DERNIÈRE MINUTE 10 FÉVRIER 2025
Leur cri de douleur et de désespoir semble étouffé. Depuis 2020, 111 patientes victimes des effets indésirables liés à la pose de prothèses de renfort pelvien ou de bandelettes sous-urétrales ont porté plainte contre les laboratoires ayant commercialisé l'objet de leur souffrance. Fin décembre 2024, l'enquête pour tromperie et blessures involontaires a été classée sans suite. La Haute autorité de santé (HAS) a également renouvelé l'autorisation de ces dispositifs médicaux. Un coup de massue pour ces femmes mutilées et handicapées à vie, dont l'une a d'ailleurs mis fin à ses jours.
Une pétition pour interdire plusieurs implants
En désespoir de cause, le collectif Implant vaginal a lancé une pétition début février 2025 pour alerter sur ce problème de santé publique. Elles demandent à l'État « l'interdiction de ces implants TOT et TVTO en France, et de mettre tout en œuvre au niveau de la recherche médicale afin d'éliminer tout implant vaginal en polypropylene ». Elles réclament également « la création de centres de référence pour retirer en intégralité ces implants entraînant des complications ».
ARTICLE INITIAL DU 17 avril 2024
« La bandelette sous-urétrale qu'on m'a posée a transpercé mon urètre comme un fil à beurre. » A 49 ans, Stéphanie Dupin est reconnue handicapée à 50 %. Elle ne peut plus uriner normalement, rester assise trop longtemps, travailler à temps plein, ni même avoir une vie intime « normale ». La faute à un implant en polypropylène de quelques centimètres, en forme de « hamac », qui lui a été posé sous l'urètre pour empêcher les fuites urinaires. Une intervention de « confort » jugée bénigne et performante. D'après le docteur Peyronnet, chirurgien urologue à Rennes, « les complications sont rares sur la somme des bandelettes posées. Mais, quand ça arrive, cela peut être dramatique ».
80 plaignantes en France
Au total, trois bandelettes de ce type ont lacéré l'appareil génital de la quadragénaire. Comme elle, plus de 80 femmes ont porté plainte en France contre X à la suite de complications. « Certaines victimes sont reconnues handicapées à plus de 80 %, se déplacent en fauteuil roulant, dorment dans des lits médicalisés, ne peuvent plus travailler, n'ont plus de vie sexuelle, ne peuvent plus conduire… Et c'est sans compter les conséquences sur le plan psychologique », déplore Hélène Patte, avocate au Barreau de Paris. Certaines se sont même envolées vers les Etats-Unis pour faire retirer ces implants greffés dans les chairs. Une opération complexe encore peu pratiquée en France.
Deux arrêtés en 2020 et 2021
Pour éviter d'en arriver là, deux arrêtés ont été pris en 2020 et 2021 afin que ces dispositifs soient posés en dernière intention. Le docteur Peyronnet réclame quant à lui plus de transparence et une meilleure circulation de l'information au sein du corps médical, notamment via la création de centres labellisés, avec un meilleur encadrement pluridisciplinaire de ces interventions. Côté judiciaire, un enquêteur de l'Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique (OCLAESP) a été désigné pour recueillir les témoignages des plaignantes. « Nous ne sommes qu'au tout début de l'enquête. Cela peut durer des mois voire des années », explique Hélène Patte. En attendant, les victimes françaises se sont réunies au sein du collectif « Implant vaginal » notamment présent sur Facebook.
© Clotilde Costil