Muriel Pénicaud, ministre du Travail, a rendu sa copie le 5 mars 2018 sur une réforme particulièrement attendue, celle de la formation professionnelle (détail des mesures en lien ci-dessous). Qualifiée de véritable « transformation », elle fait le constat que l'accès à la formation professionnelle connaît une double inégalité portant sur le statut des salariés et la taille des entreprises. De plus, la difficulté de l'accès aux droits et à l'information constitue un obstacle majeur pour nombre de salariés. Elle propose donc une réforme en profondeur en douze actions concrètes, destinée à tous les travailleurs. Quel impact en cas de handicap ?
Pas de mesure « handicap »
Première à réagir, la Fnath (accidentés de la vie) dit « partager globalement les objectifs de simplification et d'accès aux droits pour tous les travailleurs ». Mais elle s'étonne aussi « qu'aucune mesure ne concerne spécifiquement les victimes du travail et les travailleurs handicapés pour lesquels l'accès à une formation est particulièrement compliqué et constitue pourtant une condition essentielle d'accès et de maintien en emploi. » Il est vrai que, par nature, toutes ces nouvelles mesures, de droit commun, leur sont applicables, notamment la majoration pour les salariés à temps partiel. Toutefois, la Fnath souhaite qu'ils puissent bénéficier d'une majoration du plafond annuel et global au même titre que les salariés non qualifiés. De plus, au-regard des retombées très mesurées du dispositif actuel, le nouveau conseil en évolution professionnelle devra, selon l'association, être formé à l'accompagnement des travailleurs handicapés.
Une appli accessible ?
Enfin, la Fnath juge que certaines mesures bien que positives risquent de constituer des freins pour les travailleurs handicapés. En effet, le développement d'une application web qui semble indispensable et naturelle risque de se traduire par une exclusion numérique de certains travailleurs handicapés si les conditions d'accessibilité ne sont pas travaillées dès le départ. De plus, l'encouragement de solutions innovantes, telles que le MOOC et le digital learning, ne doit pas non plus se faire au détriment de la participation des personnes handicapées.
Autres avis, hors handicap…
Plus globalement, en dehors du champ exclusif du handicap, la CPME (Confédération des petites et moyennes entreprises) a salué ces mesures qui favoriseront « une meilleure articulation entre les besoins des individus, des entreprises et des territoires ». Elle met toutefois en garde contre la décision du gouvernement de faire collecter la cotisation dédiée à la formation par le réseau des Urssaf, et non plus par les OPCA (organismes paritaires collecteurs agréés), « sous réserve de ne pas recréer une usine à gaz avec l'Urssaf d'un côté et les acteurs de la formation de l'autre. Le risque est de revivre ce que l'on a pu connaître lors de la mise en place du RSI ». Elle estime également « impératif » que les représentants des entreprises et de leurs salariés « soient étroitement associés » à la réforme, au risque « bien réel » de passer d'un système « complexe, à un dispositif technocratique, éloigné de la réalité du monde de l'entreprise ».
De son côté, le Syndicat des Indépendants a estimé que « la reprise en main par l'Etat des 32 milliards d'euros de la formation professionnelle est insuffisante » et devrait « s'accompagner d'une politique d'assainissement du marché par l'évaluation et le contrôle d'une offre aussi inadaptée que pléthorique ». Qualifiant le projet gouvernemental de « big flop », l'organisation plaide pour « une refonte globale de la formation professionnelle continue, axée sur les TPE et leurs salariés ».