Fin 2015, 4,2 millions de personnes sont allocataires de l'un des dix minima sociaux en vigueur en France. Avec les conjoints et les personnes à charge, 11% de la population est couverte par ces prestations. Parmi elles, 1,06 million perçoivent l'AAH (allocation adulte handicapé). Ces chiffres (portant sur l'année 2015) sont issus de l'édition 2017 des Minima sociaux et prestations sociales publiée par la DRESS (lien ci-dessous). En 214 pages, elle détaille les différents dispositifs permettant d'assurer la redistribution en faveur des ménages les plus modestes. Le point sur l'AAH, deuxième minimum social en nombre d'allocataires après le RSA socle...
Qui peut bénéficier de l'AAH ?
Créée en 1975, l'AAH est destinée à des personnes handicapées âgées de 20 ans ou plus (la condition d'âge peut être avancée à 16 ans si l'allocataire n'est plus à la charge du bénéficiaire des prestations familiales) ne pouvant prétendre à une pension de retraite, un avantage invalidité (pension d'invalidité et allocation supplémentaire d'invalidité - ASI) ou une rente d'accident du travail d'un montant au moins égal à l'AAH. Elle est attribuée selon des critères médicaux et sociaux évalués par la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH). Elle est accordée dans deux cas : si on reconnaît au demandeur un taux d'incapacité d'au moins 80%, ou bien un taux compris entre 50% et 79% assorti d'« une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi». Son versement prend fin à partir de l'âge minimum légal de départ à la retraite en cas d'incapacité de 50% à 79%. L'allocataire bascule alors dans le régime de retraite pour inaptitude. En cas d'incapacité d'au moins 80 %, le bénéficiaire peut continuer à la percevoir au-delà de l'âge minimum légal de départ à la retraite en complément d'un avantage vieillesse (article en lien ci-dessous). L'AAH peut être accordée aux personnes de nationalité étrangère si elles résident en France et sont en situation régulière. Elle est versée par la Caisse d'allocations familiales (CAF) ou la Mutualité sociale agricole (MSA).
Le montant de l'allocation
Au 1er avril 2017, le plafond des ressources mensuelles s'élève à 810,89 euros pour une personne seule et à 1 621,78 euros pour un couple. Ces plafonds sont majorés de 405,45 euros par enfant à charge. Depuis 2011, pour les bénéficiaires travaillant en milieu ordinaire, les ressources sont évaluées tous les trimestres (également pour les personnes travaillant en établissement ou service d'aide par le travail (ESAT) si elles y débutent après une activité en milieu ordinaire). Pour les autres, l'évaluation reste annuelle (fondée sur les ressources de l'avant-dernière année). Pour une personne seule et sans enfant, l'AAH est une allocation strictement différentielle : son montant est égal à la différence entre le plafond (810,89 euros) et ses ressources.
Et si je vis en couple ?
Pour une personne en couple et dont le conjoint n'est pas lui-même allocataire de l'AAH, l'allocataire perçoit un forfait de 810,89 euros si le revenu mensuel de son foyer ne dépasse pas 810,89 euros pour un couple sans enfant ou 1 216,34 euros pour un couple avec un enfant. Au-delà, et dans la limite du plafond des ressources, l'allocation est dégressive et correspond à la différence entre le plafond des ressources de l'AAH et les ressources dont dispose le foyer. Plus généralement, pour un foyer avec un seul allocataire, le montant de l'AAH est égal au minimum entre le plafond de ressources pour une personne seule et sans enfant (810,89 euros) et la différence entre le plafond correspondant à la situation familiale du foyer et ses ressources, tant que cette différence est positive. Lorsque le montant de l'allocation est égal au plafond de ressources pour une personne seule et sans enfant, l'allocataire perçoit une AAH dite « à taux plein ». Des mécanismes d'abattement peuvent être pratiqués sur les revenus de l'allocataire ou de son conjoint. En particulier, un abattement dit « 80/40 » s'applique aux revenus d'activité de l'allocataire travaillant en milieu ordinaire.
Fin du cumul avec l'ASS
Depuis le 1er janvier 2017, il n'est plus possible de cumuler l'AAH avec l'allocation de solidarité spécifique (ASS) (article en lien ci-dessous). Toutefois, si l'allocataire percevait ces deux aides au 31 décembre 2016, il peut continuer à les toucher tant que les conditions d'éligibilité sont remplies, pendant une durée maximum de dix ans.
Quel profil ?
Les trois quarts des allocataires de l'AAH sont des personnes isolées, en très grande majorité sans enfant. 70% sont âgés de 40 ans ou plus, 44% ont 50 ans ou plus. Six allocataires sur dix ont un taux d'incapacité de 80% ou plus. Un allocataire sur cinq perçoit, en plus de l'AAH, l'un des deux compléments : majoration pour la vie autonome (104,77 euros) ou complément de ressources (179,31 euros), versés sous conditions de ressources.
Quelle progression ?
Fin 2015, 1,06 million de personnes perçoivent l'AAH. Depuis sa création, le nombre d'allocataires n'a cessé de progresser. Entre 1987 et 2004, le rythme de croissance des effectifs, de 3% par an en moyenne, s'expliquait en partie par la hausse de la population âgée de 45 à 60 ans (génération du baby-boom) ; on sait que le risque de handicap augmente avec l'âge. Cette hausse reflétait, par ailleurs, une augmentation de l'espérance de vie des personnes handicapées. Entre 2007 et 2012, la progression du nombre d'allocataires a été plus soutenue (+4 % par an) ; elle est liée, pour une grande part, aux changements institutionnels intervenus : allégement des conditions d'accès à l'allocation et, surtout, revalorisations successives du barème dans le cadre de l'augmentation de 25% (en euros courants) de l'AAH entre 2007 et 2012. S'est ajouté à cela, depuis 2011, le recul de l'âge minimum légal de départ à la retraite qui repousse la fin de droit à l'AAH, entraînant une augmentation du nombre d'allocataires de 60 ans ou plus. Depuis fin 2012, la croissance du nombre d'allocataires diminue (+2,1% en moyenne par an entre fin 2012 et fin 2015), en raison de la fin de la revalorisation de l'AAH. En tenant compte des conjoints et des enfants à charge, 1,56 million de personnes sont couvertes par l'AAH, soit 2,3% de la population.
Une unité sur tout le territoire ?
Le nombre d'allocataires de l'AAH, rapporté à la population âgée de 20 ans ou plus, est de 2,1% en 2015. Cette part culmine dans les départements ruraux ou semi-urbains, notamment ceux du Centre et du Sud-Ouest. À l'opposé, elle est particulièrement faible en Île-de-France. Les trois quarts des écarts entre départements s'expliquent par des facteurs sociodémographiques (âge, état de santé de la population, comportements à risques), sanitaires (offre d'hébergement dans les établissements dédiés aux personnes handicapées) et économiques (chômage, niveau de vie) du territoire. Le quart restant peut notamment relever de différences d'appréciations et de pratiques entre les acteurs locaux.
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