de handicap en ont pourtant été privées longtemps (article en lien ci-dessous). Jusqu'en 2019, près de 80 % des majeurs mis sous tutelle, curatelle ou habilitation familiale se voyaient supprimer leur droit civique par le juge des contentieux, parce que considérés comme inaptes à l'utiliser. La loi du 23 mars 2019 a modifié le Code électoral et replacé ce public dans le giron de la citoyenneté en lui accordant un droit de vote sans conditions. Enfin ! Or, il reste encore peu mis à profit. En mai 2019, à l'occasion des élections européennes, 95 % de majeurs sous tutelle n'étaient pas inscrits sur les listes électorales, selon l'Insee.
Un droit civique encore peu utilisé
Pourtant, l'Agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ANESM) recommande depuis 2013 de « rendre accessible l'exercice du droit de vote en proposant un accompagnement pour l'inscription sur les listes électorales ». C'est pourtant loin d'être le cas. 28 % des établissements sondés expliquent ne pas mettre en place ce type d'actions car ils jugent la personne sous tutelle « incapable de voter » (1) (article en lien ci-dessous). Dans son guide « Comment favoriser l'accès au vote des personnes handicapées » (lien ci-dessous), l'association Handéo publie plusieurs recommandations à destination des établissements et services médico-sociaux (ESMS), notamment la création de supports en Facile à lire et à comprendre (FALC), l'organisation de mises en situation « permettant de recréer un bureau de vote fictif » ou encore la « mise en place d'ateliers d'instruction civique pour comprendre le processus électoral et les grandes idées des différents partis politiques ».
Elle rappelle également les principales étapes avant de glisser son bulletin dans l'urne. Comme n'importe quel électeur, le résidant d'un ESMS ou d'un hôpital doit être inscrit sur les listes électorales de sa commune. Le jour-j, il pourra voter, soit personnellement en se rendant dans le bureau de vote dans lequel il est inscrit, soit par procuration.
Procédure au sein du bureau de vote
Dans le premier cas, si le votant est en situation de handicap physique, la loi prévoit qu'il peut être assisté par un autre électeur de son choix, sauf « le mandataire judiciaire à sa protection ou les personnes intervenant ou le prenant en charge dans les établissements sociaux, médico-sociaux et sanitaires, ou travaillant à son service » (2). Cet accompagnant est autorisé à entrer dans l'isoloir et à introduire l'enveloppe dans l'urne. Il peut également signer à la place de la personne handicapée en précisant la mention manuscrite suivante « L'électeur ne peut signer lui-même ». Si le patient est hospitalisé en service psychiatrique en soins libres, le site santementale.fr affirme qu'il doit « solliciter une demande d'autorisation exceptionnelle de sortie auprès du directeur ». Après avis favorable, il pourra quitter l'établissement pour une durée maximale de 48 heures. Même procédure pour un patient en soins sous contrainte, sauf qu'il ne pourra obtenir qu'une autorisation de sortie de courte durée, n'excédant pas douze heures, avec accompagnement par un ou plusieurs membres du personnel de l'établissement(3).
La particularité du vote par procuration
Dans le cas d'une procuration, la loi du 27 septembre 2013 (4) garantit que les patients hospitalisés lors des élections peuvent exercer leur droit de vote par ce biais ; cela concerne également toute personne malade grave, en situation de handicap, en isolement lié au covid. Nul besoin de se rendre dans l'un des services administratifs dédiés (gendarmerie, commissariat ou consulat). Il suffit simplement d'en faire la demande auprès du cadre de santé du service où la personne séjourne, qui en avertit ensuite les autorités. Les officiers de police judiciaire ou leurs délégués peuvent alors se rendre directement dans l'établissement d'accueil. La demande doit être formulée par écrit et accompagnée d'un certificat médical ou d'une attestation justifiant que l'électeur est dans l'impossibilité de se déplacer. S'il est techniquement possible de formuler sa demande de procuration jusqu'à la veille du scrutin, il est recommandé de l'anticiper dans ce cas de figure.
(1) Note d'analyse réalisée par Cyril Desjeux, sociologue et directeur scientifique de Handéo services
(2) Article L.64 du Code électoral
(3) Article L3211-11-1 du Code de la santé publique
(4) Réforme de la loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet des soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge